Yandex, géant russe de la recherche web, se lance dans le Big Data (interview)

Par Mathias Virilli, France Télévisions, Direction de la Prospective

Connaissez-vous Yandex ? Si Google détient plus 90% du marché européen du search, le moteur de recherche russe Yandex est le plus utilisé des russophones avec 62% des requêtes (devant Google à 27%). Après avoir lancé récemment un navigateur web, le portail russe vient d'annoncer se lancer dans le Big Data avec la Yandex Data Factory. En proposant des offres de traitement de données aux entreprises, Yandex compte bien se diversifier en s’appuyant sur ce qui a fait son succès jusqu’ici : le machine learning.

En marge de la conférence LeWeb'14, Méta-Media a posé quelques questions à Vladimir Isaev, chargé des relations presse chez Yandex :

Yandex est le premier moteur de recherche en Russie. Quelles sont les clés de votre succès et la spécificité de votre algorithme de recherche ?

Nous pensons que le principal facteur ayant contribué à notre succès est le fait que nous comprenions mieux nos utilisateurs - en Russie et dans d’autres pays - que d’autres moteurs de recherche.

La Russie est un vaste territoire (deux fois la taille de l’UE) avec une large population ; elle compte ainsi de nombreuses différences culturelles et autant de manières de voir les choses !

Nous nous démarquons par notre capacité à comprendre ce que les gens de différentes parties du pays veulent dire quand ils utilisent le même mot dans une requête. Cette compétence et l’expérience font de Yandex un moteur de recherche très naturel et natif pour la plupart des Russes, Ukrainiens, Biélorusses et Kazakhs – et nous espérons que ce sera le cas pour les Turcs également.

Comment abordez-vous chacun de vos marchés ? Avez-vous prévu une expansion en Europe ou ailleurs ?

Tous les marchés sont assurément différents, et nous essayons de mettre en place un modèle trans-local dans chaque nouveau territoire. Trans-local veut dire que nous considérons en profondeur tous les facteurs lors de la construction de produits pour un marché spécifique : la législation, la langue, le climat, la religion, la démographie, l’influence des médias de masse – tout. On essaie donc non seulement de s’adapter mais de reconstruire nos produits pour différents marchés.

Nous avons aussi développé des services en ligne qui aident à résoudre des problèmes dans une région particulière.

Par exemple en Russie, nous avons un service de comparaison de prix extrêmement populaire appelé Yandex.Market, qui aggrège et trie les offres de prix de dizaines de milliers d'e-shops (des meubles à l'électronique, du matériel de réparation aux pièces détachées de voitures). Nous avons lancé ce service parce que le e-commerce en Russie était désordonné, et les utilisateurs ne savaient jamais où trouver la meilleure offre de prix et le meilleur service de livraison.

Nous avons aussi Yandex.Taxi - un service d'aggrégation de taxis à Moscou et Saint Petersbourg. Là encore, nous l'avons lancé parce qu'il était impossible de trouver un taxi libre à proximité rapidement à Moscou à cause des embouteillages, des services de taxi clandestins et des coûts très élevés des taxis officiels. Maintenant, vous n'avez plus qu'à vous connecter à l'appli mobile et le taxi vient en 4 minutes où que vous soyez. Cependant, Yandex.Taxi est un service d'aggrégation, nous nous associons avec des compagnies de taxis sans leur faire concurrence, puisque nous n'avons pas notre propre parc de véhicules, comme pour beaucoup d'autres services.

En Turquie, nous supportons depuis longtemps un service pour le Ramadan afin de suivre quand le soleil est levé ou couché. Ce service a été développé spécialement pour la Turquie.

 

yandex market

 

Il nous est impossible de parler de nos plans futurs dans d’autres régions. Ce qu'on peut dire, c'est qu'à priori nous ne prévoyons pas d’offrir de services aux consommateurs dans d’autres régions ; bien qu'il ne faille jamais dire jamais.

Vous avez annoncé à LeWeb'14 que vous vous lanciez dans le Big Data avec Yandex Data Factory. De quoi s'agit-il ?

Cela fait plus de 15 ans que nous utilisons des systèmes de machine learning pour fournir les meilleures réponses aux utilisateurs de notre moteur de recherche. Le search peut se résumer à la Big Data (base de données d’index) et aux mathématiques (pour la pertinence). Il y a quelques années, nous avons vu que les données étaient accumulées non seulement sur Internet, mais dans presque toutes les industries, de la finance aux télécoms en passant par les smart cities et l’agriculture.

Nous pensons pouvoir appliquer nos algorithmes, basés sur le machine learning, pour faire des outils business pratiques à partir de ces grands volumes de données que les entreprises possèdent. Les objectifs sont tout ce qu’il y a de plus concrets : augmenter les ventes, réduire les coûts, optimiser les processus, éviter les pertes, prédire la demande, développer de nouvelles méthodes ou améliorer les existantes pour cibler un public.

Pour nous, Yandex Data Factory  est comme une nouvelle page de l’histoire : ce marché est aussi jeune et émergeant que le marché de l’Internet quand Yandex a commencé avec son moteur de recherche en 1997.

Avez-vous prévu d’aller plus loin dans la diversification de vos activités en 2015 ?

Il m’est impossible de commenter nos plans pour l’avenir, désolé. Ce qui est sûr c’est que nous allons travailler sur Yandex Data Factory comme une nouvelle direction de business international ; le projet n’est pas lié à une région particulière, car les algorithmes et les mathématiques sont universels !