Par Lisa Rodrigues, MediaLab de l'Information à France Télévisions
Une nouvelle étude parue dans The International Journal of Press/Politics nous en apprend plus sur les habitudes de consommation de l’actualité dans 17 pays européens. Le constat est sans appel : pour être bien informé, privilégiez les médias traditionnels en petite quantité, sinon, gare à l’indigestion d’information.
L’enquête dégage cinq profils - ou régimes - types de consommateurs d’actualité. Tout d’abord, nous avons les “online news seekers”, les plus nombreux, avec 32% des répondants. Ils s’informent en priorité via des sources digitales, qu’elles soient journalistiques ou non, et sont très friands d’actualité. Ensuite, nous retrouvons les “social media news users” représentant 22% des sondés. Comme leur nom l’indique, ils s’informent quasi exclusivement via les réseaux sociaux, mais ils ne sont pas spécialement attirés par le suivi de l’actualité.
Sont désignés comme “traditionalists” 19% des répondants, considérés comme de grands consommateurs d’information. Ils vont plutôt la chercher dans les formats traditionnels - télévision, radio, presse écrite - et les grands titres bien installés dans le paysage médiatique de leur pays. L’étude identifie également les “news minimalists” - 17% des sondés - qui, eux, ne suivent quasiment pas l’actualité, mais restent au courant des informations principales. Enfin, on retrouve les 10% restants désignés comme les “hyper news consumers”, très au fait de l’actualité qu’ils suivent sur tous types de plateformes, formats ou médias presque sans interruption.
Des régimes ancrés géographiquement
Les “news minimalists”, bien que suivant peu l’actualité, font paradoxalement partie des populations les plus éduquées du groupe, ayant une connaissance politique développée. On les retrouve notamment dans les pays du nord de l’Europe - France, Allemagne, Royaume-Uni, Pays-Bas. Leur multiculturalisme, leur intégration dans les relations mondialisées et leur relative confiance dans les grands médias sont des explications avancées pour comprendre ce relatif "désintérêt" pour l’actualité.
A l’inverse, dans les pays du sud de l’Europe - Espagne, Italie, Grèce -, on retrouve davantage de “online news seekers” et “d’hyper news consumers” parmi les habitants. Les populations ont historiquement moins confiance dans les grands médias de leur pays, mais sont tout de même demandeurs d’information. Ils se tournent ainsi beaucoup plus volontiers vers les sources digitales et alternatives, plus faciles d’accès et moins chères que les formats traditionnels.
Des régimes qui influencent l’intérêt et la compétence politique
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, l’étude révèle que ceux ayant la meilleure compétence et connaissance politique sont ceux ayant un suivi non-intensif de l’actualité - comprenez, les “traditionalists” et les “online news seekers” -, à quelques exceptions près suivant les pays. Ces deux profils ont des habitudes de consommation de l’actualité plus marquées, et ils ont tendance à rester fidèles à leurs sources d’information en en limitant le nombre. Ainsi, ceux qui consomment une meilleure actualité sont les personnes qui privilégient la qualité de l’information à la quantité.
Chercher à s’informer à partir d’un large panel de titres ou de formats - une indigestion d’actualité en somme - ne transforme pas la personne en consommateur éclairé, c’est même parfois tout le contraire. A l’inverse, simplement scroller son fil d’actualité ou survoler son journal - comprendre, dérouler les informations et ne grignoter que des bouts d’actualité - n’est pas non plus la solution.
La règle d’or pour un régime médiatique sain est donc : informez-vous de manière équilibrée avec des sources saines.
Illustration : Clementina Toso - Unsplash