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Now then, what emoji shall we use for the Greek economy? Photograph: Sander de Wilde/Corbis via Getty Images
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La science fiction est-elle une science prospective ?

Par Pierre-Olivier Cazenave, Délégué Général I Social Media Club France. Billet invité.   

“Nous sommes dans le futur”, “le présent rattrape l’avenir” ou, autre antienne répétée à longueur d’articles dans les médias : “le temps semble s’être accéléré ces deux dernières décennies”.

La presse quotidienne puise désormais dans les imaginaires déployés par les auteurs de science fiction pour faire face au déferlement d’innovations annoncés par la high tech, GAFA en tête. Le rythme et la nature de ces innovations en sont responsables : des écrans tactiles à l’Intelligence Artificielle (IA) en passant par les réalités virtuelles, augmentées, les algorithmes et les chatbots. Leur potentiel et leur impact auraient ainsi déjà largement été abordés par des auteurs de SF.

Tiens ! La Science-Fiction serait-elle donc une science prospective ?

Pour en discuter le Social Media Club France a réuni il y a quelques jours à Paris Gérard Klein, auteur de science fiction français, éditeur et  directeur de collection emblématique chez Robert Laffont, dont l’apport au genre est colossal ; Aurélien Fache, pionnier de l’internet français ayant participé au développement des sites français Lycos, Multimania, Caramail, Dailymotion et cofondateur d’OWNI, passionné de science fiction et héraut des réalités artificielles ; et enfin Thierry Keller, fondateur et directeur des rédactions d’Usbek & Rica, le « média qui explore le futur », un désormais classique, en kiosques tous les trois mois et accessible en ligne. Un débat préparé et animé par Pierre-Olivier Cazenave, Délégué général du Social Media Club France, directeur de la programmation chez mind news, et par Jean-Dominique Séval, Directeur général adjoint de IDATE DigiWorld et auteur d’un essai de rétroprospective “Vous êtes déjà en 2025”.

Une période d’incertitude propice au retour de la SF

C’est d’habitude vers la prospective que l’on se tourne pour avoir une idée du futur. « Il y a un regain d’intérêt pour la prospective, car nous sommes dans une période d’incertitude », analyse Jean-Dominique Séval. « En prospective, on essaie de déceler des tendances lourdes, des possibilités de rupture, dont les acteurs peuvent tirer partie, ou dont ils vont souffrir », confirme Gérard Klein. Mais pour Aurélien Fache (Makery), la prospective se nourrit de plus en plus de l’univers science fictionnel.

La science fiction d’aujourd’hui ne reflète pas seulement les craintes de nos sociétés contemporaines, mais inspire très fortement notre futur. Selon lui, les auteurs de science fiction travaillent maintenant main dans la main avec les entreprises privées pour élaborer le futur. Notre futur.

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Et ce n’est même pas dans la Silicon Valley que ça se passe, mais dans une banlieue sans histoire, à Fort Lauderdale, en Floride. C’est là que s’est installée Magic Leap, une entreprise qui travaille sur des dispositifs de réalité augmentée. Après avoir levé près d’un milliard de dollars, auprès, entre autres, de Google, Magic Leap a embauché un auteur de science fiction, Neal Stephenson, au poste de “futuriste en chef”.

Une nomination loin d’être anodine pour Aurélien Fache : « Aujourd’hui, les porteurs de projets vont pitcher avec des bouquins de science fiction sous le bras ! ».

Le classique, c’est Snow Crash (Le Samouraï virtuel en français, publié en 1993), un livre de Neal Stephenson justement. Un roman qualifié de cyberpunk, et qui a la particularité d’anticiper une fin plutôt positive à un monde dystopique, montrant par là que l’avenir technologique n’est pas forcément un repoussoir. Pour Aurélien Fache, ce livre a fait entrer le futur dans le présent.

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« Le nombre d’anecdotes, d’intrusions de l’univers science fictionnel dans le monde concret du capital-risque est impressionnant. » En clair : la science fiction est une valeur refuge, parce qu’elle préparerait les succès capitalistiques de demain. « Il y a un véritable lien entre l’imaginaire science-fictionnel et les entrepreneurs aux États-Unis, poursuit Aurélien Fache, la science fiction imagine, les ingénieurs rendent disponible pour le plus grand nombre ». Martin Cooper ingénieur chez Motorola, à l’origine des premiers téléphones cellulaires, assume à ce titre avoir été marqué dans sa jeunesse par le communicator de Star Trek en 1966. Jusqu’à ce que ses équipes le fassent devenir réalité dans les années 80.

« L’avenir est une perle insérée dans le cerveau d’un fœtus » – Gérard Klein

Fille illégitime de la réflexion et de la prospective, la science fiction donne en effet un éclairage du futur, souvent biaisé. H. G. Wells, dans sa Machine à explorer le temps (1895), propose une vision du futur imprégnée par ce qu’il observe de sa propre époque : « Wells combine l’invention d’une merveille scientifique, une exploration de l’avenir, et une vision darwino-marxienne de l’évolution de la société industrielle », s’amuse Gérard Klein. Une société de l’an 802 701, où les Morlocks vivent sous terre, et remontent parfois se nourrir des Elois, oisifs et décérébrés : un message politisé par lequel Wells dénonce la dégénérescence potentielle que porte en lui l’exploitation capitaliste, qu’il voit sous ses yeux de contemporain de l’Angleterre victorienne.

L'odyssée de l'espace

L’intérêt pour la science fiction est davantage à chercher dans l’information qu’elle apporte sur la société dont elle est issue, que sur celle qu’elle entend dépeindre. Au, contraire, Dans Robur le Conquérant (1886), Jules Verne annonce la supériorité des avions sur les dirigeables quelques décennies avant leur invention. Ce roman incarne la tendance d’un genre à s’enthousiasmer sur le potentiel des technologies à venir, tout en passant à côté des principaux changements sociétaux qu’elles impliquent (vitesse, abolition des distances, etc).

« La science fiction n’est pas une description de l’avenir,  elle est simplement une représentation de l’avenir par des auteurs singuliers », temporise Gérard Klein.

Parler de science fiction, ce n’est pas revenir en arrière pour voir à quel point les auteurs d’anticipation ont eu raison  – ou tort – dans leurs prévisions. Parler de science fiction, à l’heure ou le présent rattrape le futur, c’est se demander à quoi peut-elle bien servir ? Que nous révèle-t-elle de notre monde contemporain ? Peut-elle nous aider à mieux apprivoiser l’arrivée de nouvelles technologies dans nos sociétés ? Peut-elle être finalement un complément à des méthodes prospectives parfois limitées dans leur capacité à envisager tous les futurs possibles ?

Le spectre de la dystopie plane sur le futur

Pour Thierry Keller, ça ne fait aucun doute : « nous sommes dans une phase d’accélération technologique sans précédent. L’IA, le maniement de la data, ce sont des choses qui surviennent, alors qu’elles n’étaient que pensées. » La science fiction a donc un rôle : celui d’aiguillon. « La SF est, à mon sens, à dominante dystopique. Son rôle, c’est de mettre en garde sur la direction que l’on prend. Regardez « 2001, l’Odyssée de l’espace ». Il s’agit de nous mettre en garde sur le potentiel ravageur de l’IA. Même si, d’un autre côté, l’IA devient indispensable. »

Les auteurs de science fiction seraient nos vigies du futur. En déployant le champ des possibles à partir d’une évolution possible de nos sociétés autour d’une technologie, ils nous mettent en garde vers son évolution dystopique.

C’est là tout le rôle du genre littéraire de l’anti-utopie, selon Gérard Klein, c’est-à-dire une « démonstration littéraire d’une thèse selon laquelle la réalisation d’une utopie amputerait l’espèce humaine de son humanité. »

On ne peut s’empêcher de penser au premier épisode de la troisième saison de la série Black Mirror, Nosedive, qui dépeint un monde dystopique où toute interaction sociale est évaluée sur une note allant de un à cinq. Exactement comme on peut d’ores et déjà noter son chauffeur Uber. Les futurs dystopiques interrogeraient-ils eux aussi davantage nos angoisses contemporaines que les évolutions réelles ou à venir de la société ?

Black Mirror

« C’est de la science fiction ! »

Des sociétés comme Magic Leap essaient de préparer l’après, de penser l’inimaginable, ce qui reste un exercice incertain. Gérard Klein le confirme : des grandes erreurs ont été faites, parce que l’on avait du mal à imaginer cet ‘après’, le ‘pas (encore) possible’.

Et l’auteur de science fiction de confier une petite anecdote : « il y a quelques décennies, il y avait une méthode très simple pour faire rire les experts de la prospective du France Télécom de l’époque : c’était de parler téléphone portable. Pour eux, c’était de la science fiction. Ni la compression des données, ni la miniaturisation de l’informatique n’était concevable à l’époque. » On connaît la suite.

La science fiction joue ce rôle d’outil de projection dans un champ des possibles qui n’est pas encore concevable. Aurélien Fache raconte que, lui aussi, a été confronté à cet ‘après’ : au début des années 2000, la technologie ne permettait pas de visionner des vidéos à la demande : les volumes d’information étaient trop importants. Ce qui ne l’a pas empêché de participer à la création de Dailymotion, tablant sur une évolution technologique rapide. Ce qui s’est avéré un pari risqué, mais gagnant.

Penser à l’après, c’est précisément ce que tente de faire, tous les trois mois, Usbek & Rica. « Dans les derniers numéros d’Usbek & Rica, on a commencé à faire de l’utopie concrète, parce qu’on s’est rendu compte qu’on était dans un pays, dans un époque, qui n’allaient pas très bien, et qui avait besoin d’espoir sociétal », confie Thierry Keller. « Dans ces derniers numéros, on essaie de donner corps à cette nouvelle France qui cherche à faire société, avec la disruption de la technologie. »

Faire société, justement, deviendrait de plus en plus difficile, car la technologie nous isole les uns des autres, nous force à l’individualisme.

« Rien à foutre de ce à quoi ressembleront nos smartphones dans dix ans. Par contre, ce qui m’intéresse, c’est de savoir quelles seront les conséquences sociales et culturelles des avancées technologiques. Ce qui est intéressant dans la science fiction, c’est l’interaction entre la technologie et l’humain », insiste Gérard Klein.

« La rencontre de la démocratie et de la technologie a tendance à dissoudre la société dans l’individualisme. Nous, nous cherchons à brancher la technologie sur la question sociale, pour voir dans quelle mesure c’est le socle, la société, qui pose un problème. » Pour le journaliste, le défi est clair : la société doit se réapproprier la question technique pour éviter que la technologie nous enferme dans des bulles.

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« Nous mourrons tous dans un pays étranger : l’avenir » John Brunner  (1934 – 1995)

Dans le même temps la science fiction elle-même évolue. Si on la voit beaucoup au cinéma ou à la télévision, on se demande qui la lit encore aujourd’hui en France ? A tel point que Jean-Dominique Séval lance dans le débat qu’il faut peut être compter avec « la mort de la science fiction». Une partie de ce qui avant été annoncé par les auteurs de l’âge d’or serait désormais advenu dans nos quotidiens  :

Il ne faudrait pas tomber dans une lecture du phénomène trop centrée sur ce qu’il advient dans les pays d’élection du genre que sont les Etats-Unis, le Royaume-Uni, la France ou l’Allemagne. Ailleurs, où les promesses de la science ne sont pas banalisées voire contestées (en tout cas où la science ne suscite plus l’engouement collectif qu’elle a pu rencontrer dans les années 60 et 70), il semble que de nouveaux foyers de SF se ravivent, comme en Chine ou sur le continent Africain.

Reste-t-il encore des choses à imaginer ? L’accélération technologique, en nous faisant entrer dans un futur qui nous paraissait inaccessible quelques années auparavant n’aurait-elle pas désenchantée la science fiction ? En d’autres termes : est-ce que la SF est morte ?

Gérard Klein veut croire le contraire : « que peut faire la SF aujourd’hui ? Certainement pas lire l’avenir. En revanche, lire de la science-fiction est un décrassage intellectuel indispensable pour ceux qui dirigent des entreprises ou des sociétés. Ce qui est intéressant, c’est de lire de la SF en se demandant pourquoi les auteurs de SF se sont plantés. Parce que ça permet de savoir pourquoi les prospectivistes vont se planter à nouveau. »

À vos classiques ! 

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Cahier de Tendances N°12 : Parler à la génération #NoBullshit

Voici la 12ème édition de notre Cahier semestriel de Tendances sur l’évolution des médias et du journalisme, dédié aux jeunes, à une génération « on demand », habituée désormais à une nouvelle expérience de qualité dans sa manière de s’informer et de se divertir. 

Comment rester pertinent et attrayant ? Quelles sont les clés de l’engagement et de la connexion émotionnelle ? Est-ce donc si difficile de produire des contenus et des oeuvres qui intéressent cette génération qui a grandi avec Internet et porte le monde dans sa poche, puis de les livrer là où ils vivent ?

Avec de nombreux acteurs talentueux de cette mutation nous avons tenté de tracer quelques pistes, le plus souvent grâce à des exemples concrets, afin de voir comment mieux répondre aux nouveaux usages, qui demain seront dominants. Nous avons donc été observer ceux — jeunes et vieux médias — qui déjà tracent la route aux Etats-Unis, au Canada, en Europe et en Afrique.

De Vice à Melty, de Radio Canada à la ZDF, de Mashable aux Eclaireuses, d’Ohmygoal à Gamology, de Radio Univers FM à ActualitésCD, de Pokemon Go à YouTube, en passant par TEDx, Musical.ly, Bitmoji et Snapchat, de la vidéo 360° à la réalité virtuelle, nous avons épluché recettes et expérimentations pour mettre en valeur les traits dominants des médias qui séduisent aujourd’hui les millennials.

Merci donc infiniment à Alexandra Yeh (responsable d’édition), Robert Amlung, Emilie Balla, Kati Bremme, Jennifer Brohan, Hervé Brusini, Barbara Chazelle, Jérémie Clévy, Jean-Christophe Defline, Jérôme Derozard, Joseph Jacquet, Steven Jambot, Thomas Le Jouan, Michel Lévy-Provençal, Patient Ligodi, Melody Madar, Sophie Petit, Michael Philippe, Xavier K. Richard, Clara Schmelck et Damien Van Achter.

La traque des nouveaux usages médias est, bien sûr, assurée dans cette édition automne-hiver, de même qu’une sélection d’ouvrages recommandés.

Très bonne lecture ! 

ES

Comme celle-ci, les précédentes éditions semestrielles sont toutes disponibles gratuitement en pdf. dans la colonne de droite de ce blog. 

Liens vagabonds : dans Trump Nation, “les faits ne comptent plus”

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Liens vagabonds : le basculement vers la TV en OTT s’accélère

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Web Summit à Lisbonne : l’hypermarché des start-ups !

Par Frédéric Lecoin, Direction de l’Innovation | Relations avec les start-ups

C’est lundi et il neige sur Paris, ce sont les premiers flocons de la saison. Quelques heures plus tard, l’atterrissage s’effectue sous le soleil et 10 degrés de plus… Quel contraste ! Me voici plongé dans mon environnement des 3 jours suivants : après plusieurs éditions à Dublin, le Web Summit déménage à Lisbonne pour le plus grand bonheur des participants mais également de la capitale portugaise qui cherche à booster son économie et attirer des acteurs des nouvelles technologies.

Le Web Summit, c’est l’un des plus grands événements européens autour des technologies numériques, plus de 50 000 participants, 1 500 start-ups exposantes et près de 700 intervenants issus d’horizons très divers.

En ce qui me concerne, il s’agit d’une première plongée dans un événement de ce type, entre excitation de découvrir Lisbonne, d’assister à des conférences passionnantes, de rencontrer des start-ups dynamiques et appréhension liée à cette énorme machine.

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Un événement gigantesque

Pendant 3 jours, 50 000 personnes ont donc envahi Lisbonne, et plus particulièrement la MEO Arena. Pour le métro lisboète, c’est beaucoup ! Peut-être trop ! Chaque matin, la « linha vermelha » déverse difficilement son flot de startupers, d’investisseurs, de journalistes, de professionnels des nouvelles technologies partis à l’abordage du centre de conférence constitué de 4 pavillons et une enceinte équivalente à celle de Paris-Bercy.

On se sent un peu perdu et bien petit au milieu de tout ce beau monde. La première journée est l’occasion de visiter le centre -involontairement- de fond en comble, en multipliant les allers et venues entre les différentes scènes d’intervention, les stands des start-ups, les points d’information et les espaces de restauration. Par la suite, les participants apprennent à rationaliser leurs déplacements !

 Day 3 lets go #WebSummit pic.twitter.com/G3nbIaLpxe

Le programme des trois journées du Web Summit est chargé et ne laisse que peu de place à la flânerie dans la capitale portugaise. Les conférences sont incessantes, simultanées, sur des thèmes très variées, avec une approche très globale, stratégique ou politique. Quelques exemples : « Will technology kill democracy ? », « Facebook, ten years from now… » ou encore « The future of the worker ». Elles proposent des interventions assez courtes de personnalités, comme António Costa, Premier ministre portugais, Carlos Ghosn, PDG de Renault-Nissan, Sean Rad, fondateur de Tinder, ou la youtubeuse Meredith Foster. Au final, peu de surprises, peu d’annonces, et un programme de conférences jugé guère dynamique et assez décevant.

Et en effet, l’essentiel du Web Summit ne se joue pas sur les scènes du « Centre Stage », du « Panda Conf » ou du « Future Societies » mais dans les allées du centre de conférence dans lesquelles se développe un monde parallèle.

Pas de saudade, de fado ou de pastéis de nata, mais des start-ups (beaucoup!) et du business

Les allées de trois pavillons accueillent ainsi des start-ups différentes chaque jour, sur des stands, des workshops dédiées à ces jeunes sociétés et des scènes de pitchs. L’activité de ces start-ups porte sur la finance, le sport, les objets connectés, la santé, les datas, l’intelligence artificielle, etc. Ces start-ups sont classées par thématiques, mais également par stade d’avancement, de « alpha », pour les sociétés émergentes, à « start », pour celles davantage installées, en passant par « beta » pour les start-ups ayant déjà opéré des levées de fonds.

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Les stands des start-ups constituent des lieux de networking, de prospection, de business. Dans cet univers numérique, les cartes de visite continuent à s’échanger frénétiquement ; l’échange et la parole restent le moyen privilégié d’acheter, de vendre, d’interpeller, de créer le contact, de convaincre.

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Dans ce grand supermarché des start-ups, pas de grand show, pas de stands démesurés (y compris pour les quelques grandes entreprises présentes, surtout portugaises), pas de démonstrations attirant la foule, mais des rencontres sur des stands minimalistes, réattribués chaque jour à un nouveau « locataire ». Face à cette offre quasi infinie, le participant a intérêt à préparer sa journée et identifier au préalable ses centres d’intérêt, au risque de se perdre, à nouveau.

Point de ralliement dans ce vaste espace pour tout participant français, le stand French Tech est quant à lui présent sur toute la durée du salon. Il marque, une fois de plus, physiquement en tout cas, la présence française, le volontarisme public dans le domaine et symbolise le dynamisme de l’écosystème français, représenté par de nombreuses start-ups. Et c’est là l’un des paradoxes de ce type d’événement : rencontrer à Lisbonne des start-ups… françaises !

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Le paradoxe d’un événement déconnecté ?

Il ne s’agit pas de critiquer ici une connexion wifi aléatoire dans l’enceinte du salon. D’ailleurs, celle-ci n’empêchait pas les participants d’être souvent plongés dans leur smartphone et leur application Web Summit dédiée.

En revanche, le Web Summit a beau se féliciter d’avoir impulsé une démarche « Women in Tech » et d’avoir compté près de la moitié de participantes (42% précisément), la représentation féminine dans le cadre des conférences était bien inférieure, de nombreux panels étant même uniquement masculin. Un décalage d’autant plus regrettable que l’univers start-up sur place semblait effectivement plus mixte, une situation encouragée par des tarifs préférentiels proposés par les organisateurs.

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Autre décalage au Web Summit : si l’on se fie aux mines déconfites mercredi 9 novembre et aux propos tenus par les intervenants, l’univers tech ne vote clairement pas républicain et surtout se désolidarise complètement du vote d’une partie des citoyens américains en faveur de Donald Trump.

Comme le rappelle Les Échos, « en ouverture de la journée, l’organisateur du Web Summit Paddy Cosgrave a même appelé les spectateurs de la gigantesque scène centrale à allumer la lampe torche de leur téléphone portable. « Une ère incertaine est en train de s’ouvrir, une ère des ténèbres. Faites de la lumière pour lutter contre cette ère des ténèbres », s’est-il exclamé au micro. »

Un affichage et des postures qui ne proposaient finalement que peu d’analyse sur ce vote et ses raisons, et qui pourraient interroger sur la capacité de l’univers des nouvelles technologies à être en phase avec une partie de ses utilisateurs. Inversement, celles-ci pourraient aussi apporter une réponse aux enjeux qui traversent nos sociétés, avec leur capacité à créer du lien et à faciliter la circulation des informations.

Les tendances : storytelling, engagement, intelligence artificielle et sport

Les problématiques des médias ne sont que peu au cœur du Web Summit : elles sont d’ailleurs davantage traitées dans les conférences que prises en compte par les start-ups présentes sur place. Au cours de la première journée tout particulièrement, le sport était le secteur star du Web Summit. Une zone entière de l’un des pavillons était consacrée à ce secteur, avec une scène de conférences, des stands de start-ups proposant des innovations dans la pratique du sport, des animations ou encore le stand de la Ligue professionnelle de football espagnole.

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Le clou du spectacle était assuré par la présence sur la scène principale du « Centre stage » de plusieurs vedettes du ballon rond (Ronaldinho, Luis Figo, Louis Saha…) qui assurèrent le show et firent vibrer l’assistance présente, pas loin de l’hystérie !

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Concernant l’univers des médias, la VR se retrouve bien sûr au cœur des sujets et des propositions. Le terme « réalité virtuelle », plutôt attaché à la technologie, est progressivement remplacé par le concept de « storytelling » qui doit s’imposer aux médias. On constate là un retour aux sources, un retour aux contenus, les supports et les technologies étant au service d’une histoire à raconter, de contenus à mettre en valeur pour toucher le public de la manière la plus appropriée possible.

Ce storytelling comme la mise en valeur des contenus doivent favoriser l’engagement des publics, c’est là encore l’un des buzz words de ce salon. Les médias doivent proposer des expériences au public, et des expériences adaptées en fonction de leur lieu de distribution. La mise en scène du débat entre Gregory Gittrich (CCO de Mashable) et Tom Dotan (journaliste de The Information) sur le risque des marques à diluer leur valeur en assurant leur présence sur les réseaux sociaux ne trompent personne : tous les participants sont conscients des risques, mais voient finalement dans les réseaux des opportunités de business et de toucher des publics variés dès lors que les offres sont adaptées et spécifiques aux plateformes.

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Enfin, l’intelligence artificielle occupait une place de choix au Web Summit, comme le démontrait la présence de nombreuses start-ups dans le champ des chatbots, cet outil supposé réunir à termes l’univers des applications et du web mobile dans une logique d’interaction plus poussée. L’une d’entre elles, It’s Alive, proposait même de découvrir l’ensemble des start-ups présentes avec le « Web Summit Bot », toujours disponible sur Messenger.

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Au final, que retenir de cette édition du Web Summit ?

Il s’agit bel et bien de l’un des plus grands événements européens des nouvelles technologies et la bataille des chiffres prouve toute la compétition qui existe entre les capitales européennes pour attirer ce type d’événements et tenter d’en faire l’équivalent d’un CES ou d’un South by Southwest. Ce gigantisme se fait parfois au détriment du fond et des start-ups elles-mêmes qui apparaissent comme jetables.

Il existe au Web Summit un vrai dynamisme, une énergie entièrement tournée vers le business et de futurs partenariats, dans un univers peut-être trop centré sur lui-même, pas assez ouvert vers la société, qui oublie la valeur à apporter à celle-ci, aux citoyens, aux entreprises. Mais ce sentiment n’est peut-être que l’effet de la saudade qui m’a saisi à mon départ de Lisbonne…

 

Comment parler à la génération #NoBullshit ? 7 conseils

Pourquoi la plupart des dirigeants de médias font-ils comme s’ils n’avaient pas d’ados à la maison ?

Demandez-leur donc si leurs enfants regardent la télé, écoutent la radio, lisent un journal, parcourent un magazine.

La réponse est quasi toujours la même : « Heu… non ! Ils sont sur YouTube, Facebook, Snapchat, Instagram, Netflix, Spotify … ou un jeu vidéo », via smart phone ou ordi.

Et pourtant ces dirigeants — qui savent bien que leur monde change très vite – semblent continuer de privilégier leur audience vieillissante aux usages déclinants, en négligeant la génération montante, celle qui s’apprête à prendre les commandes, celle qui est déjà là.

Comme si une petite voix intérieure cynique, l’emportant sur l’indispensable lucidité, leur disait : « ça tiendra bien jusqu’à ma retraite ! ».

L’indispensable lucidité leur soufflerait pourtant que ces jeunes ne reproduiront bien sûr pas leur manière de s’informer, se divertir, se cultiver, tant profonde est la mutation actuelle de la société, tirée par la technologie. Elle leur indiquerait aussi que leurs personnels n’ont pas vocation à travailler dans l’accompagnement de fin de vie.

Alors comment cet étrange aveuglement peut-il persister plus de 20 ans après l’arrivée du web et 10 ans après celle de l’iPhone ?

Réflexe de repli sur le cœur de métier ? De défense personnelle liée à la fracture numérique ? Déni de réalité face au monde tel qu’il est ? Face à la rapidité des bouleversements ? Incapacité à imaginer des contenus modernes pour renouer avec ces nouvelles générations, à proposer des modèles d’affaires pertinents, à favoriser des écosystèmes générant création et innovation ? Difficulté à saisir le passage d’un monde de ressources rares et régulées à un monde d’abondance sans frontière ?

Une absence de vista qui encourage aussi les écoles de journalisme à continuer, hélas, d’éduquer des jeunes toujours formatés au tamis des débouchés classiques : presse écrite, TV, radio (et désormais web).

Bagarre d’anciens contre modernes ? Même pas. Ces jeunes ne se battent pas contre le vieux monde. Pas la peine ! Ils sont en train de le ringardiser. Ils ne sont pas en mode rejet, mais en mode projet.

Tenez, en France, près de la moitié des parents s’estiment aujourd’hui incapables d’effectuer le travail de leurs enfants, selon une étude de LinkedIn montrant aussi qu’ils méconnaissent tout simplement certains des principaux métiers actuels.

La vérité, avouent la plupart des responsables de médias dans le monde, c’est que c’est justement cette déconnexion avec les jeunes qui les réveille au milieu de la nuit.

Contrairement à eux, les milléniaux n’ont pas à s’adapter au numérique : ils n’ont jamais connu la vie sans Internet. Or les responsables médias eux doivent avancer, de manière très inconfortable, sur deux montures à la fois : le format historique qui décline, et le numérique qui, non seulement s’impose, mais continue de muter à grande vitesse, au fil des changements d’écran.

En 2017, la publicité digitale dépassera celle de la TV. D’ores et déjà les 18-35 ans sont devenus la priorité des annonceurs alors que la moyenne d’âge des chaînes de télévisions est en train de dépasser 60 ans. Aux Etats-Unis, la moitié de l’audience de Fox News a plus de 68 ans, essentiellement des hommes blancs dans des maisons de retraite.

Pas facile de répondre en même temps aux aspirations d’une génération qui porte le monde dans sa poche, qui a la planète au bout des doigts, qui consomme ses contenus quand elle le souhaite et où elle le souhaite. En marche depuis quelques années, la tendance mobile et sociale n’est pas prête de s’évanouir. L’an dernier la majorité des éditeurs ont déjà vu l’essentiel de leur trafic en ligne basculer pour provenir de terminaux mobiles.

Tunnels de pubs, audiences mesurées par panel, « carpet bombing » de contenus identiques déversés à heure fixe pour tous, bouquet onéreux de chaînes payantes : comment voulez-vous que les jeunes du 21ème siècle numérique, sollicités de toutes parts, se retrouvent dans un paysage TV caduque qui a si peu bougé depuis des décennies ?

“Les baby boomers ont étranglé le monde des médias et de la publicité pendant toute une génération (…) Leur étau est finalement brisé par une génération très éduquée, diverse ethniquement, difficile à atteindre, et qui pense mondialement. Les médias ont du mal à s’adapter à ce changement rapide », a résumé fin août le patron de Vice Media, Shane Smith, à Edimbourg.

Comment alors rester pertinent et attrayant ? Quelles sont les clés de l’engagement et de la connexion émotionnelle ? Est-ce donc si difficile de produire des choses qui intéressent cette génération à la demande, puis de les livrer là où ils vivent ? Nous allons voir que ce n’est pas si simple, mais qu’il y a des pistes.

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QUI SONT-ILS ?

Ils ont entre 18 et 35 ans.

Aux Etats-Unis, les milléniaux sont devenus majoritaires. Avec 80 millions de personnes ils représentent désormais une catégorie ethniquement et racialement très diverse de la population.

Volontiers audacieux, optimistes, pragmatiques, dotés d’une forte capacité d’étonnement, d’émerveillement, d’altruisme (réfugiés, figures du pape François et du Dalai Lama), voire de bienveillance (allocation universelle), ils sont avant tout soucieux d’authenticité et de transparence, de plus en plus difficile à simuler.

Une attitude souvent résumée par les hashtags #nobullshit et #nofilter.

Assurant renifler le « fake » à 100 mètres, ces fans de culture urbaine aiment aussi la surprise, la découverte et sont très « orientés monde ».

Baby-boomers sur la sellette

Les milléniaux ne sont pas l’avenir de notre société, ils en sont déjà les principaux acteurs.

En Amérique du Nord, ils ont élu Barack Obama et Justin Trudeau. Et n’auraient pas élu Trump.

(La carte du collège électoral US si les milléniaux avaient voté)
(La carte du collège électoral US si les milléniaux avaient voté)

Ils représentent la plus vaste génération dans l’histoire de la population active américaine. Dans les grandes villes d’Asie et d’Afrique, où ils sont brutalement majoritaires et totalement connectés, leurs habitudes numériques se propagent dans le reste de la population. Sur le vieux continent, c’est une jeunesse qui se sent profondément européenne, même au Royaume Uni. En France, ils déplorent un pays « champion du déclassement de la jeune génération ».

Pour eux, ceux qui sont nés avant 1982 appartiennent à l’histoire.

Ils sont en opposition avec l’héritage politique laissé par les baby-boomers qui ne leur laissent pas un monde très folichon et dont les choix sont remis en cause. A commencer par l’héritage du Brexit, de l’arrivée de Trump, en passant par les terribles legs environnementaux, de la dette, du chômage, de l’injustice sociale, de l’écart des revenus, des discriminations sexuelles et raciales. Et in fine — et pour la première fois– la perspective de futures générations moins bien loties que leurs aînées.

Ils rejettent l’ordre établi, les vieux modèles, les corps intermédiaires jugés dépassés, bidons.

Soucieux de leur impact sur le monde, ils s’engagent volontiers, croient dans l’intelligence collective, prennent au sérieux les mouvements citoyens, n’hésitent pas à transgresser (parti Pirate en Islande) et à défier (parlement de Hong Kong).

Leur enthousiasme n’est pas uni-générationnel : Bernie Sanders, nouvelle rock star, et Alain Juppé, ont dépassé les 70 ans !

Co-working, co-locs, co-voiturages

Mais même s’ils ont la fibre entrepreneur, ils croient de moins en moins dans les vieux logiciels économiques qui ont fait marcher les pays ces 40 dernières années.

Dans un monde digitalisé et dématérialisé, les attentes des jeunes envers le monde du travail et de l’entreprise ont changé.

Ils n’attendent pas de travailler dans des bureaux prestigieux en dur et à proximité de leurs collègues. En quête de sens pour leur activité professionnelle, aligné sur leurs valeurs et leurs aspirations, ils n’entrent plus pour faire carrière, mais pour participer à un projet et changent de jobs -tous les trois ans en moyenne- pour avoir plus d’expériences dans leurs vies. La quasi-totalité d’entre eux veut choisir son métier par passion et non par raison, quitte à conserver des boulots alimentaires à côté.

D’ici 2020, les milléniaux représenteront un tiers de la population active. Ils changent donc déjà l‘entreprise et imposent leurs codes.

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Mais les entreprises ont du mal à faire face aux nouveaux besoins.

L’essentiel, pour ces jeunes, n’est ni dans l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle, ni dans la souplesse demandée à l’employeur, ni dans un emploi du temps flexible. Mais dans le sens qu’ils trouveront dans la mission. Ils ne comptent alors pas leurs heures. Ils souhaitent vivre où ils veulent, travailler depuis n’importe où, aller et venir comme bon leur semble.

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A la recherche d’une culture d’entreprise « fun & serious », ils privilégient l’éthique, la confiance, l’intégrité et l’honnêteté. Et ils veulent avant tout apprendre quelque chose de nouveau. Avant le salaire, et préférant l’empathie à l’autorité, ils réclament un mode de management plus engageant et respectueux, voire un leadership partagé.

Créatifs, collaboratifs, ils ont plaisir à travailler ensemble, mais pas forcément au même endroit, à partager un open space, mais pas forcément avec ses collègues. Un casque et de la musique dans les oreilles ; le travail étant devenu aussi un style de vie.

Ce sont de plus en plus souvent des « slashers », ceux qui ont plusieurs activités en même temps. Et celui qui n’a pas de profil LinkedIn ou un compte Github n’existe pas, ou n’est pas légitime pour postuler.

Posséder son appartement ou son automobile n’est plus un signe de réussite. Moins propriétaires, ils louent. Et souvent partagent. Plus qu’une voiture, ils veulent un accès à un mode de transport. L’industrie vestimentaire est aussi victime de leurs nouveaux arbitrages vers le restaurant ou les voyages.

Leur succès est mesuré désormais dans les expériences : monter sa start-up, bourlinguer, pratiquer des sports extrêmes. Ils travaillent avant tout pour s’offrir la découverte du monde. Aujourd’hui, leurs parents fument plus d’herbe qu’eux !

La techno pilote leur culture

Digital natifs, ces jeunes font de la technologie un mode de vie. Ils ont confiance en elle et en attendent beaucoup, notamment quand Internet et le numérique leur donnent plus de contrôle sur leur vie.

Toujours connectés, accros à leurs smart phones, ils passent plus de 30 heures par mois sur les réseaux sociaux et ont plus d’interactions via leur mobile que physiquement.

Les marques les plus pertinentes pour les milléniaux américains sont d’ailleurs toutes technologiques : Amazon, Apple, Android, Netflix, Google et Samsung.

Génération d’« early adopters », ils sont sensibles « au mieux et moins cher », « au good enough is perfect » des géants du web et aspirent souvent à travailler pour eux. Ceux qui réussissent le mieux ont d’ailleurs un bagage technologique.

Ils privilégient un enseignement en mode projet qui vient du monde des start-ups.

Les changements liés aux usages vont parfois tellement vite que des jeunes de 25 à 30 ans avouent ne pas parler le même langage que leur jeunes frère ou sœur de 18 !

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La télé vous parle d’un temps que les moins de 20 ans …

Cette révolution en cours dans la manière d’apprendre, de se socialiser, de travailler, s’étend bien évidemment aux nouveaux usages dans la manière de s’informer, se cultiver et se divertir. En d’autres termes, les jeunes dictent aussi – ô combien désormais – leurs nouvelles lois aux médias.

Une consommation de médias qui segmente aussi la société en réalités parallèles, y compris pour les milléniaux : celles de Fox News vs. MSNBC, de Facebook vs. Twitter.

Une génération aussi qui en consomme le plus : plus de 6 heures par jour ! Elle a gros appétit mais peu de patience. Et surtout, elle abandonne les médias traditionnels, dans leur forme historique, dont la télévision.

Le temps dédié à la TV des jeunes Américains s’est effondré de 40% en 5 ans, soit une baisse de plus de 9 heures par semaine, ou près d’une heure et demi par jour, désormais consacrées à d’autres activités. Reste un peu de téléréalité, un peu de sport et de l’info.

En un an, les 18-24 ans américains ont diminué leur consommation hebdomadaire de TV de plus de 2 heures, selon Nielsen.

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La rentrée 2016 de la TV américaine fut sombre, même pour le football US. Les chaînes de TV payante subissent une hémorragie : -620.000 abonnés pour le seul mois d’octobre pour ESPN, chaîne sportive vedette de Disney. Pour la première fois cette année, YouTube a dépassé les chaînes du câble US en temps passé.

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Les milléniaux étaient ainsi à 86% plus susceptibles de se tourner vers Internet que vers la TV pour apprendre ce que les autres pensaient du débat présidentiel américain, selon un sondage Ipsos pour Google.

En France aussi, la fuite de la télé des adolescents s’est accélérée à la rentrée 2016. Aux Etats-Unis, les jeunes adultes boudent le câble pour privilégier les plateformes de streaming, qui répondent mieux à leurs attentes. D’après les derniers chiffres de Médiamétrie, les jeunes Français passent une heure et demi moins de temps devant la TV que la moyenne de la population. Le temps télé des jeunes britanniques se fait déjà à 20% en différé. Des audiences qui sont à 20% au moins non pas en linéaire mais en ligne comme Love Island de la chaîne ITV.

Même le sport est touché : lors des derniers JO de Rio, l’audience TV des moins de 50 ans a plongé de 25%. Et le phénomène est mondial. Aux US, l’âge moyen des téléspectateurs de football américain et de baseball a grimpé respectivement de 4 et 7 années, durant la décennie écoulée, pour atteindre 47 et 53 ans !

Deloitte
Deloitte

C’est une génération qui a grandi avec Netflix et Youtube et non avec MTV et Canal+.

Sans surprise, leurs goûts vont avant tout vers la musique et la comédie.

Mais leurs passions portent aussi sur des sujets sérieux d’informations : l’environnement, les droits civiques, la justice sociale, l’inégalité des revenus, les droits des minorités, la cyber-sécurité… Ils peuvent ainsi regarder des documentaires de 10 heures sur Netflix.

Et Netflix arrive d’ailleurs largement en tête de leur consommation vidéo :

Piper Jaffray
Piper Jaffray

YouTube de son côté touche plus de 18-49 ans que n’importe quelle chaîne de télévision aux US. Ses budgets pour des séries originales sont désormais les mêmes que pour des chaînes du câble, et, pour les films, équivalents à ceux au cinéma indépendant. Après Los Angeles, la filiale de Google a ouvert des studios de production à Londres, Paris, Tokyo, Bombay et Sydney.

De la programmation à la curation : pour trouver le bon contenu, les milléniaux se reposent très fortement sur les conseils émanant de leurs réseaux sociaux dans une nouvelle société de la recommandation. Le pouvoir passe ainsi des directeurs de programmes qui décidaient tout à une curation faite par des tiers, voire par des machines (algorithmes). Un tri décentralisé où des individus agrègent des communautés, où d’autres remixent des contenus. Avec le danger de rester enfermés dans ses propres goûts et intérêts, et d’être surpris quand ceux qui ne sont pas dans leur cercle d’amis votent pour l’autre côté…

L’info reste très importante

Sous de nombreuses formes, à tout moment, sur de multiples canaux, l’info fait bien partie du régime média des jeunes, surtout si elle est sociale et fun. Mais à l’âge de l’info distribuée (Snapchat, Instant Articles de Facebook, Instagram, AMP de Google) si l’actu n’est pas dans leur « newsfeed », c’est qu’elle n’est pas importante. Si ce n’est pas important, pourquoi aller voir ?

Ils attendent donc que l’info passe sur leur flux social et leur mobile. Les réseaux sociaux viennent ainsi de ravir la 1ère place comme source d’infos pour les 18-24 ans dans le monde. Les acteurs les plus récents dans l’informations l’ont bien compris et adoptent un modèle de médias distribués sur d’autres plateformes : AJ+, NowThis, BuzzFeed, Melty, etc.. L’info par le jeu (newsgames) se développe aussi.

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Avec son tempérament exalté et brut de décoffrage, Vice, qui entend être « tout à la fois MTV, CNN et ESPN », mais aussi « le Time Warner de la rue », vient de lancer son journal TV sur HBO destiné aux milléniaux et à bouleverser l’info télé. Pas de présentateur, ni de gros titres sur Vice News mais de la musique, des sujets « in your face » décalés, dans l’air du temps, en sur-jouant l’authenticité.

Enfin les jeunes sont aussi acteurs de leur info : avec leur propre smart phone, ils parviennent à forcer la conversation sur des crimes filmés en direct lors d’incidents ou de manifestations.

Tri algorithmique préféré au choix d’une rédaction ?

Les jeunes s’informent avant tout sur Facebook. Et de plus en plus souvent préfèrent que des algorithmes – jugés plus démocratiques – choisissent pour eux les infos plutôt qu’un éditeur en raison de leur supposée absence d’agenda politique, de la variété de leurs sources et de leur capacité à personnaliser l’offre. Des jeunes qui se voient aussi de plus en plus comme éditeurs de leur propre flux d’actualités et qui souvent préfèrent le texte pour être informés.

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Après le journalisme mobile, on commence à parler aussi de nouveaux formats : drone-journalism, le journalisme VR, journalisme snap, et même de glance journalism (pour les notifications sur wearables ou smart phone).

Mais de grosses différences subsistent parmi ces milléniaux : les plus aisés d’entre eux ont un penchant plus marqué pour des contenus plus internationaux, plus sensibles aux problèmes environnementaux et aux marques qui redonnent quelque chose à la société. Ces jeunes-là, plus diplômés, n’hésitent pas à aller directement sur les versions en anglais et veulent désormais leurs propres contenus sur la TV de l’hôtel !

Leurs médias sont des réseaux sociaux : Snapchat, Instagram…

Illustration by Tim Enthoven (NYT Magazine)
Illustration by Tim Enthoven (NYT Magazine)

Illustration by Tim Enthoven (NYT Magazine)

 Leurs médias obéissent à trois règles simples : 

  1. Ils proposent des contenus qui les intéressent
  2. Ils sont forcément mobiles (donc disponibles partout), sociaux (pour le partage) et contiennent beaucoup de vidéos.
  3. Leur staff est le reflet de leur audience, et leur audience est le reflet de leur staff.

L’âge moyen des milléniaux est de 26 ans. C’est aussi l’âge moyen des employés de Facebook, Mic, Vice ou AJ+.

Leur porte d’entrée du web, n’est plus Google mais Snapchat, Instagram ou Facebook, qui sont en train de gagner la bataille de l’attention. D’ailleurs pour de nombreux jeunes, Facebook EST l’Internet, et non plus seulement une plateforme. C’est aussi le live de tous pour tous !

C’est toutefois une audience à durée d’attention réduite, qui regarde son smart phone de manière verticale, qui filme en mode portrait, qui pratique le « news snacking », la consommation de nombreuses vidéos d’informations courtes et partageables. Si le snacking est de mise, le temps total s’allonge : la durée moyenne d’une session sur Facebook est supérieure à 30 minutes (contre moins de 3 mn pour un journal) et sur YouTube chacune dure désormais plus de 40 minutes, soit 50% de plus que l’an dernier.

Leurs codes incluent photos, mini-vidéos, emojis, gifs, infographies, où le sérieux et l’absurde coexistent sur le même écran.

Les messageries instantanées dominent et sont les nouvelles plateformes de partage de photos et vidéos. A l’ère du tout visuel, cette génération consomme par l’image d’où le triomphe des « visual story tellers ». La caméra du smart phone est le point central de leur vie en ligne.

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Destination vedette de la génération mobile-first, Snapchat, appli de messagerie instantanée, de selfies, et de partage de photos et vidéos souvent remixées, entend, comme Facebook, prendre la place de la TV – et lui piquer les milliards de la pub- avec ses contenus vidéos originaux qui incluent aussi bien les breaking news que des séries de 6 à 8 minutes, des comédies, ou des shows de télé-réalité.

L’application est aussi encore pour l’instant un refuge « pour jeunes » face à un Facebook envahi par les parents et grands-parents !

Pour Melty, l’innovante Snapchat, « kiosque des temps modernes » est « une plateforme préfigurant la TV de demain ».

Snapchat produit et commande aussi désormais ses propres séries aux studios et aux talents professionnels. Elle embarque des programmes courts des plus grandes chaînes de télévision. Pour ses fameux Video Music Awards annuel, la chaîne MTV a vu son audience TV plonger de plus de 30% tandis que son trafic explosait de plus de 75% sur Snapchat où son audience fut trois plus importante qu’à la télé.

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L’information y devient un domaine important avec des mini-reportages de Syrie en coopération avec des médias ou avec l’ONU, ou en reprenant des snaps venant du monde entier. Les universités britanniques ont aussi désormais recours à Snapchat pour communiquer avec leurs étudiants.

Pour courir après les jeunes, même Facebook et ses filiales Instagram et WhatsApp en viennent à copier les meilleures fonctions de Snapchat !

Leurs plateformes d’aujourd’hui : jeux vidéo, e-sport, live-streaming

De nouveaux acteurs rassemblant des milliers de chaînes YouTube sont aussi apparus ces dernières années. Ainsi Machinima et ses près de 4 milliards de vidéos vues chaque mois avec des contenus jeunes et de l’e-sport, nouveau graal de l’entertainment.

Vécus de plus en plus comme des expériences « live » pratiquées entre milliers de joueurs disséminés dans les quatre coins du monde, les jeux vidéos ne sont plus seulement ludiques, mais des espaces de fantaisie où les genres vont se multiplier, où certains se révèlent en animateurs et réalisateurs qui divertissent des millions de spectateurs sur leurs chaînes Twitch.

Les nouvelles plateformes : VR, AR, bots….

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Cette période est aussi celle des changements technologiques à très grande vitesse. Au moins deux fois plus vite que la télé qui a volontairement fait l’autruche ! Il ne suffira pas de s’adapter au mobile et aux réseaux sociaux. Demain arrivent les nouvelles interfaces conversationnelles, les bots, l’intelligence artificielle, les équipementiers mobiles de 5ème génération, la 4K et la 8K, les réalités altérées (VR/AR)…

La VR ne va pas seulement nous permettre d’aller n’importe où et dans n’importe quelle époque, mais aussi de partager des expériences avec n’importe qui dans le monde. Des machines à rêves forcement pertinentes dans l’éducation et les loisirs. Et déjà bien présentes dans les jeux vidéo.

La folie mondiale Pokémon Go de l’été dernier a montré l’invraisemblable appétit mondial pour ces formats encore plus disruptifs, qui ne se jouent plus dans le salon mais partout dans la ville.

Dans quelques années, les médias s’inscriront dans une nouvelle ère informatique où règnera la réalité augmentée, dopée à l’intelligence artificielle, activée par voix et geste, où les contenus et les œuvres seront autour de nous et viendront à nous. La course aux armements dans la Silicon Valley pour lancer des labos d’AI bat son plein.

En attendant ces nouvelles interfaces hommes-machines, les technos immersives de l’image (4 et 8K) en 360° et bientôt en connexion ultra rapide 5 G feront partie de la nouvelle donne.

Une chose est sûre : nos enfants vont grandir avec ces nouvelles interfaces.

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Alors quid des efforts des vieux médias ?

Bien sûr les médias historiques adoptent les nouvelles plateformes pour être présents là où les jeunes adultes consomment et partagent l’information. Les deux tiers des téléspectateurs sur d’autres écrans que la TV ont moins de 35 ans.

Après le web et les mobiles, les vieux médias sont aussi – pour la plupart – présents sur les grands réseaux sociaux où l’audience est plus jeune que celle du web. L’utilisation de Twitter, YouTube, Facebook et même récemment Snapchat, y est désormais quasi de rigueur.

Les professionnels reconnaissent la nécessité d’experts et d’équipes dédiées pour se familiariser avec tous ces nouveaux outils. Ils créent des postes d’éditeurs mobiles, montent des studios d’innovations mobiles, des équipes plateformes.

Les groupes de télévision sont en train de lancer avec succès une seconde vague de programmes natifs dédiés « Social TV », sous formats mobiles et sociaux. Notamment via encore Snapchat.

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Exemples :

CNN se déclare ainsi éditeur social mondial 24/7 (Facebook, Twitter, Snapchat et Instagram), et a choisi le bot de Kik pour s’adresser aux 13-17 ans. La chaîne américaine a débauché une bonne partie du service politique de BuzzFeed à quelques semaines de l’élection présidentielle.

Sur Snapchat, National Geographic a montré la rentabilité d’un modèle qui attire les annonceurs et permet beaucoup de créativité pour les producteurs. La TV publique américaine PBS y fait aussi des séries. En France, elle attire depuis peu de nombreux éditeurs, anciens et modernes.

Pour récupérer les screenagers sur leurs mobiles, MTV, jugée aujourd’hui ringarde, lance des shows sur Snapchat avant de les diffuser à la télévision. Al Jazeera a fermé cette année ses activités TV aux Etats-Unis, mais y a renforcé ses activités multiplateformes en ligne très florissantes sous le label AJ+.

En Suisse romande, la RTS a installé à côté de son JT du soir une émission « Nouvo » qui produit désormais des vidéos courtes uniquement pour les réseaux sociaux. HBO, aux Etats-Unis, propose désormais chaque soir un JT de 30 mn fait par Vice Media et chaque dimanche soir l’excellent programme Last Week Tonight de John Oliver.

Les télévisions publiques allemandes ZDF et ARD se sont associées pour créer « funk » une chaîne « jeunes » en ligne. La BBC a fait passer la sienne également en numérique et a doublé sa présence sur YouTube en six mois. Elle a aussi utilisé la plateforme Yik Yak pour parler aux jeunes britanniques du Brexit et produit des séries destinées aux mobile comme « Mission Selfie ».

L’audiovisuel public canadien vient d’ouvrir un labo jeunesse dit « Prochaine Génération », espace de création créé et géré par des milléniaux. La TV publique finlandaise Yle a aussi son espace Kioski, l’américaine PBS fait un spin-off en ligne d’un de ses plus importants formats jeunesse.

La radio publique américaine NPR conserve aussi un socle solide de jeunes qu’elle accompagne notamment avec ses podcasts très populaires et une nouvelle appli très personnalisée NPR One.

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Même tendance pour les médias locaux. Des journalistes du quotidien Sarasota Herald Tribune passent du temps à remixer leurs articles pour les millenials locaux dans un site à part, Unravel. D’autres grandes villes américaines s’y mettent aussi, comme Philadelphie ou Pittsburgh, avec Billy Penn. Le Denver Post a lancé avec succès une section dédiée à l’industrie de la marijuana, The Cannibalist.

Le Monde en France propose Les Décodeurs. Même Le Figaro arrive à communiquer avec les jeunes via Snapchat. En France, TMC a repris Yann Barthes avec le Quotidien, une nouvelle plateforme d’infos vidéos se lance : Brut pour le journalisme de rue. L’audiovisuel public français se regroupe derrière une nouvelle offre plus moderne, Franceinfo: devenue le 4ème site d’infos.

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Le jeunisme passe aussi par les rachats ou les prises de participation.

Pour suivre les jeunes dans leur migration, l’autre voie choisie par les médias historiques est de racheter ou d’investir dans leurs médias : Murdoch, qui s’est brûlé les doigts sur MySpace, a pris 5% de Vice, Disney près de 20%, Comcast/NBC/Universal a investi dans Vox et BuzzFeed, Time Warner dans Mashable et Refinery29, pour leur expertise « jeunes », celle qui sait comment viraliser une histoire et la calibrer pour les mobiles.

Pour séduire les jeunes, le groupe américain de presse et de TV locales Scripps a racheté le site de vidéos Newsy. Turner Broadcasting s’est emparé du site sportif Bleacher Report. Le groupe de TV hispanique Univision a racheté Gawker après The Onion.

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Les médias s’associent aux influenceurs

Quelques médias commencent également à comprendre l’influence des stars de YouTube ou Snapchat et les font travailler pour eux. Ces joint ventures sont tout profit pour les « anciens » : ils profitent des millions de fans des influenceurs et rajeunissent leur marque. Les médias anciens, avec leur capacité d’analyser et d’expliquer le monde, peuvent, de leur côté, apporter du contenu avec des points de vues complets et objectifs aux YouTubers, qui sera diffusé sous un nouveau format, adapté aux jeunes.

Nouvel eldorado : l’e-sport

La génération des milléniaux a aussi grandi avec les jeux vidéo, désormais deuxième pratique culturelle en France derrière la lecture et longtemps délaissée, voire méprisée, par les grands médias. Après plusieurs années de déni, les télévisions se mettent progressivement à diffuser l’e-sport dont les compétitions n’ont rien à envier aux plus grandes rencontres sportives en termes d’audience ou d’émotions.

QUE FAIRE DE PLUS ? 7 CONSEILS

1D’abord comprendre ce qu’ils veulent

La génération « No Bullshit » rejette « la voix de Dieu », celle du présentateur en surplomb qui dit en substance : je parle, vous écoutez. Ils sont déjà au courant ! Ils ont suivi de près ou de loin l’actu toute la journée. Ils veulent juste qu’on leur montre que le monde change et ce que cela signifie.Leur journalisme est sans maquillage, sans pseudo-experts cyniques, sans blabla. Il s’en tient aux faits, aux images, et au décryptage rapide et smart, qui ne cherche pas la petite phrase.

Ils ont probablement l’un des meilleurs détecteurs de « b/s » de l’histoire. Même si, comme tout le monde, ils se font piéger par des arnaques.

Mais ce qui compte, à leurs yeux, c’est, une fois encore, l’authenticité, la mise à nu, l’autodérision, la vulnérabilité. Pas les paillettes. Ils veulent souvent une info désintermédiée, entendre l’info de la bouche de ceux qui la vivent, pas du contenu racoleur qui cherche à faire du clic. Les filtres sont bienvenus s’ils sont pertinents.

Ils ne supportent plus l’intrusion publicitaire, voire le gavage qui fonctionne avec des concepts de matraquage qui n’ont pas évolué depuis l’après-guerre.

C’est une génération mobile first qui prend le numérique comme un mode de vie culturel.

2« Place aux jeunes ! » Les impliquer, leur donner les clés

Cette génération nous dit en gros : faites-moi réfléchir, faites-moi rire et donnez-moi la parole !

Elle entend faire partie de la solution, être un partenaire et non juste une cible marketing.

Ces jeunes veulent autant créer que consommer. Ils sont d’accord pour faire confiance, mais souhaitent aussi s’exprimer, avoir voix au chapitre.
Il faut les intégrer dans la fabrique, leur ouvrir un espace de co-création et de co-production. L’intégration de leurs contenus se fait d’autant plus facilement désormais que s’améliore la qualité générale des vidéos, de la bande passante et des technos mobiles ainsi que des logiciels de traitement de l’image.

Mais ce n’est pas suffisant. Les médias doivent aussi rafraîchir la culture de l’organisation et la rendre plus diverse. En modifier l’ADN.

Trop souvent ce sont les fils et filles de riches qui travaillent dans les médias.

Il faut renouveler le recrutement. Leur staff doit mieux refléter la communauté qu’elle sert. Après les vidéos de chatons, BuzzFeed France a décollé avec des sujets plus fouillés et en recrutant des journalistes jeunes et plus représentatifs de la diversité ethnique de la société que les médias traditionnels.

Mais aussi du côté de la technique. Il faut que ça marche ! Le média ne peut être en retard sur le reste de la société, qui jongle avec le numérique.

Le média doit donc surtout refléter son audience, ultra connectée, tournée vers les réseaux sociaux. Et savoir garder ses talents.

Certaines entreprises n’hésitent pas à créer des « shadow comex », comités de direction parallèle composés uniquement de milléniaux qui ont au moins un pouvoir consultatif. Des médias faits par les jeunes pour les jeunes.

3Apprendre d’eux et de leurs médias

Il ne sert plus à grand-chose d’opposer médias et pure players. Qu’on le veuille ou non, les médias sont aujourd’hui désintermédiés par ceux qui les distribuent. Il est évidemment sidérant de voir les nouvelles plateformes des jeunes, Facebook, Snapchat, YouTube et autres ne pas hésiter à démarcher les vieux acteurs, TV en premier, pour leur demander leurs contenus, avant de les engloutir ! Mais ont-ils le choix ?

Au moins peuvent-ils apprendre de leur agilité, rapidité, flexibilité.

La techno va vite : il faut soigner l’emballage, l’ergonomie, la forme. Optimiser les versions mobiles. Ceux qui ont fait les sites de la dernière décennie ne sont pas forcément les mêmes qui vont faire les applis de demain dont les fonctionnalités changeront toutes les trois semaines.

Apprendre à prendre des risques avec les idées, les talents, les technologies. Se donner le droit à l’erreur ou à l’essai, si on préfère. Expérimenter et réagir très vite, et être à l’aise à lâcher des versions non finies.

Etre à l’écoute intime de son audience, apprendre à attraper son attention dès les toutes premières secondes.

Apprendre aussi des jeunes et de leur culture.

Une culture du remix où ce qui est viral touche à l’émotion, l’injustice sociale, la simplicité, et l’humour.

Ne pas avoir peur de l’engagement, le favoriser en rendant les contenus partageable, répondre à toutes les conversations : permettre aux créateurs de se connecter facilement et rapidement avec leurs fans.

Enrichir les liens dans la société qui n’existeraient pas sans la télé, bâtir ensemble de la culture et de la compréhension face au monde qui vient. Mettre un peu d’ordre dans la confusion et la complexité nées des nouveaux changements permanents de contextes et de l’effacement des frontières entre les genres (vie réelle, vie numérique, réseaux sociaux, messageries, demain réalités altérées).

Pourquoi les jeunes, et les médias, sont-ils tellement surpris par le résultat du vote Trump, pourtant obtenu dans un processus démocratique ? A force de vivre dans leur bulle ils ont peut être oublié qu’il existe des populations qui ne pensent pas comme eux. Bercés par les algorithmes rassurants et communautaires de Facebook, ils négligent les différences et la multitude de points de vues. Le rôle des médias devrait justement être de remettre l’information dans un contexte, de rester objectif et de prendre en compte tous les opinions, sans filtre gauche ou droite. L’enjeu est de réconcilier deux générations, de faire comprendre la vision du monde des uns aux autres, mais dans les deux sens.A être toujours connectés, ils se sont déconnectés.

Permettre aussi aux jeunes de former les anciens et contribuer à accorder les générations dans l’entreprise et dans la société. La nouvelle fracture numérique n’est pas dans l’accès ou le prix, entre ceux qui ont ou pas les moyens d’accéder à Internet, mais entre ceux qui veulent y accéder ou pas ! Et le plus souvent ceux qui ne veulent pas sont les seniors ! Et, dans une moindre mesure, les ruraux et les non diplômés.

A noter aussi que souvent, dans le cocon familial, la manière de consommer les médias des enfants influence les parents, en particulier pour la télé, alors moins regardée. L’influence parentale restant claire quand il s’agit d’autres « vieux » médias : radio, journaux papier, cinéma, livres, CD.

4Renforcer la valeur ajoutée et la liberté dans les formats d’écriture

Le copier-coller de contenus ne marche pas dans le numérique. Ni dans un sens, ni dans l’autre. Même Vice, qui vise pourtant les jeunes, ne décolle pas quand il est diffusé sur le téléviseur.

Chaque plateforme a ses usages, et donc sa grammaire, ses codes, son ton.

Ici des vidéos partageables qui expliquent des choses complexes de manière brèves et convaincantes, là des formats plus longs, plus fouillés seront appréciés. Il faut offrir non seulement la consommation sur plusieurs écrans, mais aussi de nouveaux contenus exclusifs à l’acte, des capacités d’enregistrement et de remix sans difficulté, des abonnements ponctuels.

Contrairement aux idées reçues, les jeunes sont aussi prêts à ne pas considérer le web comme l’eldorado de la gratuité : 55% des milléniaux US paient déjà pour du divertissement en ligne, et ils sont déjà 40% à payer pour des services d’infos.

Mais attention le modèle de Netflix ou Hulu, appliqué à tout, n’est pas sûr de fonctionner pour des milléniaux dont l’engagement passe uniquement par le social.

5Améliorer leur expérience

Soigner l’accès aux contenus, et sa fluidité, est devenu déterminant dans l’expérience de jeunes à l’attention fragmentée et de courte durée.

Apprendre à mettre en scène des contenus fragmentés, aussi.

Par leur utilisation massive et leur efficacité, les services comme Spotify, Google, Facebook mettent la pression sur les médias historiques, incompétents en design interactif, en expérience utilisateur (UX), en ergonomie.

Les jeunes réclament une expérience totale. Un contenu contextualisé mais sans effort : que tout soit à leur portée, tout de suite, au moment même où ils visionnent.

Avec les formats 360°, de réalité virtuelle et augmentée, qui arrivent, les médias vont aussi devoir se mettre rapidement à apprendre à immerger l’utilisateur dans les contenus.

Les données et nouveaux outils de mesure deviennent clés dans la gestion des contenus, leur marketing et de plus en plus leur « découvrabilité ».

Ce sont d’ailleurs désormais les « analytics » qui donnent les indications du succès, de la « fan base ».

6Personnaliser leur expérience

Comment faire face aux géants du web si les médias historiques ne sont pas capables de personnaliser et de recommander leurs contenus ? Mais ils ont peur de la personnalisation car ils craignent une dissolution de leur personnalité dans le sur-mesure de masse.

Pourtant, segmenter son audience et adapter son offre à chaque plateforme est devenu clé. L’expertise va être de savoir quoi proposer à qui et où. Grâce aux data et à la segmentation, il sera possible d’offrir le bon format à la bonne personne au bon moment.

Les playlists de contenus à découvrir, de conseils de films et d’œuvres seront faits par des éditeurs, des professionnels des programmes, des experts reconnus, des amis et des machines.

Même la télévision est de moins en moins une activité familiale. Elle se consomme de plus en plus à la demande et de manière personnalisée sur tout écran et de nombreuses plateformes où il est crucial d’apparaître en haut du fil d’un réseau social, ou d’un mur de posts.

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Plutôt que vers des chaînes, les jeunes risquent de se tourner à l’avenir vers des plateformes intégrées verticalement qui offriront un catalogue profond et personnalisé de contenus et d’œuvres à la demande, sur le terminal de leur choix. D’autant que le vieux modèle de la TV payante s’effondre.

Les opérateurs télécoms, assis sur des montagnes de données, largement encore inexploitées, l’ont bien compris et ont repris leur marche vers la convergence pour combiner contenus, bande passante, accès, spectre,… Les grandes manœuvres battent leur plein, la consolidation est puissante : AT&T avale Time Warner (CNN, HBO, Warner Bro.) après Direct TV, Verizon a racheté NBC Universal, et leurs contenus pour les distribuer sur toutes les plateformes… Le prix des offres en bouquet chute, … En France Altice Media donne l’exemple. Même si ce mouvement ressemble plus à une tentative de regroupement défensif pour intermédiaires menacés.

Les grands acteurs traditionnels sont en train d’alléger leurs bouquets (le menu), d’offrir des choix (la carte) et baissent les prix. Car en ce moment ce ne sont plus eux les vrais distributeurs de la culture des jeunes, mais Netflix, YouTube, Facebook et consors. Essentiellement sur mobiles, d’ailleurs !

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Le nouveau modèle est désormais bien évidemment une consommation à la demande, à la carte, en différé. A leurs conditions donc et sur leur plateformes.

7Refonder le contrat de la publicité et du gratuit

Refusant de plus en plus l’intrusion des messages à caractère commercial, les jeunes, utilisateurs massifs d’ad-blockers, haïssent la pub. L’éviter leur est aussi important que de pouvoir regarder les programmes à la demande.

Ils entendent être acteurs de leur expérience publicitaire. Ils s’attendent aussi à ce que les marques sachent qui ils sont.

Face à une génération consciente de son pouvoir de négociation sur l’utilisation de ses données, et exigeant des services de plus en plus personnalisés, les marques feraient bien de tout faire pour utiliser au mieux les outils de mesure permettant d’affiner leurs propositions. Ces jeunes ne sont d’ailleurs pas hostiles au brand content, à la pub native, si le message porte leurs valeurs, ou si le format est innovant, comme sur Snapchat.

Mais la pub display a disparu, le spot de 30 secondes va mal et le programmatique a fait chuter les prix. Le financement de la TV des milléniaux n’est pas simple.

Pour capter leur attention, les marques doivent être pourtant au moins aussi intéressantes que les YouTubeurs et les influenceurs qui sont aujourd’hui leurs plus grands concurrents face à des milléniaux devenus des cibles privilégiées pour leur pouvoir d’achat présent et futur.

Vivement « les perennials » !

Nous savons tous que nous allons avoir de plus en plus d’informatique dans nos vies. Via différents terminaux. Et peut-être après-demain sans écran. Nous connaissons aussi la difficulté des médias historiques à reprendre de l’attention aux nouveaux médias, bien meilleurs aux yeux des jeunes et qui bougent très vite !

Mais le nombre de sociétés et de marques média qui obtiennent des succès considérables auprès des 18-35 ans montre qu’il n’y a pas d’obstacle majeur pour atteindre cette cible. 

Alors, sans céder au fétichisme de la jeunesse, au jeunisme, nous ne pouvons prendre le parti de l’insécurité et de l’ignorance de responsables débordés face au monde numérique. De responsables de l’audiovisuel, du cinéma et de la culture qui n’ont pas une, mais deux générations de retard ! Non seulement sur les Jobs et Gates, hier, mais aussi sur les Zuckerberg, Bezos, Musk, Brin et Page, aujourd’hui. Avec la complicité du secteur publicitaire, ils ont préféré vivre de la rente et livrer des résultats à leurs actionnaires plutôt que d’assurer l’indispensable transformation numérique de leur entreprise. Et parfois encore plus cyniques, soutenir un vieux monde politique et des intérêts où les jeunes n’ont pas encore assez de pouvoir.

Mais désormais c’est le public qui dicte sa loi. Et ses usages.

Avant les gens allaient aux médias, aujourd’hui c’est aux médias d’aller à eux ! D’adopter vite le contexte de milléniaux hyper-connectés qui incarnent l’avenir, pas de résister. L’incapacité des médias traditionnels à se réinventer provoque déjà un arrêt de la croissance des emplois numériques dans leur secteur. Demain, le risque est de devenir hors sujet !

Mais ce n’est pas suffisant. Face à une génération qui évolue dans un monde de choix infinis, de jeunes qui vivent à l’intérieur même de leurs médias, où authenticité et proximité sont des valeurs cardinales, leur faire confiance, lâcher prise, ne paraît pas hors de portée.

Allons plus loin. Donnons-leur du pouvoir à tous les niveaux : dans la confection d’un JT, d’un magazine, d’un talk show, d’une maquette, d’une fiction, d’une application. Accueillons-les aux comités de direction et au conseil d’administration.

Laissons aussi plus de place à l’expérimentation, à l’erreur, au tâtonnement que permettent les outils numériques. Avant de se lancer une chaîne demandait une fréquence, des mois de préparation et des millions d’euros. Désormais lancer une chaine sur Facebook ou YouTube se fait en quelques secondes avec un smart phone – profitons-en pour explorer.

La solidarité intergénérationnelle, le bon sens, et la tension actuelle plaident pour rapidement donner la place qu’ils prendront de toute façon. Ces jeunes sont les hackers de notre vieux monde, les entrepreneurs du changement.

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Crédit : Web School Factory

Aujourd’hui les vieux médias ont aussi besoin des nouveaux médias, et inversement. Car ceux qui vont « bouffer ces derniers sont aujourd’hui en maternelle », prévient le patron de Vice Media. Gare donc à la génération Z, celle qui a grandi dans les années 90, la plus influente et qui constitue la vraie bascule. Une génération qui paiera peut être demain par selfie !

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Déjà se profile encore une nouvelle catégorie, celle des perennials, vieux et jeunes enfin réunis, vivaces de tous âges, qui enjambent les générations, vivent au présent, sont passionnés, créatifs, curieux surtout de têtes et d’idées nouvelles. Il semble d’ailleurs être prouvé que la neuro-plasticité n’est plus une question d’âge. Et qu’après 25 ans, nous pouvons encore recréer des circuits neuronaux.

Comme toujours, le plus grand défi est donc celui du changement culturel. En d’autres termes, le changement en profondeur de l’état d’esprit de l’entreprise.

Les médias auront-ils le temps de changer aussi rapidement et en profondeur que nécessaire ? Il y a encore un an, personne de plus de 40 ans n’était sur Snapchat !

Aujourd’hui les seniors y débarquent, ce qui pourrait faire fuir les jeunes vers un nouvel havre numérique. Où seront les jeunes demain ?

Eric Scherer

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PS : nous développerons ces sujets dans notre Cahier de Tendances Méta-Media N°12, Automne Hiver 2016-2017, avec de nombreux témoignages et contributions de créateurs de médias dédiés aux jeunes audiences, en Europe, en Amérique du Nord et en Afrique. Mais aussi des initiatives de vieux médias vers ces nouveaux publics.

Le cahier sera disponible ici, sur Méta-Media en pdf gratuitement fin novembre, début décembre.

 (Illustration de couverture : Jean-Christophe Defline)

Liens vagabonds : #Trump #MediaCulpa – Pourquoi les médias se sont-ils plantés ? ?

A RETENIR CETTE SEMAINE

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ELECTION DE DONALD TRUMP ??

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Et avant même la victoire de Trump, on pouvait lire :  

tweets

“MUST READ”

A VOIR

SURVEILLANCE, CONFIANCE

DISRUPTION, REVOLUTION, DISLOCATION

MOBILITES / LIVE

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360° / REALITE VIRTUELLE / REALITE AUGMENTEE

RO-BOTS, INTELLIGENCE ARTIFICIELLE, AUTOMATISATION, BIG DATA, MACHINE LEARNING

assistants

NOUVEAUTES

SMART TV / STREAMERS / VIDEO / MULTI-ECRANS

RESEAUX SOCIAUX, PLATEFORMES

4K / U-HD / 8K / HDR :

JOURNALISME 2.0

whatsapp

quote

EDUCATION

OUTILS

 

Retrouvez la sélection des outils Méta-Media sur jTools

Liens vagabonds : Twitter en difficulté, tout en restant indispensable

A RETENIR CETTE SEMAINE

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“MUST READ”

A VOIR

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ABUS DE POSITION DOMINANTE  – The winner takes all !

SURVEILLANCE / CONFIANCE

NOUVEAUX USAGES, COMPORTEMENTS

quote

DISRUPTION, REVOLUTION, DISLOCATION

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MONDIALISATION

360° / REALITE VIRTUELLE / REALITE AUGMENTEE

VR-medium

RO-BOTS, INTELLIGENCE ARTIFICIELLE, AUTOMATISATION, BIG DATA, MACHINE LEARNING

buzzfeed

NOUVEAUTES

SMART TV / STREAMERS / VIDEO / MULTI-ECRANS

NETFLIX

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AMAZON

RESEAUX SOCIAUX, PLATEFORMES

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4K / U-HD / 8K / HDR :

ART

emojis

PUB:

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JOURNALISME 2.0

CAMPAGNE ELECTORALE US :

OUTILS

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Le Louvre affiche la beauté du numérique en …8K

Par Bernard Fontaine, Direction de l’Innovation et de la Prospective, France TV

Première mondiale cette semaine à Paris ! Le Louvre a montré la plus avancée des technologies numériques audio-visuelles pour sublimer ses collections : la 8K dans un film de 59 minutes co-produit avec la télévision publique japonaise NHK. « La Beauté Eternelle », intégralement tourné et produit en définition 8K, porte sur neuf des plus grandes œuvres exposées connues du monde entier comme La Joconde de Léonard de Vinci, ou la Dentellière de Vermeer, le « maître de la lumière hollandaise ».

Joconde 8K

Qu’est-ce que la 8K ?

On connait tous la haute-définition (2 millions de pixels) qui équipe nos écrans depuis presque dix ans. Mais une technique en chasse une autre, et aujourd’hui l’Ultra-HD (ou 4K) est en passe de démoder la HD avec près de 8 millions de pixels sous vos yeux. Elle devrait être remplacée dans quelques années par la 8K, technologie qui portera la résolution de nos futurs écrans à 7680 X 4320 pixels soit 4 fois la 4K, ou 16 fois la résolution HD, et donc un total de 33 millions de pixel ! 

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La télévision de demain ?

La NHK et la 8K

Après de premiers tests en 2002, la NHK a déjà expérimenté la 8K en vraies conditions de production TV lors des JO de Londres en 2012, puis ceux de Rio l’été dernier. Depuis août, la NHK teste déjà en diffusion satellite sur l’archipel nippon et vise, nous dit Yukinori Kida, patron de la diffusion, un déploiement grand-public dans deux ans en 2018 afin d’être fin prêt pour l’évènement phare des JO de 2020 à Tokyo.

L’industrie japonaise du broadcast suit ces avancées majeures: les ingénieurs de la NHK ont ainsi su réduire d’un facteur 40 le poids d’une simple caméra 8K High Vision, passée entre 2002 à 2016 de 80 à seulement 2 kg.

La production du film 8K à Paris : 2 ans d’études, 10 jours de tournage, 6 mois de post-production

Interview Laurence Castany, Le Louvre

Les équipes du Louvre et celles de la NHK n’ont rien improvisé : elles ont étudié pendant deux années le principe d’une collaboration née de l’émotion du président du musée Jean-Luc Martinez dans les studios japonais face à la qualité de restitution permise par cette technologie.

La NHK qui ne laisse rien au hasard est venue deux fois à Paris pour repérer les moindres détails du lieu. Une équipe de 25 personnes et trois camions de matériel ont pendant une dizaine de jours filmé jour et nuit hors de la présence des visiteurs complétés par quelques plans indispensables sur la ville de Paris.

L’équipe de production NHK Paris a coordonné ce lourd dispositif utilisant deux caméras 8K du Japonais Hitachi, couplées avec un enregistreur Panasonic, équipé de huit cartes P2 pour les scènes du musée et le making-of du tournage ainsi qu’une caméra 8K de Sony sur disque SSD, dédiée elle aux scènes extérieures.

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Une grue de huit mètres a été utilisée pour filmer certaines scènes complexes comme l’imposant tableau de Jacques-Louis David, Le Sacre de Napoléon ainsi qu’une grue Magnum Duo Jib indispensable au reste de la captation 8K. Des techniciens français rompus à l’exercice ont été associés au dispositif. Ceux-ci pouvaient être rassurés car une grande partie du matériel était disponible en double, sécurité et sérieux de la NHK lorsqu’elle est loin de chez elle…

La post-production faite à Tokyo a duré 6 mois, utiles à l’étalonnage du film, qui au passage utilise la technologie HDR (High Dynamic Range), très visible sur certaines scènes à l’éclairage complexe. On est bien loin d’une production TV en direct dans ce type d’opération. La bande son 3D 22+2 commentée en japonais, mais aussi en français, provoque quelques réactions de surprise par le ton magnifiant imposé. Heureusement que l’excellente musique d’Akira Senju donne à ce son un relief sonore en totale adéquation avec l’image, un peu troublé parfois par les imposants ventilateurs refroidissant la plateforme de démonstration 8K installée sous la Pyramide du Louvre lors de cette démonstration.

Le film « La Beauté Eternelle »: détails invisibles à l’oeil nu

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Ce film de 59 mn, dont il existe aussi une version courte de 10 mn, est à mi-chemin entre une véritable œuvre artistique et une approche scientifique au vu des détails captés par les caméras 8K de la NHK.

Le grand public sera, même si il connait parfaitement les œuvres filmées, surpris d’y découvrir des détails inconnus souvent microscopiques absolument impossibles à voir à l’œil humain qu’il nous a été donné de voir sur les dalles 8 K des énormes moniteurs professionnels de 85’ du japonais Sharp.

Attention il faudra cependant être assez près de l’écran pour voir ces détails, le pouvoir de résolution optique de notre rétine reste lui bien présent. Seule hélas la NHK saura utiliser ce film lors de ses actuelles diffusions expérimentales au Japon; n’essayez pas de le trouver sur Internet ou de scruter vos guides de programmes TV pour le moment.

Révolution de la TV observée de près. Fin de la TNT ?

En tout cas cette révolution annoncée de la télévision dans seulement 24 mois au Japon sera observée de près par toute une industrie d’équipements grand public, puisque Coréens, Chinois et autres fabricants de TV ont tous annoncé ou présenté leurs prototypes d’écrans ces derniers mois lors de salons professionnels.

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Sachez qu’il vous faudra au moins 100 Mb/s en terme de débit pour recevoir (H265, HEVCV) un tel programme par internet, un chiffre qui devrai refroidir et rendre obsolètes nos actuelles connexions ADSL qui peinent à fournir quelques Mb/s aux foyers raccordés. Une voie royale pour le satellite, le câble et la fibre optique et pourquoi pas la 5G.

Mais la TNT risque elle aussi de souffrir de son incapacité à permettre quoi que ce soit en 8K dans la décennie à venir avec les limitations qu’on lui connait hélas dès aujourd’hui pour son passage à la 4K.