#VIVATECH2021 : le futur hybride d'un monde hyper numérique

Par Mathilde Caubel, MediaLab de l'Information à France Télévisions

Après son annulation au printemps 2020, la 5ème édition de Viva Technologie s’est tenue du 16 au 19 juin au Parc des Expositions de la Porte de Versailles. Pour ce premier évènement tech en mode hybride, des speakers de choix comme Tim Cook ou Mark Zuckerberg sont intervenus de l'autre bout de la planète. Pandémie oblige, le salon a dû innover pour coordonner les espaces physiques et virtuels.

Cette année, la tech se voulait plus responsable et bienfaisante que jamais. La pandémie a mis en exergue des besoins inédits qui ont parfois permis de trouver des solutions à des problèmes historiques (notamment dans le domaine du travail et de la santé). Le monde des nouvelles technologies, et en particulier celui des géants de la tech, est plus conscient que jamais de son impact laissé sur l'environnement. L’édition 2021 s’est d'ailleurs tenue en pleine tension entre les médias traditionnels et les Big Tech. Entre désinformation et droits voisins, il devient stratégique de développer des synergies entre la tech et les médias. 

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Green Tech et RSE

Que ce soit en termes de mobilité, de santé ou de stockage de données, la Tech ne s'est jamais voulue aussi verte que cette année. En effet, l'impact écologique des centres de données et des solutions de cloud interrogent sur l'avenir des nouvelles technologies. Tant au niveau individuel qu'organisationnel, la gourmandise en énergie de la blockchain ou des solutions de cloud sont la piste d'amélioration principale des Big Tech. Sébastien Missoffe, le directeur général de Google France a exprimé la volonté du géant américain de voir tous ses centres de données "alimentés exclusivement par des énergies renouvelables d'ici 2030." Tim Cook a lui aussi montré sa volonté d'obtenir une chaîne de production totalement neutre en carbone dès 2030 pour Apple, tout en soulignant le défi que représente cet objectif pour une entreprise qui souhaite continuer à proposer des nouveaux produits régulièrement. 

Du côté des start-ups présentes, la biotechnologie de stockage de donnée de Grow Your Own Cloud a été très remarquée. Cette solution propose de stocker les données dans le code génétiques des plantes, en remplaçant le système binaire par les quatre bases azotées (A,T,C,G) qui composent l'ADN.

Le salon Viva Technology 2021 a aussi été le lieu de lancement du Tech for Good Score par le mouvement Impact France.

Future of Work : Entre lien et flexibilité

Selon une étude Malakoff Humanis, plus de 8 télé-travailleurs sur 10 aimeraient poursuivre le télétravail, et cela même après la levée des restrictions sanitaires. Le télétravail va sûrement perdurer et avoir un impact significatif sur nos modes de vie. La société de conseil Colliers International France, généralement spécialisée dans l'immobilier, à présenté lors du salon son étude sur le futur du travail. Débutée en 2018, cette étude propose différents scénarios pour prévoir ce que sera le travail (et le télétravail), ainsi que les mutations démographiques et sociales que cette nouvelle donne va entraîner. Cette étude souligne les avantages qui poussent les salariés à l'adoption du télétravail (ou modes hybrides) ainsi que les problèmes qu'il faudra tenter de régler (la différence d'accès aux équipements, l'isolement des collaborateurs, la précarisation d'une frange de la main d'oeuvre).

Infographic: Workers Want to Stay Put in Home Office | Statista

L'édition 2021 de Viva Technology étant sous le signe de l'hybride, de nombreux exposants ont proposé des solutions pour s'adapter. La start-up française Klaxoon a notamment profité du salon pour révéler de nouvelles fonctionnalités de "Board Hybrid", qui permettra en outre de combiner visio-conférence et tableau virtuel sur la même plateforme et avec jusqu'à 50 participants et 250 spectateurs en simultané.

Abe Smith est venu parler du succès de Zoom, illustré par un chiffre ahurissant : 3 mille milliards de minutes ont été passées en visio sur Zoom juste pendant le mois de septembre 2020. Pour lui, c'est la sur-représentation de la Gen Z dans la main d'oeuvre (75% de la main d'oeuvre européenne en 2025) qui a permis l'adoption aussi rapide d'outils déjà existants. Avec leur flexibilité et leur maîtrise des outils numériques, ils ont guidé l'acculturation du reste de la population à ces nouveau modes de communication. Abe Smith a aussi identifié le défi principal pour que Zoom continue son développement : travailler sur la sécurité et la protection des données des utilisateurs tout en améliorant l'expérience d'utilisation.

Du côté des start-ups françaises, les idées ne manquent pas pour permettre aux salariés de garder le lien et de maintenir un travail d'équipe en distanciel. Teamstories propose ainsi un réseau social d'entreprise inspiré du principe des stories pour que les collaborateurs communiquent de manière visuelle et spontanée.

Réalité Virtuelle et Métavers

"Nous avons besoin d'une technologie qui nous fasse nous sentir réellement aux côtés de la personne que nous contactons, et cette technologie c'est l'AR/VR. Elle donne un réel sentiment de présence, différent d'un écran de TV ou de téléphone, à tel point que certaines personnes peuvent en avoir des vertiges. L'AR/VR va être une révolution informatique au même sens que l'ont été le PC et le smartphone.”- Mark Zuckerberg, CEO (Facebook)

Dans son intervention très attendue, Mark Zuckerberg s'est dit très impressionné de la vitesse à laquelle les technologies de VR/AR s'installent dans les pratiques. Alors que l'Oculus Quest 2 n'est sorti qu'il y a quelques mois, le CEO de Facebook s'est montré très enthousiaste vis-à-vis des perspectives de création d'un Métavers, une "expérience formidable" qu'il verrait arriver dans "5 ou 10 ans". L'entreprise emploie actuellement 10 000 personnes qui travaillent à temps plein sur les projets VR/AR dont le développement d'outils plus perfectionnés, plus petits et légers, mais aussi moins coûteux, pour les rendre plus accessible et diversifier les usages.

Au-delà du monde des jeux-vidéos et de l'audiovisuel interactif, Mark Zuckerberg projète des utilisations qui vont enrichir les évènements hybrides (notamment grâce à l'usage d'hologrammes), de prendre des cours de sport avec un coach AR ou un environnement virtuel, etc. Il voit aussi dans le développement d'un Métavers une opportunité économique qui permettrait une dématérialisation de certains objets du quotidien et qui permettrait ainsi à un grand nombre de personnes de vendre et créer leurs produits sans s'inquiéter de la logistique et des distances.

 

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Du côté des exposants, une même volonté de faire de l'AR/VR une boîte à outils pour tous les secteurs d'activités était présente. Notamment avec des outils simples permettants de générer des contenus virtuels ou encore des avatars hautement fidèles à la réalité. Dans ce courant, la start-up portugaise Didimo propose un outil de génération de "digital twins" pour rendre nos interractions dans le monde digital plus humaines.

Tech & Médias : des combats en commun

Pendant un panel réunissant des PDG de médias (Pierre Louette du Parisien/Les Échos, Laurent Prud'homme de L'Équipe et Nicolas Thompson de The Atlantic) et Laurent Solly (directeur de Facebook en Europe du Sud), Viva Technology s'est proposé d'explorer les synergies possibles entre les Médias et la Tech. Le besoin d'une meilleure compréhension et collaboration a été souligné par les deux partis, particulièrement dans la lutte contre la désinformation. Nick Thompson a souligné l'interdépendance des deux milieux : les journalistes couvrent les sujets liés à la Tech tout en ayant à se reposer sur celle-ci pour leurs publications et pour les revenus publicitaires du numérique.

La question des droits voisins a aussi été abordée, ainsi que celle des nouvelles formes de journalisme que proposent les plateformes comme Facebook. En effet, face à la création de Facebook News et de leur plateforme de newsletter "Bulletin", les 3 PDG de médias présents ont exprimé une crainte de création d'un journalisme de synthèse par la Tech elle-même pour décrédibiliser les médias qui la critiquent. La question d'un respect du savoir-faire de la presse, et donc d'une collaboration, est notamment intervenue dans la discussion sur la lutte contre les contenus de désinformation sur les plateformes sociales. L'intelligence artificielle et les data des plateformes sociales ont notamment été évoquées comme des points de collaborations pour aider les fact-checkers et les plateformes à lutter contre la viralité des fausses nouvelles.

“Le principal problème qu'ont les plateformes sociales avec les fakes news est dû à la taille des dites plateformes. C'est comme si vous étiez un pompier cherchant à lutter contre un feu de forêt en Amazonie : vous cherchez la source du feu, mais des étincelles viennent de partout. Et quand il s'agit de deepfake, c'est encore plus complexe : 35% des deepfake arrivent à passer à travers les algorithmes de détection des plateformes.” - Jean-Claude Goldenstein, Founder & CEO (Creopoint.AI)

Un robot superstar

Pour terminer ce récapitulatif en beauté : quelques images de Spot (Boston Dynamics), un des quatre robots superstars présentés par Intuitive Robots. En 2020, ces robots tout-terrain avaient fait le buzz avec leur talents de danseurs. Spot est rapidement devenu l'attraction principale, voire la mascotte, de cette édition 2021, et à même pris la pose pour quelques photos.

Crédit Photo de Une : Viva Technology 2021