L’avenir de la data sera-t-il émotionnel ?

Par Emilie Balla, France Télévisions, Direction de la Prospective

Le Big Data c'est bien, le Feel Data c'est mieux ! Grâce à des outils neuroscientifiques, il est désormais possible de connaître les émotions d'un consommateur ou d'un spectateur. A minima complémentaires des panels déclaratifs, au mieux bien plus fiables, ces données émotionnelles intéressent le publicitaire Franck Tapiro qui vient de lancer Datakalab, qui se définit comme un « laboratoire d’expertise scientifique ». A l’occasion du congrès sur le Big Data la semaine dernière à Paris, il a présenté ses études concernant la transformation d’émotions en data. 

L’émotion ne nous lie plus seulement entre individus, mais aussi avec les marques et les technologies

Nous sommes constamment dans l’émotion, même si certaines se font de façon inconsciente. C’est un phénomène complexe qui ne touche pas seulement notre esprit mais aussi notre corps et génère ainsi des changements de comportement. Les émotions nous permettent souvent de trancher lorsqu'elles prennent le dessus sur la raison. En d’autres termes, elles guident nos choix et nos achats.

Datakalab en a fait son fond de commerce. Les données émotionnelles sont analysées pour orienter les publicités (print ou vidéo) en fonction de nos affinités. Pour ce faire, Datakalab dispose de capteurs sensoriels qui analysent les données en temps réel. Il peut s’agir d'une montre connectée ou d’autres outils plus discrets qui mesurent les feel data de chaque individu, en prenant en compte son âge, son sexe, sa catégorie socioprofessionnelle. Ces capteurs sont capables de savoir à quel moment un spectateur ressent une baisse d'émotions, sans même qu'il ne s'en rende compte.

Ces données ayant un caractère individuel puisque chaque personne réagit différemment aux stimulis visuels en fonction de son vécu personnel, elles sont un outil puissant pour la recommandation personnalisée.

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© Datakalab

Le storytelling est LE keydriver émotionnel

Plusieurs paramètres sont calibrés par ces objets connectés ; le comportement visuel avec la réaction pupillaire à la lumière, la réactivité émotionnelle grâce à l’augmentation du rythme cardiaque et l’activation du cerveau. Ces feel data sont alors collectées pour « l’utile et l’action » affirment Frank Tapiro, fondateur de Datakalab, c’est-à-dire pour savoir si le public adhère ou non au produit. Une publicité qui fonctionne, est en général courte et empreinte de storytelling, mais pour une mécanique gagnante, il faut aussi compter sur un packshot lisible qui sert la marque.

Des expériences ont également été faites afin de mesurer le parcours émotionnel des voyageurs en gare. Grâce aux résultats de ces analyses, la SNCF a ainsi pu identifier quels étaient les endroits les plus stressants de la gare, et a depuis misé sur un design plus accueillant de ceux-ci pour améliorer l’état d’esprit de ses usagers lors de leurs voyages.

Une campagne publicitaire peut avoir deux cibles différentes. C’est le cas notamment pour une publicité de la marque de voiture Ford. Dans ce spot, on voit un homme athlétique sauter du haut d’un plongeoir, et finir son plongeon dans l’eau en traversant la voiture dont les portes étaient déjà ouvertes. Après analyse des données émotionnelles, les publicitaires ont distingué deux pics de concentration, l'un féminin centré sur le plongeur avant le saut, l'autre masculin focalisé sur la voiture. Et non pas sur la performance du saut, comme attendu.