Liens vagabonds : les plateformes courtisent les jeunes dès le berceau

A RETENIR CETTE SEMAINE

L’emprise des plateformes est déjà mondiale, mais elles en veulent toujours plus. Alors que leur base d’utilisateurs s’étend déjà peu ou prou à toute la population connectée de la planète (avec des versions Lite conçues spécialement pour les régions les moins reliées à l’internet), il leur reste un dernier terrain à conquérir : les plus jeunes.

Facebook lance une application de messagerie destinés aux… 6-12 ans (rappelons que l’inscription sur la plateforme est officiellement autorisée à partir de 13 ans). Google, dont l’appli YouTube Kids est au coeur du scandale depuis quelques semaines, tente d’éteindre l’incendie en portant à plus de 10.000 le nombre de ses modérateurs chargés de faire la police sur YouTube. Mais cela sera-t-il suffisant ?

En parallèle, côté musique, Apple serait sur le point de racheter ShazamYouTube annonce le lancement en mars prochain d’un service musical payant pour concurrencer Spotify et Apple Music ; Amazon s’étend dans 28 nouveaux pays avec son service musical ; et Facebook propose un nouvel outil pour mettre de la musique dans les vidéos ; tandis qu’en France, Orange se met à son tour à la stratégie de la convergence et ouvre la porte à un partenariat à Altice dans les contenus.

Côté médias, bel exemple de success story au New York Times qui annonce avoir doublé son audience en deux ans, avec 3,5 millions d’abonnés numériques et 130 millions de lecteurs.

Et côté pub, alors que la pub Internet a officiellement surpassé celle de la TV en 2017, les géants mondiaux du secteur tentent de casser le duopole Google/Facebook en misant sur… Amazon.

Quid du dossier de la neutralité du Net ? En fait, les géants du web se bloquent eux-mêmes leurs services, comme le montre la bataille Google/Amazon.

3 CHIFFRES

3 chiffres (3)

75%ce que représentera la vidéo dans le trafic mobile d’ici 5 ans

94%la part de la pub digitale dans la croissance des dépenses publicitaires de 2017 à 2020

44%la part d’Américains qui pensent que les médias sont à l’origine de fake news sur Donald Trump

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Bagage numérique de base ? Vie des données et analyse critique des médias dès le primaire, pour Mounir Mahjoubi

Quel est le bagage numérique de base à acquérir dès l’école ? En marge de Slush, l’énorme conférence tech qui se tenait en fin de semaine à Helsinki, où il a plaidé pour faire de l’Europe un leader en intelligence artificielle, Mounir Mahjoubi, le secrétaire d’Etat français chargé du Numérique, a donné à Méta-media sa version du « bagage des humanités numériques « .

Pour lui, dès l’enseignement primaire, l’école devrait donner aux jeunes élèves un minimum de bases numériques afin d’être mieux armés pour appréhender les nouveaux enjeux de la société, notamment en les familiarisant à la vie des données et à l’analyse critique des médias.

Dans le secondaire, le ministre souhaite non seulement que soit définies les bases des compétences numériques universelles, mais aussi que les élèves, qui le souhaitent, puissent vraiment aller beaucoup plus loin dans leur apprentissage numérique.

Même schéma pour les profs : tous les amener à un bagage minimum, mais aussi trouver des profs experts, ajoute Mounir Mahjoubi qui dit s’entretenir de ces sujets quasi tous les jours avec le ministre de l’Education Nationale.

France Télévisions organise à partir de lundi une semaine de l’Education au siège du groupe audiovisuel public, rassemblant jeune public, médiateurs éducatifs et professionnels de la télévision. L’éducation aux médias, dans un contexte de fake news, hélas en plein essor, sera au centre des débats.

Interview :

Que faire dès l’école primaire ?  

« A la fin de l’école primaire, c’est une nouvelle exigence que la société va imposer au fur et à mesure des mois et des années qui viennent.

Je pense qu’il y a maintenant un minimum de bases numériques à acquérir, qui est de plus en plus élevé, qui est plus élevé qu’avant.

Je pense qu’on a un sujet sur les primo-compétences technologiques de base qui ont l’air techniques à l’origine, mais qui en fait sont la capacité à pouvoir analyser plus globalement l’environnement informationnel et numérique.

Par exemple, quand on fait 10 heures de code – 10 heures ce n’est pas beaucoup – on ne devient ni un codeur ni un ingénieur, sauf qu’on a appris à enregistrer une donnée, à la transmettre, à la modifier, à la faire passer par un réseau ; à comprendre qu’elle a un cycle et qu’elle a une vie.

Le cycle de la donnée c’est un élément très important à maîtriser avant la fin du primaire.

Deuxième élément, c’est l’analyse critique des médias. Aujourd’hui notamment avec les phénomènes de fake news, avec ce qui se passe sur les réseaux sociaux, il n’a jamais été aussi important que les enfants, très tôt, comprennent ce qu’est une source, comprennent ce qu’est un auteur, un journaliste, un critique. Et que tout ça participe à la constitution d’un esprit libre.

Ce sera notre meilleure arme contre les fake news et contre les tentatives de manipulation de l’opinion : c’est d’avoir des citoyens informés et qui maîtrisent ces nouveaux outils. »

Faut-il apprendre le code dans le secondaire ?

« Dans le secondaire, moi je suis très ouvert. Je veux que ceux qui ont très envie puissent le faire. C’est pour cela que je l’ai dit au ministre de l’Education nationale : il faut qu’on puisse apprendre plus de numérique. Même aller très loin dans le numérique pour ceux qui en ont envie.

Et après la seule question qui est ouverte et qui est le début d’une discussion tous ensemble aujourd’hui c’est : « pour tous qu’est-ce qu’on veut ? ». C’est quoi le bagage de base des humanités numériques ?

Est-ce que c’est devenir un codeur ? Je ne suis pas sûr. Tout le monde n’a pas besoin de devenir un codeur. Par contre tout le monde doit vraiment maîtriser ce que ça veut dire, ce qu’il s’y passe. Est-ce que tout le monde doit devenir un web designer ? Non ! Par contre il faut que les gens comprennent qu’on peut manipuler des images. Est-ce que tout le monde doit devenir un ingénieur électronicien ? Non. Mais il faut comprendre le robot, il faut comprendre la machine.

Il y a donc le sujet de compétences de bases universelles, et le sujet comment ceux qui en ont envie, on puisse leur donner plus la capacité de devenir plutôt des gens qui vont avoir une expertise ».

Et les profs ?

« Pour les profs, c’est de la même manière. Il va falloir que pour tous les profs, on soit capable de former et d’accompagner à ce bagage universel. C’est tout un enjeu de formation des prochaines années. Et en même temps, il faut aussi qu’on ait des profs experts.

Donc la grande question qui se pose et qui est ouverte, c’est qui sont les profs experts du numérique ?

Est-ce que c’est le prof de techno, le prof de math, un nouveau prof de numérique ? Tout ça sont des sujets qui sont très intéressants et qui sont aujourd’hui des sujets qui sont pris par l’éducation nationale pour essayer de tracer les prochaines années ».

Que demandez-vous à votre collègue de l’Education Nationale ?

« Avec le ministre de l’Education Nationale, on se parle quasiment tous les jours. On a plein de sujets en commun.

On travaille sur le développement de l’« EdTech », comment on fait pour qu’il y ait un vrai secteur en France qui développe des nouvelles solutions pour l’éducation, on travaille sur la formation des professeurs, sur le bagage de base. On travaille beaucoup sur le « moins 3, plus 3 » : comment on forme les gens depuis le lycée jusqu’au début du supérieur aux nouveaux métiers du numérique, aux nouvelles compétences numériques. Tout ça ce sont des sujets qu’on discute tous les jours. »

ES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Liens vagabonds : Snapchat, on ne mélange plus amis et médias

A RETENIR CETTE SEMAINE

Snapchat présente son redesign, moins révolutionnaire que prévu, mais avec une stratégie claire : séparation radicale du flux des amis (swipe vers la gauche) et des flux des marques, y compris les médias (swipe vers la droite). Avec ce nouveau fonctionnement (qui rappelle l’expérimentation Zuckerberg sur la séparation des flux d’actualités amis vs. médias), Snapchat entend se présenter comme l’anti-Facebook, mais ce ne sera peut être pas suffisant.  Non seulement le redesign n’attirera pas forcément de nouveaux utilisateurs, mais il pourrait même repousser des clients actuels. Cette version est aussi censée faire venir les influenceurs, qui préfèrent aujourd’hui Instagram et YouTube. Démonstration de l’interface par Evan Spiegel

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YouTube est englué dans le tri de vidéos douteuses destinées aux enfantsNouvelle “Adpocalypse” : les annonceurs boycottent YouTube Kids, la plateforme réagit. Peut être que YouTube n’est tout simplement pas fait pour les enfantsEn même temps, et dans la veine d’harmonisation des fonctionnalités entre plateformes, YouTube lance ses stories, les Reels.

Time Inc. est vendu à un groupe de presse très conservateur et commence à se séparer de certaines de ses marques, comme Sunset Magazine.

Amazon arrive dans l’AR/VR avec Sumerian et démocratise l’AR avec l’idée d’un modèle économique lucratif. Elle met surtout l’IA sur l’étagère à disposition de tous. Nous sommes arrivés à l’ère de l’IA ambiante.

3 CHIFFRES

10 000 Dollars – c’est le cap franchi par le bitcoin cette semaine (+933% depuis le début de l’année)

100 – BuzzFeed supprime 100 postes (= 10% de son staff) suite à des résultats décevants en 2017 

800 M – La robotisation de l’économie risque de détruire 800 M d’emplois d’ici 2030, selon une étude de McKinsey
Et les autres informations de cette semaine :

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Liens vagabonds : la fin de la neutralité du net aux US menace les libertés publiques

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Les défenseurs de la neutralité du net sont en train de perdre la bataille aux Etats-Unis, en partie à cause d’Ajit Pai, petit soldat de Trump. Pourtant, tous les membres de la FCC ne sont pas d’accord. Que va-t-il donc se passer ? Les fournisseurs d’accès pourront déterminer qui lit quoi et les PME s’inquiètentSans neutralité, BitTorrent aurait été interdit.

Les FAI US promettent qu’ils ne bloqueront pas ; mais déjà la bataille s’engage au Congrès et la résistance s’organise ; pour éviter notamment ce qui se passe au Portugal ; ou même en Espagne. Tim Wu l’explique dans le New York Times : il n’est pas si facile légalement pour la FCC d’autoriser les FAI à se comporter comme l’Etat chinois. Faudra-t-il se passer des FAI et bâtir notre propre Internet ? Surtout quand on voit que tous les coups sont permis ! 

Et alors que la bataille bat son plein outre-atlantique, les médias numériques connaissent un vrai trou d’air (mais personne ne le dit). Le secteur est même un véritable château de cartes, menacé de tous les côtés : avec le problème de la pub, les modèles économiques traditionnels deviennent obsolètes, alors que le secteur évolue de plus en plus vite et qu’après le pivot vers la vidéo – à peine engagé dans certaines rédactions – il faut déjà se tourner vers the next big thing : le pivot vers la réalité.

Aux Etats-Unis, Washington bloque le rachat de Time Warner par AT&T ; pendant qu’au Japon Samsung avance sur le Galaxy X, qui sera… pliable !

3 CHIFFRES

57 millions d’utilisateurs Uber se sont faits pirater leurs données en 2016… Uber a étouffé l’affaire et payé une rançon

8.000$ : c’est ce que dépense Tesla… par minute !

482 sites web qui enregistrent tout ce que vous tapez sur votre clavier

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GAFA : la loi du choix

Par Sébastien Soriano, Président de l’ARCEP* (billet invité)

Une chose ne lasse pas de fasciner dans nos comportements numériques : notre renoncement à choisir.

Le choix : « loi de la gravité » économique et sociale

Dans le monde physique, nous faisons les magasins, comparons les prix, la qualité, l’ergonomie, pesons les avantages et inconvénients de telle ou telle marque… Nous nous laissons aussi séduire par une publicité, une devanture de magasin, certains par l’envie de distinction… Parfois nous donnons la préférence à des enjeux éthiques, de nature sociale ou environnementale. Tous ces paramètres de consommation sont soumis à un principe implacable : la loi du choix.

Rares sont les domaines de notre vie de consommateur ou d’usager qui échappent à la loi du choix. Il y a bien les services publics, mais ceux-ci relèvent en dernier ressort du personnel politique, que nous choisissons à travers nos élections. Et dans les collectivités locales, les services publics locaux restent en outre soumis à la pression de l’attractivité des territoires pour les ménages et les entreprises. Même les industries de réseaux – électricité, télécoms, etc. – qui sont pourtant des monopoles naturels, ont été soumises à cet inexorable commandement.

Nos choix expriment nos attentes, et en ce sens orientent les marchés. Le choix est devenu un droit évident, corollaire implicite de la société de consommation, véritable « loi de la gravité » économique et sociale. Au fond, le cliché des files d’attente des pays du bloc communiste n’est-il pas le meilleur argument pour défendre le modèle de la démocratie de marché ?

Les plateformes numériques en apesanteur

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Le développement du numérique a d’ailleurs encore décuplé notre capacité de choix. L’e-commerce a créé un « deuxième monde » à côté des magasins physiques, augmenté par l’effet de longue traîne. La publicité s’infiltre dans tous les recoins de notre attention. Les plateformes permettent à des petits acteurs (commerçants, chauffeurs, livreurs, etc.), parfois auto-entrepreneurs, de rentrer beaucoup plus facilement sur les marchés. Le modèle collaboratif offre aux utilisateurs la possibilité de s’organiser entre eux et de se passer des échanges marchands traditionnels. Les systèmes de notation permettent de hiérarchiser les options, nous faisant gagner un temps précieux pour exercer notre choix sur une sélection plus pertinente. 

Mais qu’en est-il du numérique lui-même ? Je veux dire, de quelle variété disposons-nous pour choisir entre ces plateformes qui organisent et simplifient ces choix et relations ? La réponse est nettement plus contrastée. Pour simplifier, le consommateur a en général le choix « au début », lorsque les services numériques eux-mêmes obéissent à la loi du choix fonctionnant pour l’ensemble de l’économie. Puis vient une phase étrange où certaines grandes plateformes – pas toutes heureusement – semblent sortir du système, s’arracher à la loi du choix, tel un astéroïde atteignant la vitesse de libération qui lui permet de s’arracher à la gravité d’un astre et de visiter les confins de l’univers.

Il demeure bien une variété de façade : on peut choisir DuckDuckGo plutôt que Google, ou Mastodon plutôt que Twitter. Mais les consommateurs vous le diront tous : « ça n’a rien à voir ». Je ne m’attarderai pas ici sur les raisons qui expliquent cette situation: c’est la notion d’effet de réseau qui est massivement à l’œuvre, principe récursif par lequel le service qui a le plus d’utilisateurs offre le meilleur service et est donc le plus attractif et ainsi de suite. Ce constat est désormais bien connu et largement partagé. Ce sont les conséquences qui m’intéressent ici.

« T’es un marché et t’as pas de concurrence ? Non mais allô quoi ! »

S’abstraire de la loi du choix, c’est un peu comme s’abstraire de la gravité. Au début, l’apesanteur c’est amusant. Cela ouvre des perspectives inattendues et spectaculaires, un sentiment de liberté primaire et profond. Puis vient le moment de l’adaptation : pas si facile de se mouvoir, de manger, de boire, de ranger des objets, bref d’avoir une vie normale. Pas si facile non plus de résister ; la moindre poussée peut vous envoyer durablement dans une direction. Enfin, on réalise que le corps humain n’est absolument pas adapté à l’apesanteur, qui cause de très graves dérèglements du système sanguin et de la structure osseuse, pouvant conduire à la mort.

Même chose pour les grandes plateformes. Au départ, c’est magnifiquement simple. Pas besoin de comparer, peser, changer : il n’y a pas d’alternative réelle ! Surtout que le service correspondant a en général apporté une petite révolution lors de son lancement : comment faisait-on avant, sans Google ou Amazon ? Puis à la longue, on essaie de vivre avec cette absence de choix, on tente de résister : les acteurs économiques qui utilisent ces plateformes pour accéder aux utilisateurs réalisent leur dépendance, et tentent de s’organiser ; les pouvoirs publics constatent des trous dans leurs réglementations, et essaient de combler les plus manifestes, etc.

Enfin, ce qui nous guette demain, dans un monde sans choix, c’est une atrophie systémique majeure de notre économie. Car derrière la loi du choix se cache la loi de la concurrence, fonction consubstantielle à l’économie de marché et à sa « main invisible ». Sans concurrence, moins d’incitation, et donc moins d’efficacité productive et allocative. Et en bon français ? Cela veut dire : (i) des services et produits qui ne servent pas assez l’intérêt de leurs utilisateurs et (ii) des facteurs de production – capital et travail – mal employés, créant rentes et chômage. Cela ne vous rappelle rien ? D’autant que les plateformes numériques ne sont pas juste un secteur économique sur le dysfonctionnement duquel on pourrait jeter un voile pudique ; elles sont l’équivalent des infrastructures de transport, d’énergie et de communication du XXIe siècle, sur lesquelles toute l’économie et la société numérique  – c’est-à-dire toute l’économie et la société – se construit.

Un signe qui ne trompe pas : presque chaque jour, on voit fleurir un nouveau débat sur la régulation du numérique. Comment empêcher la propagation des fake news ? Comment éviter les cyber-attaques géantes ? Faut-il réguler l’intelligence artificielle ? Ces débats sont évidemment utiles. Mais qu’en serait-il dans un marché concurrentiel, par nature plus propice à l’autorégulation ? Comment serait protégée la vie privée si elle devenait un facteur de concurrence entre les acteurs ? Quels seraient les risques de sécurité sur des infrastructures plus distribuées ? Il est normal que notre attention se porte sur les symptômes, mais cela ne doit pas nous faire oublier les causes profondes de ces dysfonctionnements, parmi lesquelles l’absence de concurrence réelle figure à mon sens en très bonne place.

Retour sur terre : les joies de la gravité

Entendons-nous bien, les autorités publiques qui sont chargées de promouvoir la concurrence en Europe ne sont pas en cause, au contraire. La commissaire européenne à la concurrence, Margrethe Vestager, se montre résolue à condamner les abus de position dominante des grandes plateformes et les pratiques fiscales déloyales de certains pays. En France, l’Autorité de la concurrence a pris une décision importante sur Booking avec ses homologues italien et suédois. S’il faut saluer cette mobilisation, il reste que le droit de la concurrence ne condamne que les comportements extrêmes et n’interdit pas la domination économique en elle-même. Au mieux les autorités de concurrence peuvent-elles faire en sorte que les géants en place « n’en rajoutent pas ».

Pour agir de manière proactive sur les structures de marché – pour « créer » de la concurrence en somme –, il faut des « armes non conventionnelles ». C’est toute l’expérience acquise en Europe de l’ouverture à la concurrence des marchés des télécoms, de l’énergie et plus récemment du ferroviaire : avec des instruments comme le dégroupage, l’interconnexion et l’accès aux ressources rares, on a su accompagner des entrepreneurs et des projets industriels souhaitant développer des alternatives aux acteurs en place. Bien sûr, le numérique est une infrastructure virtuelle qui appelle des réponses adaptées, mais le cœur du problème est le même : lutter contre l’accaparement de ces effets de réseau par une poignée de géants qui empêchent le fonctionnement normal de la concurrence. Alors à quand un « livre vert de la libéralisation des plateformes numériques » comme il y en eut un sur les télécoms trente ans plus tôt ?

Aujourd’hui, le seul choix réel qui existe vis-à-vis des plateformes numériques, c’est la déconnexion. Est-ce le numérique que nous voulons : à prendre ou à laisser ? Nul ne devrait échapper à la loi du choix. Mesurons-en la gravité.

*Autorité de régulation des communications électroniques et des postes 

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Liens vagabonds : Amazon achète la Terre du Milieu, Altice descend aux enfers

A RETENIR CETTE SEMAINE

Amazon veut son propre « Game of Thrones » et mise des millions de dollars sur « Le Seigneur des anneaux« . Juste au cas où la version cinéma ne vous aurait pas suffi, Amazon transforme la saga en émission de télévision, probablement la plus chère jamais produite

Pendant ce temps, l’utilisation de la SVOD en France est en nette progression : on passe de 15% en 2016 à 21% des internautes qui utilisent la SVOD. Une progression notamment due au succès de Netflix. Les séries sont d’ailleurs le type de contenu le plus regardé par les Français. Près de 9 Français sur 10 connaissent au moins une plateforme de SVOD.

Descente aux enfers pour Altice : les valeurs en bourse plongent, le top management est remplacé, l’entreprise change de cap : à la place des acquisitions, la première préoccupation est désormais la réduction des dettesLa chute d’un géant des Télécoms

Channel 4 rejoint l’alliance européenne TF1, ProSieben, Mediaset dans la bataille contre le duopole Facebook et Google. 

Après les rumeurs de rachat par Disney d’une partie de la 21st Century Fox la semaine dernière, c’est au conglomérat télécom Comcast de vouloir acquérir les actifs TV de l’entreprise média.

3 CHIFFRES

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38% des entreprises déploient actuellement leur chatbot (infographie)

+40% pour le marché de la SVOD en France

25 milliards de dollars, 800 millions de colis… Alibaba et les chiffres hallucinants de sa « Journée des célibataires »

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Laisser les GAFA seuls maîtres de notre avenir ? Hum… Comment dire ?

Et si les GAFA n’étaient pas la solution, mais désormais plutôt le problème ?

En galopins, au début, ils amusaient ; en barbares, ensuite, ils étonnaient ; en monstres, aujourd’hui, ils effraient.

Et demain ? Demain, quand, omnipotents, sans contre-pouvoir, sans cadre éthique, plus puissants que des Etats, ils seront les seuls à posséder et maîtriser les bases des infrastructures du 21ème siècle, c’est-à-dire les données accumulées de milliards de personnes, les machines, les plateformes logicielles, les intelligences et les compétences pour en profiter, mais aussi la richesse …

Ces plateformes réussiront-elles à imposer leur vision du monde ? A rester cachées derrière des buzzwords, des avocats et des lobbyistes ? Ou est-ce déjà trop tard pour renverser la tendance et les ré-ancrer vers un bien commun décidé plus largement ?

Aujourd’hui, intimement imbriquées dans nos vies quotidiennes, ces firmes technologiques – déjà hégémoniques sur l’avenir de la culture et l’information — trustent aussi les tout premiers rangs des dirigeants les plus influents du monde et des groupes les plus riches et les plus puissants. Gigantesques, les nouveaux maîtres du monde continuent chaque jour de grandir en contrôlant les plateformes qui risquent de dominer nos sociétés dans les années à venir.

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En ligne, et de plus en plus dans le monde réel

Un monde « offline » où leurs actions sont désormais décriées de part et d’autre de l’Atlantique : vecteurs de radicalisation, de propagande, de racisme et de haine, y compris lors d’élections démocratiques, fortunes bâties sur la vente de nos agissements enregistrés chaque seconde pendant des années sans consentement éclairé, acteurs d’une société de surveillance, moteurs du renforcement des inégalités et de division de la société, siphonage des revenus des créateurs et des médias avec prise de contrôle de leur distribution, captation toujours plus grande de notre attention, sources de pollution mentale et d’addiction, invasion de notre domicile, … Sans compter des situations de monopoles sur la publicité et le commerce en ligne ; le tout sur fond du culte du secret, de boîtes noires opaques, et de montagnes de cash.

Avec enfin le sentiment que ça va trop vite, que personne ne comprend vraiment comment marchent ces plateformes créées par une poignée d’ingénieurs et d’informaticiens qui ne semblent plus maîtriser l’ensemble.

Trop grands, trop puissants, trop négligents, trop longtemps ? Tous les empires ont une fin : à quand celui des GAFA ?

Le vent tourne en ce moment contre la Silicon Valley : conséquence de leur puissance accrue au fil des années, les empires de la technologie inquiètent ; le temps n’est plus pour la classe politique, même américaine, à se faire photographier benoitement à Mountain View ou Menlo Park près d’un baby-foot pour épater ses administrés. Bruxelles montre les dents, multiplie les enquêtes, impose de lourdes amendes ; les dirigeants des Gafa sont convoqués et auditionnés au Congrès américain. Certains se demandent même s’il faut les boycotter.

Ce ne sont pas là que des manœuvres corporatistes pour protéger les « incumbents » et un vieux monde incapable de se transformer : il faut y voir aussi une certaine objection de conscience numérique, et surtout des tentatives honnêtes pour rester au contact des leaders du nouveau monde numérique et ne pas les laisser seuls dans la construction de notre avenir.

L’incapacité des GAFA à empêcher la manipulation de l’opinion et leur sourde oreille à admettre leur implication dans la désinformation, leur rôle dans la destruction d’emplois liée à l’essor de l’automatisation, leur défiance envers les institutions, leur intrusion dans nos vies privées, sonnent le glas du laisser-faire vis-à-vis d’un problème devenu désormais structurel. Car nos vies sont devenues quasi indissociables d’eux au fur et à mesure de leur extension inexorable à de nouveaux marchés et de leur emprise – sans concurrents — sur nos sociétés.

Les outils traditionnels de régulation (taxes, anti-trust, …) semblent bien inadaptés pour maîtriser cette nouvelle puissance concentrée entre les mains de quelques-uns. Semblant intouchables, ils utilisent leur fortune à renforcer leur influence. Pas facile d’aller titiller ceux qui jonglent avec nos informations les plus secrètes, et qui sont en passe de créer et maîtriser les outils de l’intelligence artificielle, en passe peut-être un jour de surpasser l’humaine, et changer radicalement le marché de l’emploi.

Champions de l’optimisation et des paradis fiscaux, ces géants, pourtant si riches et si rentables, sont aussi accusés de ne pas prendre part au bien commun des sociétés par l’impôt et de ne pas savoir faire face à leurs nouvelles responsabilités sociales.

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Pas facile d’appliquer l’anti-trust quand les prix de leurs services restent bas ou gratuits, et de plus en plus addictifs. Nous ne sommes pas dans les Telcos, ennemis plus faciles et, en général, haïs. Ici, l’opinion publique tend à peine l’oreille à cette nouvelle colonisation numérique. Les GAFA restent immensément populaires en simplifiant la vie du consommateur qui continue d’utiliser massivement leurs services et appareils et de remplir leurs comptes en banque. Demain il préfèrera sûrement être soigné par eux !

Mais de qui parle-t-on ? Derrière l’acronyme, il faut, en fait, voir une quinzaine de sociétés : les firmes américaines Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft, mais aussi Netflix, Airbnb, Tesla, Uber ; les chinoises Tencent, Baidu, Alibaba, Xiaomi, Huawei ; j’ajouterais bien la japonaise Softbank, le coréen Samsung, et les russes Yandex et Vkontakte.

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Avec plus de 540.000 employés Amazon a désormais la taille d’un petit pays ! En trois mois, elle a ajouté 160.000 personnes à ses effectifs et doublé de taille en un peu plus d’un an. Au rythme de +30% par an, elle emploiera plus d’un million de personnes d’ici trois ans. Le groupe vend plus de 350 millions de produits différents en concurrence directe avec plus de 130 grandes firmes. Aux Etats-Unis, Amazon est devenu non seulement le principal magasin en ligne, mais aussi un intermédiaire crucial de la culture et du divertissement (livres, vidéos, …), de l’alimentation (Whole Foods) et depuis peu un majordome domestique, via ses nouvelles bornes intelligentes (Echo, Alexa…). Facebook compte deux milliards d’utilisateurs actifs, soit bientôt un tiers de la population mondiale, mais aussi un milliard sur WhatsApp et 800 millions sur Instagram !

Les progressions spectaculaires de leurs revenus et profits se font chaque trimestre à deux chiffres (et même d’un tiers pour Amazon!) : Apple a engrangé 11 milliards de dollars de bénéfice net au 3ème trimestre 2017 et Facebook 5 milliards ! Il s’agit bien de profit dégagé en 3 mois ! Leurs cours de bourse continuent de s’envoler (en hausse de 30 à plus de 50% en un an !) portant leur valorisation à des centaines de milliards de dollars chacune. Près de 3.500 milliards de dollars pour les 5 GAFAM. ! Dans le même temps, la 1ère firme Chinoise, Alibaba, accélérait et voyait ses revenus bondir de plus de 60% !

Monopoles, duopoles, positions dominantes  

Google, qui va doubler de taille en France, contrôle 90% du search en Occident, Facebook (et ses filiales Instagram, WhatsApp et Messenger) 80% du trafic social mobile, Amazon 45% du commerce en ligne, Microsoft 80% des ordinateurs ! Netflix représente 90% de la consommation de vidéo à la demande aux Etats-Unis.

Dominant la nouvelle « économie de l’attention », les réseaux sociaux donnent l’air du temps et définissent la nouvelle culture populaire, en décidant eux-mêmes ce que nous devons lire et regarder, quand, et comment, avec, il faut le reconnaître, une capacité de prédiction et de manipulation assez époustouflante.

Google et Facebook ont désormais une influence sur plus de 70% du trafic Internet et la majorité du trafic des sites d’infos dépend de ces deux plateformes (search et trafic social). Des tests effectués récemment dans six pays par Facebook ont montré comment un coup de tournevis dans l’algorithme pouvait priver des sites d’infos des trois quarts de leur trafic.

Résultat : Facebook, meilleur moteur de ciblage, et Google, meilleur moteur de recherche, ont pris le contrôle de la distribution des créateurs et des médias d’information.

Mais ils en refusent toujours les responsabilités : trop 20ème siècle !

Car Google, Facebook, Twitter ou LinkedIn se présentent comme des plateformes technologiques neutres, des hébergeurs, qui ne prennent pas de décisions éditoriales, ne produisent pas de contenus elles-mêmes, et n’emploient pas de journalistes. Elles estiment donc, contre toute évidence, ne pouvoir être donc assimilées à des médias, refusant d’en assumer les devoirs. Or non seulement, elles diffusent les contenus, qui informent bien ou mal les citoyens, mais elles vivent—grassement on l’a vu —de la pub qui y est associée.

 Google (75.000 employés) et Facebook (20.000), se sont donc incroyablement enrichis à partir des contenus créés par d’autres, en sachant surtout distribuer ceux que les gens aiment. Sans respecter aucun standard journalistique, ces groupes sont devenus les points d’entrée quasi-automatiques vers les médias, des kiosques mondiaux de l’information, où tout producteur de contenu doit désormais passer pour profiter un tant soit peu de la pub en ligne.

A tel point que Google, après avoir pris de haut les éditeurs pendant des années, s’apprête à leur lâcher du lest, c’est-à-dire des sous ! Mais le secteur de la musique attend toujours une juste rémunération de YouTube, bien plus radin qu’Apple, Spotify ou Deezer ; et surtout le fossé technologique entre médias historiques et les GAFA ne se réduit pas. Au contraire !

 Aujourd’hui, ils veulent tous aller encore plus loin dans les secteurs culturels en investissant des milliards de dollars dans les séries, le cinéma, la télévision, les jeux vidéo, l’e-sport, et bien sûr toujours la musique.

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Ces machines à cash deviennent aussi une menace pour l’économie du web et sont en train de tuer les start-ups.

 Forts d’années de maîtrise des données sur les comportements du public, Google et Facebook, qui offrent les solutions de ciblages des consommateurs les plus performantes, sont désormais en position de duopole sur la pub en ligne, loin devant toutes les autres régies publicitaires mondiales.

Accusés d’abuser de leur position dominante, ils verrouillent agressivement, grâce à leur puissance financière et technologique, leur avance par des pratiques jugées souvent anti-concurrentielles. Derrière un buzzword et des slogans hippies (don’t be evil, do the right thing, connect the world, …), ils pratiquent la forme la plus brutale du capitalisme moderne, empêchant notamment la redistribution des effets bénéfiques de l’économie numérique (effets de réseau, …).

Désormais en position de force, ils rachètent des sociétés à tour de bras et empêchent l’arrivée de nouveaux entrants, parfois en copiant purement et simplement leurs produits. Même Snapchat a du mal face à Facebook. A tel point, que l’âge d’or des start-ups pourraient bien toucher à sa fin d’autant que la nouvelle vague technologique qui émerge (intelligence artificielle, voitures autonomes, réalités altérées, crypto-monnaies virtuelles, …) favorise les grosses firmes qui possèdent déjà les données et la puissance informatique. Devinez qui !

En contrecoup, ils provoquent même un rejet du lexique à la mode il y a peu : qui veut encore parler, sans grimacer, de disruption, de plateformes, d’exponentiel ou de passage à l’échelle ? Et ce n’est plus si cool désormais de travailler pour Facebook ou Uber !  

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 Démocraties « trollées » : des plateformes champs de bataille

Mais c’est surtout du côté de leur nouvelle et vaste influence politique, lié à leur fonctionnement, et d’accusations de menaces sur les démocraties que les plateformes, sourdes et incapables de s’autoréguler, ont refusé de voir venir monter cet automne les critiques et l’hostilité croissantes d’Etats qui se sentent impuissants.

Les réseaux sociaux, où s’informent jusqu’à 60% des Américains, n’ont non seulement pas su éviter les abus et la manipulation de leurs utilisateurs, mais ont, en plus, sur-joué leur instrumentalisation, et cherché, selon des experts, à dissimuler l’ampleur de l’infiltration de la propagande sur leur plateforme. Il a fallu pour cela les révélations de la presse, des universitaires et de think-tanks.

Avec la volonté évidente de déstabiliser les sociétés démocratiques, des Etats, des groupes, des intérêts, sont à la manœuvre sur leurs plateformes, avec des milliers d’experts actifs, qui tentent de contrôler ou de retourner les opinions, chez eux ou à l‘étranger, d’accroître les divisions, à la faveur de bulles d’informations polarisées, de chambres d’écho, d’opinions unilatérales ultra-partisanes, favorisées par les algorithmes des géants du web qui renforcent nos convictions.

Avec les réseaux sociaux, nul besoin d’un émetteur unique ou d’un seul message de propagande. La multitude, les réseaux et le ciblage font le travail. L’industrie des travailleurs du clic pourrait bien devenir l’outil de propagande le plus efficace de notre histoire. La démocratie semble être ainsi à la merci de quiconque possède des données et un peu d’argent. Ajoutez quelques compétences techniques, de l’humour, de l’outrage et de la provocation. Ça fonctionne !

A l’insu du plus grand nombre, une propagande multiforme personnalisée en temps réel a bouleversé l’élection présidentielle américaine (40% de la population exposée) et le référendum sur le Brexit, via des publicités politiques ciblées, notamment sur Facebook ; des photos truquées et des rumeurs colportées par les réseaux sociaux ont aussi alimenté les tensions en Inde, au Soudan ou en Birmanie, ou encore aux Philippines, en Allemagne, Espagne, mais aussi en France pendant la campagne présidentielle.

Nous allons tous désormais chercher les réponses à nos questions dans Google, nouveau détenteur de la vérité, mais sur mobiles, ce sont Facebook et WhatsApp qui sont souvent devenues les principales sources d’informations dans certains pays, devenant de facto l’agora, où s’entremêlent faits, rumeurs, infos bidons dans un déluge de bruit, d’un vacarme assourdissant où sont privilégiées les émotions, et où s’entremêlent vérité et propagande en ligne.

La vérité, ainsi malmenée, y est de plus en plus difficile à discerner. D’autant que les frontières classiques entre information et commerce s’y effacent dangereusement sous la pression du clickbait. A l’inverse de la télévision, des radios et des journaux, les GAFA ne sont pas soumis aux règles en matière de publicité électorale.

Twitter, qui a véhiculé des armées de bots qui ont pu déstabiliser l’opinion, vient de décider de ne plus diffuser de publicités émanant de médias financés par le Kremlin, comme Sputnik et Russia Today, avec qui, pourtant, elle avait préparé de minutieuses campagnes d’action. Les GAFA servant désormais de consultants numériques pour des campagnes politiques ciblées grâce à leurs données !

A cela s’ajoute le cyber-harcèlement, parfois l’incitation à la haine et le complotisme de trolls submergeant l’utilisateur qui, en toute impunité, peut devenir la cible de menaces, voire de campagne de lynchage. Et les enfants ne sont pas épargnés, notamment sur YouTube.

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(Fausse pub Facebook)

L’ironie c’est que ces plateformes (Facebook et Apple en tête), dirigées par des libertariens pas toujours à l’aise avec la démocratie représentative, sont les premières à censurer des contenus à l’aune de critères arbitraires, et souvent discutables (nudité par exemple), en ayant comme unique modèle les valeurs de la côte ouest américaine (on se rappelle encore la photo de la petite fille brûlée au napalm retirée par Facebook).

Elles sont évidemment aussi les premières à nous suivre partout, enregistrant chaque fait et geste de nos vies en ligne qui n’ont, semble-t-il, plus de secrets pour elles. Plus inquiétant : grâce à elles, les marques elles-mêmes peuvent désormais aussi nous traquer. Et Facebook en est même à réussir à identifier toutes les personnes que vous avez pu rencontrer !

Cette surveillance croissante et cette perte de contrôle et d’info sur la gestion de nos données très personnelles, dont la valeur est désormais cruciale, — et que l’on doit donner aujourd’hui gratuitement et sans conditions (CGU) — préoccupent de plus en plus. D’autant qu’elles ne sont jamais réciproques. Avant d’entrer dans les locaux de ces jeunes firmes au fonctionnement obscur, il vous faudra d’ailleurs toujours signer un document légal (NDA /non disclosure agreement) vous faisant jurer que vous ne raconterez rien. La confiance règne !

Drogue numérique : persuasion, addiction et manipulation de l’attention

 Dans un tel contexte, l’effet de l’utilisation de leurs services sur nos comportements, est d’autant plus problématique, quand on sait par exemple que les millenials touchent leur mobile plus de 2.500 fois par jour !

Très comparables aux machines à sous, les réseaux sociaux nous rendent accros aux rafraîchissements imprévisibles, intermittents, de contenus plaisants, et aux shoots narcissiques de dopamine provoqués par l’approbation recherchée des tiers, via les « Like », ❤,RT et notes.

La captologie et l’hyper connexion compulsive règnent en maître puisque les GAFA doivent, pour gagner plus d’argent, nous enserrer le plus longtemps possible dans leur toile. Des milliers de designers y œuvrent activement. Cet abus manifeste de notre attention favorise la manipulation, et détériore – nous le voyons tous– notre capacité de concentration, même si quelques gros malins veulent faire croire avoir maîtrisé le multitasking.

D’ailleurs nombreuses sont les anecdotes dans la Silicon Valley montrant comment les patrons de la tech empêchent leurs propres enfants d’y avoir accès ! Même le créateur du bouton « Like » sur Facebook a installé un contrôle parental sur son dernier iPhone pour s’empêcher de télécharger des applis ! L’ancien co-fondateur de Facebook, Sean Parker, regrette même d’avoir aidé à construire un monstre qui abuse de la vulnérabilité de ses utilisateurs.

Le futur aussi ! Les prochaines étapes de cette domination se dessinent sous nos yeux. Et là aussi : « winner takes all ! », avec … les mêmes !

A commencer par le divertissement, les séries, les films, le sport, où chacun d’entre eux investit déjà des milliards de dollars, notamment dans la vidéo. Après Netflix et Amazon, YouTube a ainsi pris possession du téléviseur où son visionnage a bondi de 70% en un an.

Mais ce sont désormais vers les nouvelles formes de loisirs qu’il faut regarder  

L’e-sport, pierre angulaire d’une culture contemporaine interactive avec bientôt 500 millions de fans, est devenu un des terrains de jeu favoris des géants du web américains et chinois : Amazon possède Twitch, Facebook a lancé Gameroo, Google YouTube Gaming et Tencent Riot/League of Legends.

Le secteur des réalités altérées et des médias immersifs (réalité virtuelle, réalité augmentée) est également la cible de leurs investissements massifs. Tous y multiplient les dépôts de brevets et les expérimentations en attendant une adoption grand public qui devrait passer d’abord par le mobile, avant sa disparition et son remplacement par une informatique ambiante (où la reconnaissance faciale de Facebook est déjà meilleure que celle du FBI) qui signera la fin de tout jardin secret et de nos vies privées.

La conquête de l’espace domestique est également en cours, au travers des box TV, haut-parleurs intelligents et autres écrans connectés, et de l’armada de caméras, microphones et serrures connectées destinées à nous rassurer – et nous espionner.

 Et bientôt la santé ! Amazon, qui veut déjà les clés de chez vous, s’intéresse désormais aussi au marché des médicaments. Google entend séduire les grandes villes pour les aider à extraire les données des habitants et leur offrir des services plus pertinents.

Et bien sûr et surtout autour du potentiel de l’intelligence artificielle (IA), grand défi de notre époque.

Quasi seuls maîtres à bord pour exploiter les avantages de l’IA, les GAFA et leurs homologues chinois alignent tous leurs efforts pour tout faire dans les années à venir pour mettre de l’IA partout. Y compris pour saigner à coup de salaires mirobolants les universités des meilleurs de leurs chercheurs.

Car leur puissance est assise sur leur énorme avance prise dans le domaine clé de la collecte et du traitement des données personnelles, nouvel actif clé du siècle, qui leur permet d’être beaucoup plus performant soutenus par le machine learning et le deep learning pour alimenter l’essor de cette prochaine grande révolution technologique.

Autre avantage déterminant : ils possèdent désormais le plus grand nombre d’ordinateurs capables de traiter ces données. Le risque est donc de voir une nouvelle petite élite dirigeante posséder et maîtriser, hors contrôle, les infrastructures de base de notre époque.

Enfin n’est-il pas problématique à terme à voir de telles entreprises accumuler un tel niveau de richesses – dont elles ne font rien si ce n’est racheter tout concurrent qui pourrait les détrôner – au point de devenir plus puissants que les Etats et de pouvoir s’offrir les meilleurs avocats pour défendre leurs causes ?

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Démocratisation de la prise de parole publique et beaucoup d’autres bonnes choses

Evidemment, pas question pour nous de revenir en 1992.

Sans aucun doute, les GAFA nous ont grandement facilité l’accès à l’information, à la connaissance, à la culture, et ont accru les moyens de communiquer tout en permettant à un nombre infiniment plus important de voix de se faire entendre. C’est précieux et sans équivalent depuis la démocratisation de la lecture sous Gutenberg.

Grâce à leur agilité, leur créativité et leur maîtrise des environnements numériques, ils ont permis l’apparition de services performants et peu onéreux, tout en brisant l’ordre établi, mettant fin à de nombreuses prébendes du passé. Traquant l’inefficacité des vieux bastions, ils ont montré aux Anciens l’importance de l’innovation et de la prise de risque.

Ils ont suscité de nouveaux usages et redonné beaucoup de pouvoir au public, et donc fait la démonstration de l’importance de le connaître et de converser avec lui, ce que les médias traditionnels négligent trop souvent, voire même prennent de haut. Ils les ont aussi forcés à fabriquer du contenu de meilleure qualité.

La médecine et l’allongement de la vie attendent également de grandes avancées des nouvelles technologies. Ce n’est pas négligeable.

Mais nous ne sommes pas comme au 19ème ou au 20ème siècle en train de passer d’un monde stable à un autre. Nous sommes dans une dynamique fluide sans boussole où croît l’angoisse face à la technologie et où l’homme doit mieux comprendre ce qu’elle peut faire et ne pas faire.

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Quelles solutions ? Quels contre-pouvoirs ?  

 Que faire alors pour recréer les conditions de la confiance numérique à l’ère des plateformes ?

Nous le disons depuis 2014 : très rares sont les rédactions équipées pour aller regarder sous le capot des GAFA. Seuls quelques universitaires commencent à s’y aventurer. Il faut des logiciels, des algorithmes, des experts des données pour tenter d’y voir plus clair dans ces asymétries informationnelles. Il faut aider les start-ups qui travaillent dans la génération automatique de données (et non sur celles des utilisateurs), et les équipes qui développent des algorithmes capables d’auditer d’autres algorithmes.

Encourager aussi davantage l’open source et les systèmes décentralisés (blockchain, pair à pair,…) comme une réponse à leur hégémonie et la recherche sur le rétro-design de l’attention.

Les géants du web ont toujours agi plus vite que les cadres législatifs — –- mieux vaut s’excuser que de demander la permission –, se moquant même de leur archaïsme et profitant sans vergogne de l’inefficacité des outils juridiques à répondre à leur complexité comme à leur perpétuelle rapidité d’évolution, mais aussi de l’incompétence numérique des classes dirigeantes politiques.

Ces dernières, de plus en plus incapables de donner une vision probante de l’avenir ou même seulement de répondre aux défis actuels, notamment de l’innovation technologique, sous-traitent des champs entiers des affaires publiques aux GAFA, qui, eux, ont une vraie idée de notre futur.

Comment alors créer une gouvernance démocratique des ressources technologiques ? Notamment en Europe, où on ne compte plus un seul groupe dans les 20 premières firmes internet et technologiques mondiales (contre 5 en l’an 2000 !). Surtout, quand promettant de faire la police eux-mêmes en toute opacité, les GAFA, qui évidemment privilégient profits et actionnaires, tentent de résister à de nouvelles lois plus contraignantes, qu’ils jugent – avec arrogance et non sans raison – toujours aussi dépassées. Le système peut-il encore s’auto-réformer comme le pense Elon Musk, notamment dans le domaine de l’IA ?

Des pistes sont, en tous cas, entrevues.

Elles passent évidemment par la reprise à ces nouveaux monopoles naturels, de la possession et du contrôle de nos données, nouveaux actifs clés de l’époque. En créant peut-être des tiers de confiance pour nos données, en régulant et sécurisant leur partage et leur circulation, ou même en considérant la donnée comme du ressort du domaine public ou de la propriété individuelle, disponible alors via une licence.

Un premier pas sera fait en Europe avec la GDPR, qui bouleversera profondément le paysage de la publicité programmatique, aujourd’hui manne des Gafa.

Mais aussi par rendre des comptes pour mettre fin à l’incroyable asymétrie dans la surveillance : les forcer à être plus ouverts, moins secrets (vous me traquez, je vous traque !), plus concurrentiels (en ne confiant pas toutes ses données à une seule plateforme). Plus encore qu’un devoir de loyauté, leur imposer – ô naïveté ! — une certaine transparence des systèmes algorithmiques, en tous cas de les forcer à les concevoir responsables « by design ». La transparence accrue aussi sur les émetteurs d’information pour renforcer la confiance, comme une labellisation efficace des infos bidons identifiées.

D’autres sont plus radicales.

Londres songe ainsi à modifier leur statut légal pour les classer enfin en éditeurs, avec les responsabilités associées. Berlin impose depuis peu de lourdes amendes sur les discours attisant la haine. Bruxelles voudrait aussi légiférer pour mieux contrôler les contenus. Les plateformes affirment qu’il serait trop cher de faire la police des contenus, mais ils le font déjà si efficacement pour la nudité !

Pour mettre fin à l’autre grande asymétrie (celle de leur position concurrentielle) faut-il, comme nombreux sont ceux qui le réclament, les morceler, les forcer à vendre certaines activités, mieux contrôler leurs futures acquisitions et les contraindre à moins valoriser le clickbait, voire à réorienter leur modèle d’affaires ? Le rejet croissant de la pub peut-il favoriser la fin du tout gratuit, peut-être le péché originel d’Internet ?

D’autres formes de « guérilla numérique » peuvent-elles apparaître, par exemple en abreuvant les plateformes de fausses données personnelles et en cherchant à perturber leurs algorithmes ? Ou faudra-t-il revenir sur l’anonymat ?

Travailler vite à un nouveau droit de la concurrence plus adapté et réactif ? (actuellement le temps de constater une position dominante sur un marché numérique, celui-ci s’est déjà métamorphosé)

Les réguler comme des services publics pour qu’elles se comportent dans l’intérêt du public ? Créer des communs numériques plus pertinents dans ce nouveau monde pour le monde de la culture ?

Nommer, comme le Danemark cette année, un ambassadeur numérique pour négocier avec eux ?

Créer une agence européenne pour la confiance dans l’économie numérique, comme le souhaite la France ?

Du côté des médias traditionnels, dont la crédibilité est certes aussi dévalorisée, notamment suite à leur manque de stratégie, on sait qu’il est devenu critique de pouvoir exiger de ces plateformes plus de données, davantage de monétisation et de tout faire pour enrayer ensemble le phénomène délétère des fake news.

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Un coup de main beaucoup plus convaincant serait aussi bienvenu dans l’indispensable éducation du public aux médias destinée à susciter davantage son esprit critique, pour l’informer sur les dangers de la désinformation, pour lui apprendre à mieux s’informer et à reconnaître la propagande, comme à mieux se comporter sur les réseaux sociaux.

Le web n’est en tous cas plus du tout le même qu’à ses débuts, il y a plus de 20 ans : un espace libre, ouvert et décentralisé de publication et de consommation multilatérale d’informations. Il est clairement dominé par une poignée de géants où se sont concentrés richesse et pouvoir, et qui ont beaucoup de mal à rendre des comptes d’un business basé sur la surveillance.

Le désenchantement vis-à-vis de la fin de l’agora 2.0 est perceptible. Pire : certains craignent déjà de le voir disparaître corps et bien, remplacé par des expériences virtuelles propres à chaque plateforme (e-commerce, interactions sociales en réalités altérées, …) dans un Trinet (Google, Facebook, Amazon).

Faudra-t-il passer par un exercice « Vérité et Réconciliation », à la sud-africaine, pour se reconnecter avec ces plateformes ?

Les acteurs d’Internet étaient pourtant censés éliminer les corps intermédiaires sclérosés (maisons de disques, studios de cinéma, télés, …). Ils l’ont fait, mais … en prenant leur place ! Sans rétablir la confiance et en rajoutant du bruit et des problèmes. Ne laissons pas tous seuls les ingénieurs, designers et community managers aux commandes ! Les données ne sont pas neutres : il y a des humains derrière le code !

Si on voit bien ce que les GAFA apportent à chaque individu, il est plus difficile de discerner leurs apports positifs aux sociétés et la manière dont on pourrait les ramener au bien commun. Un bien commun intégré, enchassé (« embedded ») dans leur action. Faudra-t-il attendre de voir Mark Zuckerberg à la Maison Blanche ?

Rêvons un peu ! Et d’abord à un vrai débat avec eux sur ce bien commun et leurs responsabilités éthiques envers une société dont ils savent et possèdent déjà beaucoup. Et si – sans privatiser l’action publique – ces géants s’attaquaient enfin concrètement aux grands problèmes sociaux de l’heure avec leurs énormes ressources financières et leurs vastes compétences technologiques ? Comme la mise à niveau d’une éducation enfin adaptée à l’époque, la réduction des inégalités, le sauvetage des systèmes de santé, la régulation des flux migratoires, l’aide aux sans-abri, l’optimisation des services publics, la réinvention des solidarités, ou même la lutte contre le changement climatique, …

Mais aujourd’hui elles semblent préférer vendre des mots clés à Carrefour, nos préférences à Toyota et notre fil d’actualité à Poutine !

Ne nous reste-t-il alors plus qu’à supprimer les applis Facebook et Twitter de notre mobile et à défendre notre liberté d’attention aussi chèrement que la liberté d’expression ?

Eric Scherer

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PS : nous développerons ces sujets dans notre Cahier de Tendances Méta-Media N°14, Automne – Hiver 2017 2018 , avec de nombreux témoignages et analyses d’experts et comme toujours notre sélection des meilleurs livres qui en parlent.

Le cahier sera disponible ici, sur Méta-Media en PDF gratuitement début décembre.

 (Illustration de couverture : Jean-Christophe Defline)

 

 

 

Liens vagabonds : nouveau design, nouvelles fonctionnalités, les plateformes se refont une beauté

A RETENIR CETTE SEMAINE

Snapchat a publié ce mercredi ses résultats du troisième trimestre, marqués par un chiffre d’affaires inférieur aux attentes et une perte de 443 millions de dollars, l’entreprise continue son ralentissement. Pour reconquérir son public, elle annonce un redesign complet de son appli pour décembre et place son espoir sur l’algorithme. Objectif: devenir moins confidentiel, et plus accessible aux adultes. Les principaux changements. Les jeunes, vont-il déserter Snapchat

Twitter généralise les 280 caractères. Mais il y aurait eu d’autres manières de le faire sans sacrifier sa marque de fabrique ! Il lance aussi une version payante avec une fonction de sponsoring automatique du compte et des tweets. Avec 280 caractères, on peut aussi jouer !

Messenger présente des nouvelles fonctionnalités : arrivée de l’assistant M, messages sponsorisés, plugin de messagerie instantanée pour tous les sites, intégration directe d’un outil d’analyse du langage naturel (NLP). Il est aussi possible d’envoyer de l’argent entre amis. Messenger, le nouveau WeChat Pay? 

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Changement de propriétaire : Disney pourrait racheter une partie de la 21st Century Fox, Apple dévoile 2 nouvelles séries originales dont une raflée à Amazon et Netflix, et Musical.ly, le YouTube des ados, qui revendique plus de 200 millions d’utilisateurs, est racheté par des Chinois pour 1 milliard de dollars. 

Paradise papers : Les milliards d’Apple sont à Jersey, un journal allemand adresse une lettre ouverte à Tim Cook

3 CHIFFRES

29% des postes de direction occupés par des femmes chez Apple – la parité a encore des progrès à faire !

60% des internautes préfèrent accéder au web via leur smartphone

pour 1 Million d’euros – Paris a remporté le prix de « Capitale européenne de l’innovation » en 2017


TOUTE L’ACTUALITE DE CETTE SEMAINE : 

FAKE NEWS / POST TRUTH

“MUST READ”

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A VOIR

SURVEILLANCE / CONFIANCE / WINNER TAKES ALL

facebook

NOUVEAUX USAGES, COMPORTEMENTS

DISRUPTION, REVOLUTION, DISLOCATION

BOTS, INTELLIGENCE ARTIFICIELLE, AUTOMATISATION, BIG DATA, MACHINE LEARNING

RESEAUX SOCIAUX, PLATEFORMES

STORYTELLING

podcasts-par-genre

PUB

JOURNALISME 2.0

EDUCATION

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OUTILS

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Retrouvez la sélection des outils Méta-Media sur jTools

ES avec Kati Bremme et Barbara Chazelle

 

Liens vagabonds : Facebook, Google, Twitter et l’autocontrôle – It’s Complicated

A RETENIR CETTE SEMAINE

Le Congrès sermonne Facebook, Twitter et Google au sujet des ingérences russes dans la campagne électorale. 126 Millions d’utilisateurs ont été touchés par une pub politique bidonFacebook a bien détaillé les profils pour mieux cibler les publicités. Twitter parle de 30.000 comptes russes et 1.4 million de tweets influencés. 8 moments clés de l’audience. Et 15 choses à retenir. Les engagements des géants de la tech sont faibles.

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Les géants de la tech, ont-ils vraiment le contrôle de leur produit ? Les réseaux sociaux, une menace pour la démocratie ?

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Malgré l’affaire russe, Facebook affiche + 80% de bénéfice net en 3 mois avec 5 milliards $, et + 50% de chiffre d’affaires en un an. Le prix moyen d’une publicité sur Facebook a augmenté de 35% au cours des trois derniers mois. Le succès insolent de Facebook devient problématiqueSuite aux accusations, Facebook investit massivement dans la crédibilité, et va doubler à 20.000 personnes son staff de surveillance des contenus suspects. Grâce à l’iPhone, Apple annonce de son côté 11 milliards $ de bénéfice net

Face à ses concurrents Netflix, Amazon et Apple, la BBC s’inquiète du financement de la création au UK. La Silicon Valley continue sa conquête irrésistible de la TV : YouTube TV se déploie et lance une appli sur les TV connectées ; Amazon Prime Vidéo s’étend sur le XBoxCôté Print, le NYT compense ses pertes de l’édition papier sur le numérique, avec des résultats qui s’envolent et 2,5 millions d’abonnés en ligne ; fidèles à la marque. Condé Nast suit la même tendance et coupe dans le print pour renforcer le numérique

Et Google rappelle cette semaine accidentellement au monde que tout contenu stocké dans le Drive est scanné par des algorithmes

3 CHIFFRES

81 millions $ – la somme que Donald Trump and Hillary Clinton ont dépensé en Facebook Ads

plus de 70% – du trafic Internet est influencé par Google et Facebook  

900 milliardsla valorisation qu’approche Apple grâce au nouvel iPhone

FAKE NEWS / POST TRUTH

téléchargement

“MUST READ”

work

A VOIR

SURVEILLANCE / CONFIANCE / WINNER TAKES ALL

NOUVEAUX USAGES, COMPORTEMENTS

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DISRUPTION, REVOLUTION, DISLOCATION

360° / REALITE VIRTUELLE / REALITE AUGMENTEE

BOTS, INTELLIGENCE ARTIFICIELLE, AUTOMATISATION, BIG DATA, MACHINE LEARNING

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RESEAUX SOCIAUX, PLATEFORMES

NOUVEAUTES

HOLLYWOOD

JEUX VIDEO / eSPORT

JOURNALISME 2.0

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OUTILS  

 

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Liens vagabonds : démonstration de force des géants de la tech

A RETENIR CETTE SEMAINE

Les géants de la tech font une démonstration de force avec leurs résultats du 3ème trimestre. Depuis l’achat de Whole Foods, Amazon emploie 540 000 personnes (soit 7 fois plus que Google). Les ventes du géant sont en hausse de 34 %, et Jeff Bezos devient à nouveau l’homme le plus riche du monde. Porté par la publicité, le chiffre d’affaires de Google fait un bond de 24% pour un profit net de 7 milliards $ ; L’action à un nouveau record au dessus de 1.000 $; Twitter redresse la barre en réduisant nettement ses pertes. Où est le problème ?

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La Silicon Valley conquiert la TV : YouTube est en train de s’imposer sur les écrans TV, et Facebook compte bien diffuser du sport en direct, avec comme argument de vente ses Facebook Live accessibles aux millions d’inscrits. Même LinkedIn pourrait se mettre aux contenus vidéo originaux. Netflix emprunte 1,6 milliard $ pour soutenir la création de contenus. 

En attendant, les éditeurs ont d’urgence besoin d’un modèle économique avec les plateformes. Google va enfin partager des revenus pendant que Facebook teste les abonnements payants à Instant ArticlesAu même moment, Facebook a semé la panique avec le test d’un newsfeed qui privilégie contenus sponsorisés et amis – un taux de reach divisé par deux pour les médias. Il dément vouloir industrialiser cette version et en profite pour publier les guidelines de son newsfeed actuel. Pour les éditeurs européens, Facebook est déjà un désastre.

Bonne nouvelle pour les fans de football : tous les matchs de la coupe du monde de foot de 2018 seront diffusés en 4K HDR.

Et Sophia, qui voulait détruire le monde, devient le premier citoyen robot.

3 CHIFFRES

100 millions – le nombre d’heures / jour de consommation vidéo YouTube depuis une TV

26 milliards de nouveaux téléchargements d’applis au 3ème trimestre, un record

43,5 % – la part de marché d’Amazon dans les achats de biens et services en ligne

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TOUTE L’ACTUALITE DE CETTE SEMAINE : 

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ES avec Kati Bremme et Barbara Chazelle