Liens vagabonds : les barbares veulent les sous de la télé

A RETENIR CETTE SEMAINE :

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“MUST READ”

A VOIR

Avez vous peur des robots intelligents ? (infographie)

Si Twitter avait existé quand l’homme a marché sur la lune : 


SURVEILLANCE vs. CONFIANCE

NOUVEAUX USAGES, COMPORTEMENTS

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DISRUPTION, REVOLUTION, DISLOCATION

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MONDIALISATION

MOBILITES / WEARABLES :

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ROBOTS, INTELLIGENCE ARTIFICIELLE, AUTOMATISATION, BIG DATA, MACHINE LEARNING

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NOUVEAUTES

REALITE VIRTUELLE / REALITE AUGMENTEE

SMART TV / STREAMERS / VIDEO / MULTI-ECRANS :

NETFLIX

RESEAUX SOCIAUX, SOCIAL TV

HOLLYWOOD :

 

JEUX VIDEOS / eGAMING

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STORYTELLING :

MUSIQUE

PUB

JOURNALISME 2.0

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EDUCATION

OUTILS

 

Et si la réalité virtuelle avait démarré cette semaine ?

Et si la réalité virtuelle (VR) avait vraiment démarré cette semaine ? Plusieurs initiatives en témoignent. Mais, attention, pas de panique : cette techno impressionnante de visionnage immersif n’en est qu’à ses tout débuts grand public. Un peu comme à l’époque du téléphone portable à clapet : cool, mais encore très loin de l’iPhone !

Le New York Times et YouTube se lancent

Les pièces de ce nouveau média sont en train de se mettre en place. Après avoir distribué gratuitement 1 million de lunettes de réalité virtuelle en carton qui arriveront dimanche chez les abonnés, le New York Times a lancé jeudi une appli avec l’intention d’y ajouter chaque mois du contenu, surtout documentaire. 

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Le même jour, Google, qui entend démocratiser la VR, annonce que YouTube va désormais supporter les formats de vidéos en VR et un dispositif pour voir toutes les vidéos YouTube à travers le cardboard VR de Google.

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Depuis mars dernier, YouTube propose aussi de regarder des vidéos 360° sur son player.

L’agence de presse américaine Associated Press (AP) est arrivée cette semaine également dans la réalité virtuelle avec un film sur la jungle de Calais.

Hollywood s’y met rapidement et à Dublin cette semaine, au Web Summit annuel, une bonne partie des nombreuses conférences et démos proposées aux 40.000 participants portaient sur l’essor attendu de ce média réellement nouveau. Les queues étaient longues pour tester les dispositifs, notamment chez Facebook.

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Avec la réalité virtuelle disparaît l’écran rectangulaire de la télévision, du cinéma, de l’ordi, et même du smart phone tenu à distance. L’image est tout AUTOUR de vous. Une vidéo sphérique, diffusée sur un écran infini, sans séquences de plans. L’expérience est incontestablement plus forte que de regarder une vidéo classique. C’est une vraie machine à empathie ! Certains parlent de médium ultime.

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Stratégies différentes pour la vague d’après les réseaux sociaux

La bataille s’annonce énorme, les sommes investies faramineuses. Et déjà les technos incompatibles ! 

Tous les géants travaillent à cette nouvelle vague, celle de la « vision informatisée« , avec des stratégies différentes : ceux qui mettent en avant le hardware (Facebook et l’Oculus Rift, Sony et sa PlayStation, …) qui pourrait fonctionner en direct, et ceux qui misent plutôt sur les téléphones portables (Samsung Gear, Google Cardboard, NYTimes, … ) avec des vidéos pré-enregistrées et asynchrones. D’autres solutions hybrides émergent.

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HTC, GoPro, Vice News y travaillent; Apple est toujours en embuscade et Microsoft parie, avec Hololens, sur la réalité augmentée, qui enrichit le réel, alors que la réalité virtuelle, rompant votre cerveau, vous télé-transporte et vous met, elle, au centre d’un autre monde. Avec un simple carton et un portable !

Ces technos et leur mode émergeant de narration, qui bouleversent notre perception actuelle de la réalité, vont toucher, après les jeux, de nombreux secteurs, dont l’info, la pub, l’éducation, le tourisme, la médecine, les sports, la musique, la fiction.

L’appli VR NYT (iOS et Android) propose déjà 5 contenus, dont un reportage sur les déplacés et une promenade dans New York avec l’artiste français JR. Il est possible d’en profiter à 360° sur desktop.

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Les spectacles vivants sont aussi impactés. Avec la VR, le Cirque du Soleil met ainsi déjà l’audience sur scène.

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« Vous pouvez être sur scène avec Paul McCartney », s’enthousiasme le patron de la plateforme de captation et de montage en VR, Jaunt, qui se présente comme le Netflix de la VR, et travaille déjà avec Disney, proSieben, Springer.

La réalité virtuelle, média d’évasion comme la lecture, la télé ou le cinéma, jouera aussi un rôle important dans l’essor de l’Internet des objets, l’Internet Industriel, dont elle pourrait bien devenir l’une des premières couches contenus importantes.

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Quelle durée d’adoption ?

Le patron de CBS Interactive, Jim Lanzone, s’attend à un phénomène très important, notamment dans le sport. Mais il prévoit une durée d’adoption de 5 à 10 ans. Mark Zuckerberg prévoit aussi à une période longue de prise en main pour l’Oculus qui devrait être lancé pour les fêtes, mais il y voit la prochaine grande plateforme informatique.

D’autres voient cela arriver plus vite, grâce aux mobiles : « dans deux ans, ce sera aussi simple que filmer avec votre iPhone », assure Jacques Methée, patron média du Cirque du Soleil.

Tout n’est pas rose pour autant, les défis techniques restent importants. Le travail de post-production est titanesque, car la VR pose avant tout un énorme problème de traitement de données par algorithmes. La qualité d’image n’est pas encore au rendez-vous sur les téléphones portables où les pixels sont encore trop visibles. Les caméras restent chères, même s’il est possible d’assembler une série de GoPros. Des nouvelles caméras apparaissent, comme celle de Lytro ou Jaunt :

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Les contenus de qualité sont encore rares : il faudra donc apprendre à raconter des histoires en VR, développer une nouvelle grammaire, et notre imagination. Et même physiquement présent avec d’autres, l’expérience, même interactive, ne peut pour l’instant être partagée. Le principal modèle d’affaires évoqué à Dublin pointe pour l’instant sur un mode premium de type SVoD.

La réalité augmentée, média de transfert de connaissances, devrait être plus lente encore à se développer. D’ici deux ans, la communauté des développeurs devrait déboucher sur des premières solutions « good enough », à la Leap Motion.

Mais à terme tout le monde espère déboucher sur le graal : une paire de lunettes traditionnelles non intrusives. Le cas échéant, toute l’électronique grand public pourrait basculer. Qui aurait intérêt alors à quitter son logement, aller au travail, voyager ?

 

 

 

Esport / jeux vidéo : vraiment tout sauf virtuels !

A regarder de près le monde étrange des « gamers« , cette semaine Porte de Versailles, impossible de ne pas admettre que cette activité n’a vraiment rien de virtuelle ! Elle est impressionnante, diverse, mainstream, et surtout très très physique !

L’intensité de l’engagement — presque médiéval– des joueurs, seuls ou en équipes, n’a rien à envier aux grands sports traditionnels. Agés de 20 à 25 ans, les champions — souvent gauchers!– y sont autant adulés et par des foules aussi nombreuses. Et, alors que la Paris Games Week ferme ses portes ce dimanche soir (307.000 entrées !!), on en vient presque à regretter que cette débauche d’énergie et d’enthousiasme ne soit mis au service du bien commun de la société !

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Nous venons de décrire pourquoi les médias devraient très vite se mettre à cette nouvelle culture populaire où le jeu vidéo prend une place considérable. Au sein de la commission Next Gen TV du Social Media Club nous avons cette semaine aussi tenté de découvrir un peu plus cet autre monde avec Matthieu Dallon (fondateur de toornament.com et de l’ESWC qui organisent les grandes compétitions d’eSport), Stéphane Vallet (de Wargaming, éditeur de World of Tanks) et Laurent Michaud (de l’Idate). 

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Quelques infos & chiffres pour mieux comprendre

Depuis 15 ans, Bercy et le Zenith font salle comble à chaque grand tournoi. Il y en a quasiment chaque semaine dans le monde. La France est pionnière avec les Etats-Unis, la Corée, l’Allemagne et la Scandinavie. Des dizaines de milliers de spectateurs paient plus de 30 € leur place pour admirer la virtuosité des champions de Call of Duty ou de League of Legends. Des millions d’autres regardent en direct en ligne.

Les audience web des finales de League of Legends — jeu inventé par ses joueurs– peuvent dépasser celles de la NBA à la télé ! Sur plus de 200 millions de fans, seuls 10% jouent vraiment; le reste sont surtout spectateurs !  Les codes sont mondiaux : le champion du monde FIFA est iranien; les jeux de stratégie sont dominés par les Asiatiques. 

Dans les cours de récréation des écoles des grandes villes, trop exigües pour jouer au ballon, les élèves s’amusent sur leur smart phones, via YouTube. Mais l’âge moyen des gamers est de 35 ans; en France de 29 ans. Et 30% sont des femmes. Partis de Paris, les bars eSport Meltdown, qui accueillent ces communautés, se multiplient en province.

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L’esport est un vaste mille feuilles encore très fragmenté. En ligne, Une seule plateforme écrase tout : Twitch.tv, rachetée il y a un an par Amazon au nez et à la barbe de Google. YouTube Gaming et Daily Motion viennent loin derrière, même si la plus grosse chaîne mondiale YouTube, celle du suédois PewDiePie, est consacrée aux commentaires de jeux vidéo en ligne et compte plus de … 40 millions d’abonnés.

Les droits ne sont pas encore bien organisés: les joueurs n’ont pas de statut et les grands éditeurs de jeux (propriétaires des logiciels et donc de la propriété intellectuelle) luttent avec les organisateurs de tournoi.

ESWC Call of Duty 2015 – Official Aftermovie from OXENT on Vimeo.

Mais les médailles de ne sont pas en chocolat ! 75 millions $ de prix ont été distribués cette année lors des grandes compétitions, dont certaines récompenses davantage qu’un tournoi de tennis de l’ATP. Les marques comment à suivre aussi : 250 millions $ de pub cette année, le double attendu fin 2017. 82% des jeux se font sur PC/mobiles contre 18% sur la télévision/consoles. Le jeu World of Tanks, créée par une firme biélorusse, et dont le quartier général européen est à Paris, compte 140 millions de joueurs sur PC, 35 millions sur tablettes et 6 millions sur Xbox One.

La France, un des tout premiers marchés hors USA, compte ainsi 10 millions de consoles de jeu de salon actives et environ 25 millions de joueurs, selon l’Idate.

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Les chiffres du Syndicat National du Jeu Vidéo : http://goo.gl/6k55De

Rapport de 2013 : 

Cette semaine, le gouvernement français s’est fendu d’une infographie — l »e jeu vidéo, une force pour la France«  — pour souligner l’importance du phénomène. Et même le journal Le Monde a du finalement se résoudre à en parler. C’est dire !

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TechCrunch vient aussi de retracer l’histoire du jeu vidéo depuis 1950.

Quelques liens

L’eSport

Le live gaming

Le jeu vidéo comme profession

Les compétitions de jeux vidéo

Le free to play

Qui sont les joueurs ?

La publicité dans le jeu vidéo

Quel avenir pour les jeux vidéo ?

Mais encore…

Quelques images de la Paris Games Week

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(Avec l’aide précieuse d »Eva Gomez et Pierre-Olivier Cazenave du Social Media Club France)

 

Liens vagabonds : l’essentiel de la semaine

A RETENIR CETTE SEMAINE :

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“MUST READ”

A VOIR

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ABUS DE POSITION DOMINANTE  – The winner takes all !

SURVEILLANCE vs. CONFIANCE

NOUVEAUX USAGES, COMPORTEMENTS

Capture d’écran 2015-10-28 à 17.24.54 Est-ce si mal ?

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DISRUPTION, REVOLUTION, DISLOCATION

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MOBILITES / WEARABLES 

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ROBOTS, INTELLIGENCE ARTIFICIELLE, AUTOMATISATION, BIG DATA, MACHINE LEARNING

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NOUVEAUTES

REALITE VIRTUELLE / REALITE AUGMENTEE

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SMART TV / STREAMERS / VIDEO / MULTI-ECRANS :

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NETFLIX

RESEAUX SOCIAUX, SOCIAL TV

HOLLYWOOD :

4K / U-HD

JEUX VIDEOS / eGAMING

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STORYTELLING :

 

PUB

JOURNALISME 2.0

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ELECTION US

EDUCATION

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Newsletters : retour vers le futur

Par Clara Schmelck, journaliste médias à Socialter, billet invité

Il arrive que le progrès technologique encourage le retour de vieux usages : loin d’envoyer la newsletter au musée des premières heures des médias en ligne, le basculement vers le mobile et la recommandation personnalisée algorithmique sont entrain de remettre au goût du jour le bon vieil e-mail périodique.

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Newsletter and Computer mouse with white background

« Une newsletter ? Et pourquoi pas une page de nouvelles envoyée par un pigeon voyageur ? ». Voilà ce qu’on entendait encore en 2012 dans les newsrooms d’ Europe et des États-Unis, toutes occupées à concevoir un jeu de nouvelles applis pour leur média.

Il faut dire que la newsletter numérique est un format hérité du « courrier d’information », l’ancêtre du journal papier popularisé au XIXè siècle. Ni print, ni web, ni mobile, elle semblait condamnée à ne plus paraître nulle part. Depuis peu, la newsletter fait pourtant l’objet d’une campagne de revivification dans un nombre croissant de grandes rédactions, en presse écrite comme en radio et télévision.

Alors, comment expliquer ce revirement ? Les newsletters de 2015 sont-elles les mêmes qu’il y a cinq ans ?

Éditorialisation et personnalisation

En 2013, l’extinction de Google Reader redonnait aux titres de presse le pouvoir du « veilleur de l’info ».

Daily Brief de Quartz, Vox Sentences de Vox, First FT du « Financial Times », The Brief de « Time Magazine » ont pris ce nouveau boulevard, ce qui leur permettait d’assoir leur marque, tantôt pour se donner le sérieux d’un grand média, tantôt au contraire pour rajeunir leur image et tenter d’attirer la génération Y.

A la grande différence d’un digest à la Google, ou d’une criarde newsletter commerciale, les newsletters des journaux scénarisent de plus en plus les contenus de curation.

Alors que la newsletter 2.0 ressemblait en tous points à un sommaire augmenté d’un bouton de call-to-action qui visait à augmenter le trafic vers le site, la lettre nouvelle génération renferme, en un espace restreint, la quintessence du média dont elle porte le message. Elle reprend, outre ses thématiques et certains de ses contenus, son ton, sa charte graphique, ses obsessions, même. En un mot, éditorialiser une newsletter revient à donner à respirer le parfum d’un média.

Pour être signée, une newsletter se doit d’être soignée. Dans cette optique, la lettre hebdomadaire de Books, parsemée de surprises, propose des photographies de qualité, des citations mises en exergue et commentées, des inattendus recherchés.
books La newsletter se situe en deçà de la logique du clic, car quel que soit le taux de conversion qu’elle génère, elle est un vecteur fiable de fidélisation : « Je ne me préoccupe pas de savoir si elle crée du trafic. », assure Ezra Klein, rédacteur en chef de vox.com, dont l’excellente newsletter quotidienne Vox Sentences s’appuie sur l’outil de personnalisation Sailthru.

La « personnalité » du journal, imprimée dans la newsletter, s’accorde d’ailleurs sans contradiction avec la personnalisation algorithmique : en conduisant régulièrement le lecteur vers des contenus en ligne susceptibles de l’intéresser, tout en lui offrant le luxe d’un supplément d’âme face à la surabondance d’information, la newsletter est le lieu de conciliation par excellence entre une marque média et sa cible.

A la recherche du temps perdu

Le lecteur, en effet, ne peut qu’apprécier qu’on lui ôte cette désagréable expérience de rater des événements, comme c’est le cas sur Twitter ou dans les méandres d’un site web.

En fait, la newsletter résout le paradoxe de Zénon d’Élée, repris par Bergson dans La pensée et le Mouvant : si la pluralité existe, elle doit être à la fois finie et infinie en nombre. Numériquement finie, parce qu’il y a autant de choses qu’il y en a, ni plus ni moins ; numériquement infinie, parce que deux choses sont séparées par une troisième, celle-ci est séparée par une autre, celle-ci est séparée de la première par une quatrième, de la deuxième par une cinquième, et ainsi indéfiniment. Tel est le flux de l’actualité.

Laurent Mauriac, cofondateur et ancien journaliste de Rue89, traduit : « Il y a de plus en plus darticles sur les sites dinfos, de réseaux sociaux, dalertes sur les mobiles Les sollicitations saccumulent et créent une impression doverdose. » En réaction, la newsletter revient à une historicité de l’information simplifiée, avec un début et une fin, et qu’on peut lire en entier sans consacrer trop de temps.

Romain Dessal explique avoir crée la newsletter Time to sign off (TTSO), une lettre qui rappelle l’actualité passée et anticipe sur celle à venir, sur la base du concept du fomo (fear of missing out), cette peur d’avoir manqué quelque chose. « Tous les soirs, recevez gratuitement par email : Ce que vous avez raté aujourdhui ; Ce que vous ne devez pas rater demain ; Quoi faire si vous navez pas envie de dormir » persuade TTSO, qui revendique à ce jour plus de 43.000 abonnés à travers le monde. En variant la mise en page avec plusieurs visuels (photos, infographie, logo, icône) , la newsletter permet de garder l’internaute éveillé et l’aide à comprendre en un coup d’œil ce qu’il lui faut retenir.

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Bref, la newsletter, dans l’usage de boussole qui semble être devenu le sien aujourd’hui, donne du sens aux contenus édités par les journalistes, c’est à dire une direction, une orientation, une signification aisée à saisir.

Liturgie de linfo

Si la newsletter a su se renouveler, c’est aussi en épousant de manière stratégique le rythme de vie des lecteurs.

A l’heure où une infinité de contenus est accessible sur le net sans interruption, que les applications, d’un doigt, dirigent tous les mouvements du monde vers soi, il est intéressant de voir comment le format de la newsletter scande une véritable liturgie de l’information.

L’hebdomadaire spécialisé Stratégies a choisi l’heure du déjeuner, ce moment hybride entre discussion franchement pro et bavardage entre collègues, pour lancer « Le 13h ». A 19h, quand les conversations basculent clairement du professionnel vers le social, la newsletter peut servir à paraître au courant des événements principaux de la journée lors des dîners en ville. D’où l’offre pléthorique de newsletters qui remplissent cette fonction mondaine. Le vendredi, la newsletter du Monde Magazine, bulle d’oxygène dans un flux anxiogène, autorise ses ouailles à se projeter dans leur week-end.

Enfin, certaines newsletters osent le rythme mensuel, à l’instar de Médiacadémie, une lettre conçue par un collège de journalistes, de formateurs et de consultants et qui propose une veille qui s’assigne pour but d’ identifier outils, pratiques et innovations.

Sur le plan commercial, les newsletters, financées par la publicité, sont pour la plupart gratuites. Or, on le voit, elles requièrent un travail de plus en plus approfondi de la part des journalistes et des maquettistes, notamment. Verra t-on bientôt des versions payantes enrichies (indépendamment des newsletters réservées aux abonnés) propres à constituer un revenu d’appui pour les éditeurs de presse ?

En attendant, vous pouvez aussi vous abonner aux billets de Méta-Media ! (en haut à gauche de la page)

Dossier du New York Times : « la TV transformée »

Le New York Times a publié en ligne ce week-end un gros dossier consacré à la mutation de la télévision  (« la TV transformée ») qui sera dans la version imprimée de lundi matin. Nous en avons résumé la douzaine d’articles qui le composent et sorti les principaux points: 

« Social Media Takes Television Back in Time »  (L’aube de la Social TV)

La fonction de lien social de la TV fonctionne encore. Les médias sociaux — Twitter en premier lieu — redonnent du lustre à la TV en direct regardée en même temps par des millions de personnes. Nous ne sommes pas tous des binge-watchers.

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Extraits :

http://www.nytimes.com/2015/10/05/business/media/social-media-takes-television-back-in-time.html?_r=0

« With the TV Business in Upheaval, Targeted Ads Offer Hope » (Ma télé, mes pubs)

La TV devient un média de précision pour les annonceurs qui entendent pouvoir toucher précisément leurs cibles avec leurs produits sur n’importe quel écran. Vive les data ! Mais il y a un gros problème ! Les géants du web, Google et Facebook au premier chef, sont bien meilleurs en ce domaine. 

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Extraits : 

http://www.nytimes.com/2015/10/05/business/media/with-the-tv-business-in-upheaval-targeted-ads-offer-hope.html

« New Twists for the TV Plot, as Viewer Habits Change » (Rebondissements dans l’intrigue)

Face à une audience de plus en plus sophistiquée et impatiente, dont les manières de regarder la TV ont radicalement changé, les scénaristes des séries vivent dans la crainte d’être dépassés !  

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Extraits : 

http://www.nytimes.com/2015/10/05/business/media/new-twists-for-the-tv-plot-as-viewer-habits-change.html

« YouTube’s Young Viewers Are Becoming Its Creators »  (De spectateur à créateur)

Grâce à YouTube, la nouvelle TV des jeunes, les téléspectateurs deviennent des créateurs. Et ça change beaucoup de choses !

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Extraits :

http://www.nytimes.com/2015/10/05/business/media/youtube-younger-viewers-content-creators.html

« TV Transformed: How We Watch »

Echantillon de témoignages des nouvelles formes multiples de visionnage des contenus de TV : du teenager « streamer », au surfeur sur laptop, du consommateur à la carte, au picorage entre TV et ordi, en passant par la TV de rendez-vous. Mais beaucoup dépend de l’âge ! 

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http://www.nytimes.com/interactive/2015/10/01/business/media/TV-Transformed-Viewer-Profiles.html?rref=collection%2Fspotlightcollection%2Ftv-transformed&action=click&contentCollection=media®ion=stream&module=stream_unit&version=latest&contentPlacement=1&pgtype=collection

« Millennials Reconnect the Cable Cord as Children Arrive » (Et si les jeunes revenaient une fois installés ?)

Le phénomène de cord-cutting s’accélère, notamment dans les milieux urbains. Et les jeunes ont laissé tomber le téléviseur. Mais, même si les chiffres restent confus, dès qu’ils s’installent et commencent à avoir des enfants, ils reviennent à la TV par câble, selon Nielsen. Attention toutefois : les 18-34 ans passent désormais 40 heures par semaine sur leurs smart phones pour se distraire (musique, vidéos, jeux). Le double d’il y a un an ! 

 

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Extraits :

http://www.nytimes.com/interactive/2015/10/03/business/media/changing-media-consumption-millenials-cord-cutters.html?rref=collection%2Fspotlightcollection%2Ftv-transformed&action=click&contentCollection=media®ion=stream&module=stream_unit&version=latest&contentPlacement=2&pgtype=collection

« From Wasteland to Wonderland: TV’s Altered Landscape » (Finie, la vacuité!)

Le passage de la rareté à l’abondance, du temps de cerveau disponible vendu sur 3 chaînes à des milliers d’offres de qualité, du plus petit dénominateur commun à la prise de risques, a bouleversé — en bien — le paysage TV.  

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Extraits : 

« When technology replaced scarcity with abundance, every core assumption about TV began to crumble. Everything about the medium — how we receive it, how we consume it, how we pay for it, how we interact with it — has been altered, and TV is infinitely better for it ».

http://www.nytimes.com/2015/10/05/business/media/from-wasteland-to-wonderland-tvs-altered-landscape.html?rref=collection%2Fspotlightcollection%2Ftv-transformed&action=click&contentCollection=media®ion=stream&module=stream_unit&version=latest&contentPlacement=3&pgtype=collection

« Unwrapping the Cable TV Bundle » (Le dégroupage des bouquets)

Payer pour des centaines de chaînes qu’on ne regarde pas n’a plus guère de sens quand on peut choisir à la carte. Des bouquets moins chers, allégés sont proposés avec succès. Mais le public va être de plus en plus attentif à ses choix et se tourne aussi vers de nouveaux genres, comme les jeux. YouTube l’a bien compris. 

 

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Extraits : 

http://www.nytimes.com/2015/10/05/business/media/unwrapping-the-cable-tv-bundle.html?rref=collection%2Fspotlightcollection%2Ftv-transformed&action=click&contentCollection=media®ion=stream&module=stream_unit&version=latest&contentPlacement=4&pgtype=collection

1985: Television Transformed 1.0  (La vraie révolution fut la cassette vidéo)

La vraie révolution s’est passée il y a 30 ans quand nous avons pu enregistrer les programmes sur des cassettes vidéo. 

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Extraits : 

http://www.nytimes.com/2015/10/05/business/media/1985-television-transformed-1-0.html?rref=collection%2Fspotlightcollection%2Ftv-transformed&action=click&contentCollection=media®ion=stream&module=stream_unit&version=latest&contentPlacement=5&pgtype=collection

« Watching for the Programming Apocalypse »  (Déjà trop de séries ? )

Même avec 400 séries proposées cette année (le double de 2009 !), les nouveaux acteurs, comme Netflix, continuent de produire de nouveaux shows. Et de nouveaux concurrents arrivent. 

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Extraits : 

http://www.nytimes.com/2015/10/05/business/media/watching-for-the-programming-apocalypse.html?rref=collection%2Fspotlightcollection%2Ftv-transformed&action=click&contentCollection=media®ion=stream&module=stream_unit&version=latest&contentPlacement=6&pgtype=collection

« Searching Deeper on Online Video »   (Trouver cette scène ?)

Pour l’instant la recommandation (éditoriale, sociale et algorithmique) reste le moyen dominant de découvrir des vidéos en ligne. Mais tout le monde travaille aussi sur le search pour satisfaire la demande à la carte. Grâce aux données.  

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Extraits :

http://www.nytimes.com/2015/10/05/business/media/searching-deeper-on-online-video.html

Journalisme web : 10 tendances pour 2016

Automatisation et personnalisation dominent les grandes tendances technos qui auront le plus d’impact sur les rédactions dans les mois qui viennent.

Chaque année, en fin de conférence de lOnline News Association, la consultante et ex-journaliste américaine Amy Webb, passe en revue dans une salle comble, les technologies émergentes qui joueront un rôle important dans la collecte, la distribution et la consommation d’informations.

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Voici le cru 2016 présenté ce week-end à Los Angeles :

1INFORMATIQUE COGNITIVE (année 2)

Comment savoir ce que lisent vraiment les gens ? Comment mieux les atteindre ? De plus en plus grâce aux ordinateurs, qui après avoir longtemps calculé, se sont mis à apprendre (en ingurgitant des donnés) et sont devenus plus intelligents, notamment pour analyser le discours des utilisateurs, mais aussi leur comportement, leur caractère et la nature de leurs relations.  

Il est ainsi possible de déterminer automatiquement désormais leur emploi du temps, leur localisation, la vitesse de leur déplacement, ce qu’ils lisent, écoutent, regardent, le nombre de fois où ils sont « engagés » par votre site, votre offre numérique, leurs clics, leurs centres d’intérêt, leur niveau d’appétence techno, leur réaction à la pub, qui sont leurs amis etc…

C’est ce que fait l’appli Emu (messagerie + assistant personnel) combine intelligence artificielle et traitement du langage. Rachetée en 2014 par Google, elle aligne agendas, lieux, avec les souhaits exprimés en combinant en temps réel les données du web avec ses infos personnelles.

Le très puissant ordinateur Watson d’IBM comprend aussi via vos emails, messages, textos, profils publics,… vos intentions, votre personnalité, et surtout connaît les caractéristiques principales de vos interlocuteurs et personnalise le message en fonction du destinataire et ce qui résonnera chez lui. Idem pour l’appli Crystal: un interlocuteur pressé se verra ainsi proposé des contenus courts, allant directement à l’essentiel et sans fioritures.

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=> impact : permet de personnaliser les contenus (mais aussi l’horaire de distribution) en fonction des caractéristiques des destinataires. Sortes d’iTunes des contenus à expérimenter agressivement, notamment via les APIs.

2PUBLICATION P2P

Et si les intermédiaires disparaissaient ? Il est ainsi de plus en plus possible d’envoyer des contenus (audio ou vidéo sans plugin) en étant seulement connectés de point à point via les navigateurs.  

Google pousse fort en ce moment son nouveau format WebRTC, de browser à browser. Un éditeur peut ainsi envoyer des contenus personnalisés et complémentaires lors d’une émission à un second écran sans passer par des serveurs centralisés. BitTorrent travaille aussi à un nouveau projet Maelstrom en ce sens.

=> Expérimenter ce type de techno permet d’éviter les attaques DDoS et de contourner la censure dans des pays où la presse n’est pas libre. Mais il y est plus difficile de supprimer des infos incorrectes, d’éditer en temps réel et d’éviter le harcèlement.   

3RECONNAISSANCE

Dans l’année qui vient, les algorithmes vont nous reconnaître, et aider les journalistes en reportage.

L’appli pictograph de Fast Forward Labs  scanne et trie ainsi vos photos Instagram. Elle en dit donc beaucoup sur vous !

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Venant d’Inde, des technologies nouvelles sont capables d’identifier à distance les individus en fonction de leur manière de taper sur leur clavier d’ordinateur.

D’autres reconnaissent la morphologie des visages, via des caractéristiques thermiques, même dans le noir. 

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D’autres encore peuvent déterminer l’identité d’une personne dans une foule. Du datamining via photos pour journalistes !   

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Du fact checking aussi en temps réel, à l’instar du Washington Post : 

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=> Dans le cadre d’enquêtes par système de reconnaissance, les médias peuvent aussi très bien admettre honnêtement que leur taux de fiabilité n’est que d’environ 80 %. Mais ce sont de nouveaux outils utiles, y compris pour le reportage en direct.

4REPORTAGE VIA RESEAUX SOCIAUX  

Dans l’année qui vient, vous allez aussi de plus en plus vous appuyer sur les réseaux sociaux qui développent des outils au sein même des plateformes (et non sous forme d’applis séparées) pour détecter des signaux faibles.   

La nouvelle appli Signal de Facebook permet aux journalistes de détecter les sujets qui montent dans les conversations, via un système d’analyse prédictive puissante scanant l’ensemble des réseaux sociaux.

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De même Twitter Curator permet de voir arriver des sujets en avance de phase. Twitter travaille aussi sur un nouveau projet Lightening à la Discover de Snapchat où les sujets apparaîtront de manière visuelle.

=> A utiliser par tous les journalistes, et pas seulement l’équipe en charge des réseaux sociaux.

5METAVERS

Les masques de réalité virtuelle seront commercialisés en 2016, mais le journalistes devront d’abord porter leur attention sur la réalité augmentée et la 3D.

Hormis pour des documentaires en immersion, des concerts et le sport, la réalité virtuelle n’est pas encore un outil pour l’info, en raison de l’encombrement des masques.

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La réalité augmentée en revanche est plus prometteuse en raison d’un sentiment de présence au réel. Magic Leap vient ainsi de proposer son SDK.

Une autre techno est en train d’émerger et devrait bientôt se retrouver sur tous nos écrans, TV et voitures et changer notre manière d’interagir: l’holographie mobile proposée par Leia. 

Démo :

Leia a ainsi lancé son SDK ce week-end lors de la conf de l’ONA.

=> L’intérêt est d’utiliser des écrans 3D pour raconter des histoires, des cartes et faire de la meilleure data visualisation. Il faudra commencer à penser notre avenir avec ou sans casque de réalité virtuelle en 3D.

6ROBOTS

De vrais robots vont bientôt aider les journalistes dans leur travail. Ils deviendront vite indispensables. 

Via notamment des camerabots, comme Beam, système de video conférence mais aussi de captation d’images à distance en direct et de télé-présence dans des lieux non sécurisés lors de breaking news.

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=> 2016 est l’année où il vous faudra commencer à expérimenter la télé-présence et le journalisme virtuel. 

 

7L’INTERNET DE X

Dans un avenir proche, nous verrons se développer l’Internet de çi ou l’Internet de ça. Tout ou presque sera « cherchable », via un réseau distribué. De l’ADN d’un individu à la composition d’un plat dans notre assiette. 

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=> Cela ouvre un champ inexploité jusqu’ici pour les journalistes, mais qui réclamera des capacités accrues de vérification. 

8VULNERABILITE « ZERO DAY »

C’est une vulnérabilité informatique n’ayant aucun correctif connu. Le nombre d’attaques de piraterie est en plein boom et les défenses de plus en plus aléatoires. 

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=> Cette tendance va s’accentuer en 2016. Attention, les médias d’information sont aussi de plus en plus des cibles. 

9CONSOLIDATION MEDIA

Re/code fait désormais partie de Vox, lui-même dans NBC, qui est dans Comcast. Verizon a racheté AOL. Le FT a été racheté par Nikkei. Qui est le prochain ? BuzzFeed ? Vice ? Facebook et Twitter vont-ils fusionner ?

=> Ces investissements et prises de bénéfices vont se multiplier. En 2021, il est possible de voir AT&T, Verizon, Comcast, Amazon, avoir remplacé CBS, Viacom, le Washington Post, Hearst et Condé Nast comme premières marques américaines de médias. Les journalistes doivent s’y préparer.

10JUSTICE POPULAIRE PAR INTERNET

Attention à l’essor continu du jugement de la foule sur Internet sur les sujets de l’heure.  Le journaliste doit se garder de toute complicité.

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=> C’est un sujet complexe pour les rédactions qui doivent être encouragées à mener des discussions et des formations internes sur l’éthique pour ne pas ajouter à la situation de crise. 

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Les « slides » de la présentation sont ici. Et pour mémoire, voici les compte-rendus du top 10 d’Amy Webb, CEO de Webb Media Group, de fin 2014,  2013, 2012, 2011 et 2010.

 

 

IBC : la 4K attire toutes les convoitises

Par Jérome Derozard, consultant pour France TV Editions Numériques, et entrepreneur

L’IBC, grande messe annuelle rassemblant plus de 50.000 professionnels de l’industrie de la télévision à Amsterdam, a fait comme l’année dernière la part belle à la 4K, les grands diffuseurs étant invités à moderniser au plus tôt leurs chaînes de production pour faire face au défi de l’Ultra Haute Définition.

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Les premières chaînes linéaires diffusant en 4K ont été annoncées au cours des derniers mois, avec une diffusion essentiellement par satellite. A court terme la diffusion par Internet en « Over the Top » ou en IPTV est privilégiée pour la distribution des contenus très haute définition au plus grand nombre.

Consolidation du secteur, bataille des codecs et alliances

Pour assurer la diffusion via internet dans de bonnes conditions tous les diffuseurs doivent déployer de nouveaux capacités d’encodage supportant les nouvelles résolutions et formats de la 4K, ce qui provoque une certaine effervescence dans le secteur. En témoignent les rachats successifs de deux startups spécialisées dans l’encodage vidéo: l’Américain Elemental par Amazon (via sa filiale Amazon Web Services) et le franco-américain Envivio par Ericsson. Cette consolidation est le symbole de plusieurs tendances dans l’industrie : le passage à des solutions entièrement logicielles (par opposition aux encodeurs matériels), hébergées dans sur des infrastructures mutualisées (le « cloud » par opposition aux serveurs physiques), et fournies par de grands acteurs des télécoms ou de l’informatique (en remplacement des acteurs issus du monde de la TV).

En parallèle de cette consolidation se tient une « bataille des codecs », ces algorithmes de compression qui permettent de réduire la taille des vidéos Ultra Haute Définition pour qu’elles puissent emprunter les réseaux actuels. Alors qu’il y a quelques mois le standard HEVC/H265 semblait en passe de s’imposer, l’annonce d’un nouveau groupe d’industriels détenteurs des brevets sur le format HEVC, HEVC Advance, et surtout de son modèle de licence basé sur les revenus générés est en train de rebattre les cartes. En clair, chaque diffuseur choisissant le format HEVC devrait s’acquitter de frais de licences de 0.5% sur son chiffre d’affaires auprès de HEVC Advance. Conséquence de cette annonce, d’autres acteurs ont connu un regain d’intérêt à l’IBC, comme le V-Nova et son codec propriétaire Perseus ou dans une moindre mesure Google et son codec Open-source VP10 qui devrait sortir en 2016. Google était d’ailleurs présent à l’IBC avec un (tout) petit stand, histoire de ne pas effrayer les diffuseurs ?

Face à cette situation, une association regroupant presque tous les grands acteurs de l’OTT (sauf Apple…), l’« Alliance for Open Media » , a été constituée pour promouvoir de nouveaux codecs ouverts et si possible gratuits pour les diffuseurs.

Quel que soit le résultat de cette bataille, le risque pour les consommateurs est d’acheter des téléviseurs 4K utilisant des codecs non supportés par les diffuseurs, et d’avoir à se rééquiper dans quelques années. Idem pour les opérateurs TVs qui prévoient tous de lancer des box 4K dans les prochains mois, dont un grand nombre fonctionnant sous Android.

Mais malgré les doutes sur la technologie 4K, des exposants montraient déjà des équipements 8K…

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La HDR en vedette

D’autres exposants mettaient eux en avant la HDR (High Dynamic range) visant à améliorer le contraste des images pour une plus grande immersion. Le grand avantage de cette technologie étant de pouvoir être associé à des résolutions plus faibles que l’Ultra Haute Définition, nécessitant un débit plus faible mais aussi des écrans de taille plus réduite pour en profiter pleinement. Reste qu’il sera nécessaire aux diffuseurs et aux consommateurs de se rééquiper pour espérer en bénéficier.

La réalité virtuelle encore plus présente

Toujours dans le domaine de l’immersion, la réalité virtuelle était encore plus présente cette année à l’IBC au travers de nombreuses démos d’acteurs établis, qui montre son potentiel que ce soit pour visionner des vidéos à 360° ou comme interface de navigation immersive par exemple dans un catalogue VOD. Côté production on retrouvait de nombreux modèles de caméras à 360° chez GoPro dont l’assemblage « Jump » de 16 Caméras réalisé en partenariat avec Google (et vu à Google I/O) et qui sera commercialisé prochainement pour quelques milliers d’euros.

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De nombreuses startups démontraient leurs produits de réalité virtuelle dans la « Future Zone ». Au programme des caméras 360° (Sphericam, la R&D d’Al Jazeera), des logiciels d’assemblage vidéos (VideoStitch), des studios de création de contenus (Rewind), des logiciels d’animations 3D (Nozon)… On retrouvait également Jaunt VR, l’une des sociétés les plus en vues (et les mieux financées) du secteur de la production de contenus vidéo en réalité virtuelle VR. Tous attendent avec impatience le lancement des casques virtuels grand publics (Oculus Rift, Playstation VR, HTC Vive) courant 2016 pour prouver l’intérêt du média, et la viabilité de leur entreprise.

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Medialab et R&D

Toujours dans la Future Zone, la BBC présentait son programme « Taster » du «  Connected Studio » visant à recueillir de nouvelles idées, de nouveaux concepts médias auprès des employés, les prototyper rapidement en partenariat avec des startups, les tester auprès du public avant de les déployer (ou non) à plus grande échelle. Ce programme est un bon exemple de co-création agile entre grand groupe média, startups et le grand public dans un contexte de concurrence accrue avec les acteurs américains de l’OTT.

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A quelques mètres de la BBC le programme de recherche européen HBB2VS présentait quelques-unes de ces applications innovantes, dont certaines déjà vues sur le stand France Télévisions à Roland Garros et à Futur en Seine. Le but de ce programme est de mettre au point des technologies permettant de mieux combiner les avantages des réseaux « broadcast », hertziens ou satellites, et des réseaux haut débit afin de lancer de nouveaux services innovants. Ainsi la possibilité d’incruster un flux vidéo d’un traducteur en langue des signes (reçu par internet) au-dessus du journal TV diffusé via le réseau hertzien, tout en garantissant une parfaite synchronisation entre les deux. Ou encore la possibilité de transformer un flux TV Haute Définition reçu via le réseau hertzien en flux Ultra Haute Définition, en transmettant uniquement une partie du signal via le réseau haut-débit. Beaucoup de ces services devraient pouvoir être lancés à partir de 2016, avec l’arrivée de nouveaux téléviseurs supportant les nouvelles versions des standards HbbTV, MPEG et DVB.

En résumé

Au final cette édition de l’IBC s’est inscrit dans la continuité de l’édition 2014. Dans le domaine de la 4K, la plupart des acteurs sont encore en attente de visibilité sur les formats à utiliser et l’appétence du public, alors que les appétits financiers s’aiguisent. Du côté des box, l’annonce de la nouvelle Apple TV fait craindre aux acteurs existants de perdre le contrôle du marché de la vidéo et les pousse encore plus vers Android, avec ou sans Google. Enfin la réalité virtuelle apparait toujours plus prometteuse mais en l’absence de réels produits sur le marché, ces promesses ne peuvent être validées. Rendez-vous donc à l’IBC 2016 !

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Liens vagabonds : les adblockers gâchent la fête du mobile

A RETENIR CETTE SEMAINE :

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“MUST READ”

Quote : Incoming CEO Bob Sauerberg says Condé Nast is ‘digital first, mobile-led, and focused on millennials.’ – WSJ

A VOIR

ABUS DE POSITION DOMINANTE  – The winner takes all !

SURVEILLANCE vs. CONFIANCE

NOUVEAUX USAGES, COMPORTEMENTS

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DISRUPTION, REVOLUTION, DISLOCATION

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MOBILITES / WEARABLES :

ROBOTS, INTELLIGENCE ARTIFICIELLE, AUTOMATISATION, BIG DATA, MACHINE LEARNING 

NOUVEAUTES

REALITE VIRTUELLE / REALITE AUGMENTEE

SMART TV / STREAMERS / VIDEO / MULTI-ECRANS :

NETFLIX

#SOCIALTV :

YOUTUBE, FACEBOOK, ….

4K / U-HD

JEUX VIDEOS :

PUB

JOURNALISME 2.0

EDUCATION

OUTILS

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(Avec Barbara Chazelle)

Adblockers : vers un internet du riche et un internet du pauvre ?

Par Clara Schmelck, journaliste médias à Socialter, billet invité

Les logiciels de blocage de publicités, à linstar du navigateur dAdblock Plus Browser, sont amenés à simposer sur mobile, ce qui représente un manque à gagner pour les éditeurs de presse et les médias, contraints de parier sur les abonnements. Au risque de creuser un fossé dans lexpérience des médias en ligne ?

Manque à gagner pour les éditeurs

Depuis la rentrée, les éditeurs s’inquiètent d’une note rédigée le 24 août par Apple à l’attention des développeurs, et qui précise que la nouvelle mise à jour de son navigateur Safari, dans la prochaine version d’iOS, pourrait offrir la possibilité de masquer, outre des cookies et certaines images, des pop-ups.

Quand on sait que Safari est actuellement le premier navigateur sur les mobiles et tablettes, et que les recettes publicitaires issues du mobile ont enregistré un bond de 35% en deux ans, on comprend l’anxiété des éditeurs de presse, dont la publicité (display, search et mobile) assure souvent la source principale de revenu. Le digital est d’ailleurs désormais le deuxième média investi par les annonceurs (25%), devant la presse print. (Source : SRI).

En Allemagne, 60% des annonces pre-roll, ces messages vidéo qui précèdent le visionneuse d’une vidéo recherchée, seraient déjà bloquées sur desktop. En juin 2015, les divers logiciels comptabilisaient déjà 198 millions d’utilisateurs actifs mensuels, contre 121 millions en janvier 2014. Une étude produite en août par PageFair évoque 21,8 milliards de dollars de pertes de revenus publicitaires cette année. La perte pour les éditeurs est néanmoins difficile à quantifier, du fait que l’éditeur ne voit pas le trafic généré par les utilisateurs d’adblockers, lesquels empêchent aussi le tracking.

En juin 2014, un collectif d’éditeurs, mené par Axel Springer, RTL et Prosiebesen Sat.1, a porté plainte en juin 2014 contre Adblock Plus, accusant Eyeo de fonctionner sur un modèle économique « illégal ». Lors du FrenchWeb Day Media en mars, les éditeurs s’étaient levés contre AdblockPlus, le fameux logiciel allemand utilisé pour bloquer les dispositifs de tracking, les logiciels malveillants et les publicités intrusives sur le web, et qui s’attaque même au native advertising.

« Beaucoup de gens reçoivent notre contenu gratuitement en ligne, la publicité numérique assumant une partie des coûts », note un porte-parole du Washington Post. Sans la publicité, le quotidien américain n’a pas les moyens de produire du contenu gratuit qui soit suffisamment qualitatif pour attirer de nouveaux lecteurs vers des offres d’abonnement.

Depuis cette semaine, le Washington Post a ainsi mis en place un test pour dissuader ses lecteurs de se doter d’un adblocker. Lors d’une visite sur un article du site, l’internaute qui utilise un adblocker se voit opposer une fenêtre pop-up qui lui propose d’accéder au contenu en échange soit d’un abonnement à une newsletter, soit d’une souscription à une offre payante.

Eyeo, le logiciel allemand qui est à l’origine d’Adblock Plus, a répondu aux procès et aux critiques en donnant la possibilité aux éditeurs de contenus de figurer sur une «liste blanche» de sites aux publicités non bloquées… moyennant finances. Google et sa régie Double Click ainsi qu’Amazon figurent ainsi aujourd’hui sur la liste blanche. Et donc paient !

Certains éditeurs français et américains font appel aux services de Secret Media, un ad-server qui utilise la cryptographie pour générer un tag publicitaire différent à chaque page internet, de sorte à le rendre impossible à repérer par un bloqueur de publicité. Secret Media travaille déjà avec des acteurs du real time biding (RTB).

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Reste qu’il n’est pas rentable pour tous les éditeurs de contenus en ligne de s’offrir une place sur liste blanche, ni les services d’un bloqueur d’adblockers. De surcroit, il est probable que les adblockers développent rapidement des solutions anti-adblocking. Le bras de fer peut durer longtemps.

Wanted ! Sites plus propres

C’est pourquoi, estime Pierre Chappaz, président de la plateforme de vidéo publicitaire Teads, les médias de qualité doivent remettre l’expérience utilisateur au centre de leur stratégie d’édition en ligne en régulant eux-même la publicité sur leur site, tant au plan qualitatif que quantitatif. « Les médias qui auront ce courage bénéficieront d’un cercle vertueux : visites plus fréquentes, consommation accrue de leurs contenus, et meilleure image de marque », assure t-il au magazine suisse Bilan. Quant aux annonceurs, ils auraient « tout à gagner à mettre un terme à la recherche du contact à tout prix, fût-il forcé et désagréable pour l’internaute ».

Ce dispositif implique pour l’éditeur de refuser les offres de certains annonceurs, voire d’embaucher quelqu’un chargé d’éditorialiser et de disposer dans la maquette numérique du titre les contenus publicitaires. Seuls les abonnements peuvent amortir les coûts. Le lecteur qui est prêt à sortir son portefeuille bénéficie alors d’un site ou d’une appli dégagés de toute publicité qui ne présenterait pas un intérêt culturel, esthétique ou pédagogique. Aux autres les pages embouteillées d’annonces en pagaille et de trackers intrusifs, sur des sites lourds et lents à charger.

Cette tendance pourrait s’appliquer de la même manière à la SVOD. La semaine dernière, le service américain de streaming vidéo Hulu a dévoilé son service d’abonnement sans publicité. Pour quatre dollars de plus par mois, les abonnés « Hulu Plus » peuvent s’immerger dans leurs films sans jamais être distraits par des séquences vidéo qui n’ont rien à voir.

Hulu

Fracture numérique

Le business de l’adblocking est-il entrain de générer un internet des riches et un internet des pauvres ? Aux uns la lecture confortable et fluide d’un texte ou d’une oeuvre cinématographique, aux autres, la fatigue visuelle et le bruit assourdissant du balai des pop-ups qui surgissent comme des bolides sur un boulevard blafard. La possibilité de se concentrer pourrait devenir un luxe que seule une petite société de souscripteurs aux sites de presse et de SVOD pourront s’offrir, quand la masse devra se contenter d’un fatras de mots et d’images morcelés, dispersés, produits dans la hâte.

L’internet n’aurait plus la même configuration et n’offrirait pas les mêmes opportunités selon que vous avez les moyens d’y entrer par le porche des abonnés, ou que vous passez par la porte des simples visiteurs.

La fracture numérique signifiait jusqu’à présent un fossé entre ceux qui ont un accès constant et convenable à la technologie numérique et ceux qui ne l’ont pas. Avec l’écosystème de l’adblocking, le fossé pourrait bien consister dans un internet du riche et un internet du pauvre.

par @ClaraSchmelck